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15 août 1835 - Numéro 1
 
 

 



 
 
    
AVIS SANITAIRE.

La Mairie de Lyon a fait afficher une instruction délibérée par la commission centrale de salubrité de l’arrondissement de Lyon, sur les moyens de se préserver du choléra-morbus. Nous croyons utile d’en soumettre l’analyse aux lecteurs. Les prescriptions qu’elle renferme sont utiles à suivre lors même, ce qui paraît probable, que ce fléau ne viendrait pas affliger notre cité. Améliorer les conditions physiques d’existence de la classe prolétaire, est encore selon nous, travailler d’une manière efficace à son émancipation ; car, nous l’avons dit et nous ne cesserons de le répéter sans crainte de paraître fastidieux : l’émancipation des classes ouvrières repose sur deux pivot, amélioration physique, amélioration morale ; le bien être physique doit être relatif au bien être intellectuel, si nous pouvons nous exprimer ainsi. A nos yeux le bien être physique comprend non seulement, une alimentation saine, c’est là la vie animale, mais plus encore des conditions de propreté et d’aisance dans le logement et l’habillement, de manière a effacer de plus en plus l’anomalie qui existe sous ces divers rapports entre la classe riche et la classe pauvre. Il faut selon nous, que par le langage, l’instruction, les manières, les habitudes, en un mot dans tout ce qui concerne la vie, il n’y ait plus que des hommes comme il faut.

Voici le résumé des précautions que les savans médecins qui composent la commission centrale de salubrité prescrivent, et auxquelles nous adhérons complètement.

1.° Ecarter soigneusement toutes les causes qui pourraient altérer la pureté de l’air. Un vicié par la malpropreté est une cause active de développement et de progrès du choléra-morbus.

2.° Balayer exactement les appartemens, les débarrasser de toute espèce d’immondices même des hardes hors de servie, des meubles usés et inutiles, des linges sales ; etc.

3.° Gratter et frotter les carreaux des appartemens, et si on les lave, faire disparaître promptement l’humidité.

4.° Eviter de nourrir des animaux tels que les poules, pigeons, tourterelles, lapins, cochons d’Inde ; ne conserver les chiens et les chats qu’autant qu’ils seront d’une utilité réelle.

5.° Ne pas faire sécher le linge dans les appartemens.

6.° Ne pas laisser les fenêtre ouvertes pendant la nuit, mais renouveler l’air plusieurs fois dans le jour, en ouvrant les fenêtres et les portes, afin d’établir des courants.

7.° Tenir les latrines propres et exactement bouchées, nettoyer soigneusement tous les matin les vases de nuit, laver à grande eau les éviers, les plombs, les conduits des eaux ménagères et pluviales.

[3.2]8.° Tenir les vitre propres et transparentes : la clarté du jour est utile à la santé. Faire passer une couche de lait de chaux sur les mus des chambres obscures qui n’ont pas été blanchies depuis long-temps.

9.° Eviter quand on a chaud de se placer dans des courants d’air ; éviter de s’exposer aux variations brusques de la température, ne pas se promener pendant les soirées fraîches et humides.

10.° Entretenir la chaleur aux pieds par une bonne chaussure et même des bas de laine. Si la température vient à s’abaisser, entretenir la chaleur au ventre par une camisole de flanelle ou une large ceinture d’étoffe de laine, laver tous les huit jours ces objets.

11.° Ne pas poser les pieds nus sur le sol en sortant du lit. Cet usage, dangereux dans tous les temps, pourrait devenir mortel quand le choléra existe.

12.° Tenir très propres les vêtements de drap et de laine, parcequ’ils s’imprègnent aisément de sueur et de poussière ; changer de linge au moins une fois par semaine.

13.° Laver les toiles de paillasse, en renouveler la paille, exposer à l’air pendant quelques heures chaque matin les matelats et même faire carder ceux qui ne le sont pas depuis plus d’un an, secouer fortement les couvertures, supprimer les rideaux des alcôves et des lits, afin de bien aérer les alcôves et les lits.

14.° Se laver tous les matins le visage et les mains avec de l’eau tiède ou du moins qui ne soit pas tout récemment sortie du puits, se laver au moins deux fois par semaine les pieds et les jambes avec de l’eau tiède légèrement savonnées.

15.° Observer pour sa nourriture une grande tempérance, éviter cependant d’arriver trop brusquement à la réforme de son régime habituel, mais le faire progressivement.

16.° Ne point faire de repas copieux surtout manger peu au souper ; boire pendant les repas du vin avec de l’eau. Les vins acides tournés, la bière trop fermentée sont nuisibles, l’eau pure est préférable : manger peu de salade, s’abstenir de fruits dont la maturité n’est pas complète, s’abstenir de la viande des animaux trop jeunes telle que des veaux, agneaux et notamment des chevreaux ; ne manger qu’avec réserve de la viande de porc, du poisson salé, des fromages fermentés ; préparer sous forme de purée les haricots, fèves, pois, lentilles, etc. manger du pain rassis préférablement au pain frais ; ce dernier est indigeste, les œufs durs le sont également.

17.° On peut continuer l’usage du café mais il faut éviter le café au lait ; le lait seul ne doit être pris que par les personnes qui digèrent facilement.

18.° Hors des heures consacrées aux repas, il ne faut boire du vin, de la bière ou des liqueurs qu’en petite quantité et si l’on éprouve une soif réelle. Si l’on a une soif ardente il ne faut pas boire de l’eau pure mais la mélanger avec un peu de vin, de bière, vinaigre et eau-de-vie, ces deux dernières substances ne seront employées qu’à la dose d’une cuillerée par litre d’eau ; si l’on a chaud il faut s’abstenir de boissons froides.

19.° On connaