Retour à l'accueil
7 juin 1835 - Numéro 38
 

 




 
 
     

Motifs de la diminution des causes à l’audience des prud’hommes.

[1.1]Il est incontestable que, depuis quelque temps, les audiences du conseil des prud’hommes n’offrent plus comme par le passé, cette affluence de causes dans lesquelles s’élevaient souvent ces altercations vives, qui ont en quelque sorte entièrement disparu. Or comme il n’y a pas d’effet sans cause, nous nous attacherons à analyser les motifs de cette amélioration morale qu’a subi la classe laborieuse.

La cause qui se présente naturellement la première, nous paraît être la publicité, et la seconde le compte rendu de l’audience par les journaux chargés spécialement de ce rapport. Nous allons développer notre pensée.

Depuis 1831 que le huis clos est tombé pour faire place à la publicité que la classe ouvrière réclamait vainement depuis si long-temps, les chefs d’atelier, soit qu’ils fussent appelés au conseil, soit par motif d’instruction ou de curiosité, lorsque leur présence n’y était pas nécessaire, ont pu suivre les séances et profiter des heureux effets de la publicité. Il leur a été facile, en appréciant ce qu’il y avait de juste ou d’arbitraire dans les réclamations, de préjuger ce qui pouvait avoir quelque analogie dans une affaire qui leur était personnelle. C’est la publicité qui leur a démontré les conséquences funestes des demandes qui n’ont que la fraude pour appui, l’intérêt pour mobile ou l’ignorance pour partage, en soulevant à leurs yeux le voile que l’égoïsme tenait depuis si long-temps tendu.

En effet, tel qui ne rougissait pas autrefois de ses exactions, parce qu’elles étaient enveloppées de ténèbres, craignant maintenant que la publicité ne vienne imprimer sur son front le stigmate de la honte, a été contraint de recourir à des voies plus délicates. Celui dont la fortune rapide est le but de toutes les opérations, n’importe le sentier par lequel il puisse y parvenir ; celui-là, disons-nous, se jouait jadis, et de ses promesses et de la bonne foi. Mais aujourd’hui son intérêt même l’oblige de recourir à la droiture, parce qu’il n’ignore pas qu’une condition peu délicate mise au grand jour serait à même de le priver du concours de ceux dont les bras actifs et laborieux contribuent chaque jour à l’édification de sa fortune. Mais [1.2]l’ignorance a aussi beaucoup gagné dans ces débats publics. L’audience, par ce moyen, s’est trouvée transformée en école publique d’intérêts industriels ; chacun y a puisé les connaissances nécessaires pour distinguer la justesse ou la fausseté d’une réclamation ; et ce n’est pas là le moindre bienfait de cette amélioration. Le chef d’atelier y a appris à connaître ses droits, le négociant à compter un peu moins sur sa prérogative ; le compagnon à se baser sur la justice dans ses demandes, l’apprenti à apprécier l’étendue de ses devoirs ; et tous, les égards qu’on se doit réciproquement et cet amour de la justice qui fait le bonheur de la société.

Mais il est un motif encore plus puissant et qui a contribué spécialement à la diminution du nombre des causes au conseil des prud’hommes, c’est le compte-rendu des séances et le narré des différens qui s’élèvent successivement entre les négocians et les chefs d’atelier, entre ces derniers et leurs compagnons ou leurs élèves. La jurisprudence du conseil n’étant pas une jurisprudence écrite, mais bien fondée sur des faits établis et la conscience des juges, il est de la plus haute importance que par le relevé des décisions l’on soit à même de baser, en quelque sorte et par analogie, les jugemens qui pourront être rendus, afin d’éviter ces demandes fastidieuses, qui ne peuvent qu’être souvent défavorables à ceux qui les font.

L’apprenti ayant la facilité de prendre connaissance de la sévérité du conseil envers ceux qui se permettent soit une mauvaise conduite, soit des plaintes exagérées envers leurs chefs d’atelier, se décidera parfois à changer de manière d’agir. La perspective d’un élève condamné à un défrayement pour le peu de soin qu’il apporte à la confection de l’étoffe lorsqu’il est à même de bien faire ; 1’indemnité qu’un autre est contraint de compter à son maître pour sa négligence à remplir ses obligations et son apprentissage à recommencer ou à terminer ailleurs, le fait souvent rentrer en soi-même, en fait un bon ouvrier de mauvais qu’il se disposait à devenir. Par-là, tout en rapportant à leurs chefs d’atelier, ces apprentis se préparent à eux-mêmes un heureux avenir, en se formant à leur profession [2.1]et en acquérant cette délicatesse qui peut seule soutenir notre fabrique chancelante. L’ouvrier qui peut-être oubliant qu’un jour il est appelé à diriger lui-même un atelier, se permettrait de tracer des lois rigoureuses, dans la crainte que sa conduite ne devienne publique, non-seulement aux yeux des personnes présentes à l’audience, mais encore à la majeure partie des chefs d’atelier, par le compte-rendu de l’audience, rectifie souvent sa conduite et se décide à prendre cette aménité de caractère qui enfante la sympathie qu’il est si doux de posséder. Le chef d’atelier qui oubliant parfois que naguère il était à la même passe que ceux qui sont aujourd’hui sous sa dépendance, voudrait tendre à l’arbitraire, tire dans la décision du conseil souvent un avis salutaire qui lui fait rectifier sa conduite avenir.

Mais sans contredit, la raison qui doit nous porter le plus à désirer que, par la voie de la publicité, les exactions dont nous sommes les victimes arrivent enfin à leur terme, est cette appréhension où sont les négocians que leurs noms soient consignés dans un journal comme exemple de fraude, d’astuce, de lésinerie ou de peu de bonne foi. Que de chefs d’atelier ont dû au journal le gain de leur cause sans, qu’elle fut plaidée ! Combien de négocians auraient franchi sans remords la barrière de la droiture, si la crainte d’être signalés ne les avait fait changer d’avis ! Combien qu’une première faute portée à la connaissance du public a soustrait à la récidive ! Chaque homme porte avec lui son amour-propre auquel il sacrifie chaque jour pour édifier sa réputation. L’amour-propre est le principe de toutes nos actions ; bien entendu, il est la source de toutes les vertus ; mal placé, il devient la cause des plus grands vices lorsqu’on ne peut lui opposer une digue ou lui lancer un trait qui le blesse. Or, la presse a seule le pouvoir de lui décocher (à l’amour-propre ) ces flèches mordantes qui l’aiguillonnent : elle seule est appelée à saper les fondemens de ce vain édifice. C’est par son rayon lumineux dont le reflet brille dans tous les ateliers, qu’elle vient à bout de dissiper l’égoïsme qu’un nuage épais entoure. Par la presse et la publicité il nous est donné de jouir de la plénitude de nos droits ; ne négligeons pas leurs bienfaits, et persuadons-nous bien que sans elles nous retomberions dans le chaos d’où leurs mains puissantes nous ont tirés.

Commission définitive pour l’érection du monument Jacquardi.

Les souscripteurs pour l’érection d’un monument à la mémoire de Marie-Joseph Jacquard se sont réunis en assemblée général, le 2 juin à l’Hôtel-de-Ville ; ils ont entendu le rapport fait au nom de la commission par son secrétaire, M. Pichard, et ont ensuite procédé, au scrutin, à la nomination d’une commission définitive de onze membres.

En voici les noms :

MM. Riboud, président du conseil des prud’hommes ; Perret, chef d’atelier, membre du conseil ; Labory, chef d’atelier, ex-membre du conseil ; Clément Reyre, membre du conseil municipal ; Laurent Dugas Laurent, président de la chambre de commerce ; Boullée, président de l’académie des sciences et belles-lettres ; Janson, président de la société d’agriculture ; Chenavard, professeur d’architecture à [2.2]l’école des arts ; Arlès Dufour, commissionnaire en soierie ; Ollat, fabricant ; Pichard, allié de la famille Jacquard. C’est avec la plus vive satisfaction que nous avons vu les noms de deux industriels figurer parmi ceux des hommes distingués, choisis comme membres de la commission chargée de diriger l’édification du monument à la mémoire de celui qui a illustré la brillante manufacture lyonnaise, métropole de l’industrie française en ce genre. Né ouvrier, mort ouvrier, il restait à des représentans de son industrie d’attacher la couronne immortelle qui doit éterniser parmi nous son souvenir.


i. La commission a été prise parmi les souscripteurs.

Monsieur le Rédacteur,

La Tribune dite prolétaire m’apprend, par un article dans son numéro du 24 mai, que M. Charnier est parti pour Paris et que bravement il a remis la lettre que je lui ai écrite le 11 mai et dont votre numéro du 17 a donné copie, à MM. Chastaing et Legras, l’un rédacteur et l’autre gérant de ce journal. Je plains ces messieurs de s’être chargés d’une réponsei que sans doute leur ami était embarrassé de faire, et de s’en être surtout si maladroitement acquitté. Dominés par le désir de satisfaire une colère, il est fâcheux qu’ils aient oublié la mission de journaliste, au point d’intervenir dans un débat particulier dans le seul but d’irriter les contestans.

Ainsi M. Charnier est moins qu’un Matamore, c’est-à-dire un faux brave ; car le faux brave ne recule positivement qu’au moment du vrai danger. M. Charnier n’est qu’un poltron hargneux qui injurie parce qu’il sait qu’il peut fuir ; je pourrais ici, M. le rédacteur, m’étaler tout à l’aise sur le compte de cet homme bizarre, dont le jugement paraît si souvent équivoque et le caractère si jésuitique ; car du moment où il a des représentans, je peux ne point avoir de ménagement pour lui et le considérer comme présent ; mais battre les fous c’est un mauvais moyen, il vaut mieux attendre qu’ils puissent vous comprendre. En attendant, un mot sur MM. Chastaing et Legras, ses fondés de pouvoir, qui dans le premier paragraphe de leur réponse disent : L’Indicateur n’a point de rédacteur en chef, mais il a un Bravo, et ce Bravo c’est M. Ph. Daverede ; ils se fussent peut-être abstenus ces messieurs, s’ils avaient positivement su que le nom de bravo, peu connu à Lyon mais beaucoup à Paris, se donne toujours aux hommes comme eux qui obtiennent leur entrée gratis aux théâtres, parce qu’ils offrent d’applaudir à tour de bras, les nouvelles pièces et les nouveaux acteurs quels qu’ils soient ; on appelle vulgairement ces hommes des claqueurs d’actrices, des serviteurs de directeurs, des intrigans enfin qui nuisent aux plaisirs de ceux qui payent leur place.

Il y eut un Bravo dont la physionomie masquée et le poignard mercenaire, fut fatale à plus d’un innocent ; M. Chastaing pousserait-il l’impudence jusqu’à me mettre en similitude ? L’Indicateur n’a point à rougir de ses actes ; il n’attaque pas, il riposte, et pour armes envers des hommes tels que ceux de la Tribune prolétaire il n’a qu’un souverain mépris : à quoi bon ressusciterait-il un Bravo ? Plus loin, ces messieurs disent : L’Indicateur n’est pas un Matamore, ce qui le distingue de M. Daverede ; moi je dis : M. Chastaing est un impudent, un fat au physique comme au moral. C’est dans ses semblables que se rencontrent les faux braves, et non dans les anciens soldats de l’Empire.

Je ne sais, M. le rédacteur, si vous avez lu cette diatribe, grand bavardage qui ressemble à celui d’un homme agité par la fièvre maligne, et dont je n’ai relevé que les principales attaques contre moi. Je désirerais, monsieur, que vous eussiez la complaisance de mettre dans votre numéro prochain les réflexions que je fais sur MM. Charnier, Chastaing et Legras, les terminant en les engageant a être à l’avenir plus judicieux et moins bavards ; vous promettant, M. le rédacteur, de ne plus répondre à de semblables [3.1]sottises, persuadé que ces sortes de querelles sont peu faites pour amuser vos lecteurs. J’ai l’honneur, etc.

daverede.


i. J’engage le lecteur à la voir dans la Tribune prolétaire du 24 mai.

Il est des êtres qui abhorrent l’obscurité et qui, en dépit du sort, se créent une existence dont l’art est d’en imposer aux sots, de divertir ceux qui les apprécient et de surprendre ceux qui n’ont pas le temps de les examiner. Il est des gens qui ne sont au-dessus d’eux-mêmes que lorsqu’ils font eux-mêmes les frais de leurs louanges ; qui ont de l’influence parce qu’ils prodiguent leurs visites, qui ont de la prétention, et dont on détruit la chimère en ne les nommant pas. Il est des hommes dont le pédantisme caustique ne trouve de bon, de beau, de vrai que ce que leur esprit étroit a conçu ; qui, pour voiler leurs défauts, jettent un ridicule sur la vertu des autres ; qui vont toujours critiquant les entreprises sans savoir en concevoir une. Ces hommes tous nos lecteurs les connaissent.

CONSEIL DES PRUD’HOMMES.

Audience du juin.

présidence de m. riboud.

Sur 17 causes appelées, 4 ont fait défaut, 4 ont été renvoyées, dont une à vendredi 12 juin pour conciliation par-devant MM. Bourcier, Verrat ; une à samedi devant MM. Perret, Roussi ; une à huitaine pour un rapport de M. Dumas ; une à vendredi 5 juin, et 2 autres à huitaine, et 4 retirées. 6 étaient appelées sur citation.

Le conseil n’a rien offert d’intéressant.

VARIÉTÉS.

LA VENGEANCE D’UN NÈGRE.

ballade africaine.

I.

Un soir, le douzième de la lune, Antonio, le patron de la case du Repos, était assis au pied d’un vieux platane où soufflait le vent de la nuit. Autour de lui, ses joyeux enfans se disputaient un siège sur ses genoux, pendant qu’il leur prodiguait des caresses.

Or, vers le milieu du jour, il avait fait un serment de vengeance : il avait trouvé noyé, dans le grand puits du jardin, Fox, son chien favori, le compagnon fidèle de ses courses.

Diégo parut devant lui : Diégo, le plus ancien de ses nègres, haïssait depuis long-temps Fox, dont la dent cruelle lui avait plus d’une fois ensanglanté les mains.

« Pourquoi as-tu fait périr mon chien fidèle ?

– Maître, ce n’est pas Diégo.

– Ah ! tu joins le mensonge à la méchanceté ! va-t-en recevoir cent coups de fouet. »

Et on emmena Diégo. Et Antonio continua ses caresses à ses joyeux enfans qui se disputaient un siège sur ses genoux, aux blancs rayons de la lune, car la lune aimait Antonio, le patron de la case du Repos. Quant il était assis le soir sous le vieux platane où soufflait le vent de la nuit, elle glissait près de lui, et, tout en se jouant dans le fluide de ses yeux ou dans le brillant de ses boutons, elle illuminait les larges feuilles qui se balançaient au-dessus de sa tête.

[3.2]II.

Cependant Diégo oubliait son supplice : tandis qu’un sang noir jaillissait de ses reins déchirés, il souriait étrangement. Ses lèvres se contractaient avec amertume, ses dents étaient serrées, son œil blanc brillait comme du feu sous sa paupière noire ; et pourtant il souriait, mais il y avait une arrière-pensée dans son sourire.

A quoi donc songeais-tu, Diégo ? au plaisir de t’être vengé cruellement des morsures d’un chien ? non ! car ce n’était pas toi qui l’avait fait périr ! ou bien aux flots limpides du Marigot, où, jeune et libre encore, tu allais tremper tes pieds ? ou encore au feuillage sacré du tabba qui ombragea ton berceau ?

Non ! Diégo ne songeait point à tout cela, mais il regardait Antonio caresser ses joyeux enfans aux rayons blancs de la lune. Or la lune aimait Antonio, le patron de la case du Repos. Quand il était assis le soir sous le vieux platane où soufflait le vent de la nuit, elle glissait près de lui, et, tout en se jouant dans le fluide de ses yeux ou dans le brillant de ses boutons, elle illuminait les larges feuilles qui se balançaient au-dessus de sa tête.

III.

Le lendemain, avant qu’Antonio fût allé s’asseoir sous le vieux platane où soufflait le vent de la nuit, Diégo s’approcha des enfans. Ils confiaient aux vagues des flottes de roseaux.

« Petits maîtres, qui de vous veut monter avec moi au haut de la case pour voir le grand serpent rouge qui vole avec des ailes noires ?

– Oh ! allons-y bien vite, Diégo… allons ! »

Et le curieux Pedro, et Maria la gentille, et le petit Juanito montèrent, en se hâtant, sur les pas du vieux nègre.

Or Diégo, prenant Maria dans ses bras, la regarda avec ce sourire étrange qu’il avait la veille, lorsque le sang jaillissait de ses reins déchirés.

Cependant Antonio, selon sa coutume, vient chercher ses enfans pour les conduire sous le platane et les y bercer sur ses genoux. Il touche au seuil de sa case ; trop tôt il s’étonne de leur absence, car Maria tout à coup a roulé broyée à ses pieds. Son regard épouvanté se lève… Il rencontre Pedro que la main du nègre tient suspendu en l’air ! A peine ses genoux tremblans ont-ils eu le temps de fléchir, que les membres déchirés de Pedro se sont mêlés à ceux de sa sœur.

A toi, maintenant, le dernier des trois, gentil Juanito, dont l’œil est si riant, dont le corps est si frêle ; l’affreux Diégo le lâchera-t-il aussi ?

Antonio se tord de douleur.

« Grâce… grâce !… Mais, Antonio, ta voix expire sur tes lèvres !… écoute… C’est un ricanement infernal que Diégo te jette pour adieu, car Juanito et lui se sont brisés ensemble aux panneaux sanglans de ta case.

Or, la lune aimait Antonio, le patron de la case du Repos, qui venait s’asseoir sous le platane où soufflait le vent de la nuit : mais en glissant ses rayons blancs sous les feuilles, elle ne se joua plus dans le fluide de ses yeux ou dans le brillant de ses boutons.

Emile-Ch. prou1.

CITATIONS.

– Un acte de vertu jeté dans la société, est à peu près comme ces pierres qu’on fait tomber dans un gouffre ; [4.1]elles retentissent long-temps, quoiqu’elles aillent se perdre pour jamais.

– Plus on sacrifie pour rendre un autre heureux, plus il nous est cher ; et si le sort vient à le persécuter, il nous ravit alors plus que notre bonheur, il ravit le sien.

– Pour les honnêtes gens, les rapports augmentent avec les années… ; pour les gens vicieux, les disconvenances augmentent. L’inconstance est le défaut du vice ; l’influence de l’habitude est une des qualités de la vertu.

– On ne se repent jamais de s’être mis à sa place ; mais on se repent quelquefois d’y avoir mis les autres.

– Les gens à amour-propre se persuadent continuellement qu’on les admire ou qu’on leur porte envie ; ils sont comme des voleurs qui croient sans cesse qu’on les montre du doigt.

NOUVELLES.

– On lit dans le Breton de Nantes1, du 2 juin :

Cholet, le 30 mai.
Un attentat horrible, digne des peuples les plus barbares, vient d’être commis à Saint-Lezin, près Chemillé, sur la personne de M. Pelé, instituteur, âgé de 62 ans, ancien militaire.
Trois misérables se présentent chez lui, jeudi 28 ; ils étaient armés ; mais il eût été trop humain de le tuer d’un coup de fusil ; ils le frappent avec un bâton de houx sur la tête, lui cassent un bras et une jambe, en réitérant les coups : il est sans connaissance. Ces hommes féroces prennent un de leurs souliers ferrés de gros clous, ils le dépouillent et le rabotent sur les reins et sur la figure. Le cœur se soulève à de pareilles horreurs.
M. Deslondes, médecin et maire de Chemillé, a fait enlever ce malheureux, et il a été conduit à Chemillé.

Cholet, 31 mai.
Aujourd’hui 31 mai, 3 heures du matin, les deux frères Alard ont été pris aux Cerqueux de Maulevriers.
Le maréchal des logis de la brigade de Maulevriers nommé Pierre Hourteillan, qui, depuis plusieurs mois, était à la piste des deux frères, informé que souvent ils se rendaient aux Cerqueux, et qu’ils y passaient la nuit dans des maisons qui lui avaient été désignées, est parti à une heure avec un brigadier et sept gendarmes ; ils se rendent aux Cerqueux, et s’arrêtent à l’extrémité du bourg, sur la route d’Argenton. Il fait cerner et ouvrir une maison ; il passe à la seconde, en fait autant ; arrivé à la troisième, il frappe à la porte.
Cette maison est occupée depuis plus de 40 ans par un Italien. Qui est là ? – Ouvrez. – Qui êtes-vous ? – Gendarmes. Ouvrez et allumez une chandelle. La porte s’ouvre le maréchal des logis avait placé ses gendarmes aux croisées il entre seul. Une des fenêtres s’ouvre ; un homme paraît : c’est l’un des Alard. Un gendarme le met en joue ; la fenêtre se referme. Cependant M. Hourteillan ouvre une porte, et trouve les deux Alard en chemise avec un pantalon ; il ne les connaissait pas ; mais eux-mêmes lui disent : Nous sommes les frères Alard.
Enchanté de cette découverte, il saisit l’un d’eux au collet. Ne me maltraitez pas, ou je vous ouvre le ventre Malheureux ! tu n’as pas d’armes. Alard lui montre un couteau ; le maréchal des logis fait un pas en arrière, croise la baïonnette, et lui dit : Si tu fais un mouvement, tu es mort.
Les gendarmes arrivent, ils sont liés ; ils ont été amenés ce matin à Cholet et conduits en prison, au milieu d’une grande partie de la population.
On sait combien ces deux hommes étaient redoutables : ils s’étaient cent fois vantés qu’on ne les pendrait jamais vivans, [4.2]qu’ils avaient chacun six coups à tirer, et qu’ils se défendraient jusqu’à la mort.
Cette prise est de la plus haute importance pour la tranquillité du pays.
M. le maire de Cholet vient de visiter à la prison les frères Alard ; ils n’ont rien perdu de leur audace.

AVIS.

Un individu en état d’idiotisme complet et entièrement perclus de tous ses membres, a été trouvé à Lyon, le 14 mai courant, couché sur la voie publique, où il paraît avoir été amené d’un autre département.

Aux questions qui lui sont adressées, il ne répond que par les mots : TAROUCHE, jean. Il est présumable que c’est son nom.

Signalement :

Agé d’environ 36 ans ; taille d’un mètre 70 centimètres (5 pieds 3 pouces) ; cheveux, sourcils et barbe châtain foncé ; front élevé ; yeux roux ; nez effilé et pointu ; bouche moyenne ; menton rond.

Ses vêtemens consistent en une veste ronde en drap bleu clair, un pantalon en drap bleu foncé, un gilet de velours noir et un col noir.

En cas de renseignemens, les adresser à la préfecture du Rhône, division de la police.

ANNONCES.

antoine curvat
Fabrique toutes sortes de cordes pour arcades, colets à crochet, lisage, enlaçage et tout ce qui concerne la fabrique de soieries, à des prix modérés.
Rue de Cuire, en face du n° 3, et Grand-Rue, n° 7, à la Croix-Rousse.

A vendre un atelier de pliage bien achalandé.
S’adresser au bureau.

– A vendre, une mécanique longue de 32 guindres, faite par Chatillon.
S’adresser chez M. Favier, rue Casati, n° 1, au 2e.

– A vendre, 3 métiers de mouchoir travaillant, mécaniques en 800 faites par Werly, et plusieurs autres ustensiles, battant 6/4, tampias idem, remisses fil, rouleaux 6/4.
S’adresser chez M. Bernard, rue Henri IV, n° 13, au 2e.

– A vendre, un métier d’unis, rouleaux, battant et accessoires.
S’adresser au bureau.

– A vendre, ustensiles de lancés ; savoir : 2 remisses de 5/4 60 portées, plusieurs rouleaux 5/4 et 6/4, 3 battans 5/4 et 6/4, 2 tampias en fer 5/4.
S’adresser au bureau.

– A vendre, trois métiers de châles lancés.
S’adresser cours Morand, aux Brotteaux, n° 8, au portier.

– A vendre, pour cause de départ, un atelier de 4 métiers, dont 2 en châles au 1/4 en six et sept quarts de large ; mécaniques en 900, 1 500 et 200 ; le tout ensemble ou en partie.
S’adresser chez M. Martinon, place de la Croix-Rousse, n° 17.

– On demande une dévideuse à gage.
S’adresser à M. Laporte, rue du Chapeau-Rouge, n° 7, au 3me.

– A vendre, pour cause de décès, 3 métiers d’uni tout travaillant.
S’adresser chez M. Vendel, rue Grolée, n° 31, au 3me.

– A vendre, un atelier de 4 métiers façonnés, 3 mécaniques 600, une 400, plus une mécanique ronde propre à dévider et à faire les canettes. On prendrait à volonté la suite de la location.
S’adresser chez Mme Ve Bimet, rue Dumenge, n° 8, au 1er.

– A vendre, une mécanique en 600, plus une mécanique en 400, travaillant en 8 chemins.
S’adresser au bureau.

Notes (VARIÉTÉS.)
1 Emile-Charles Prou dont les Nouvelles et chroniques furent publiées en 1836.

Notes (NOUVELLES.)
1 Le Breton. Sciences, agriculture, industrie, commerce, publié à Nantes depuis 1826.

 

 

Contrat Creative Commons

LODEL : Logiciel d'édition électronique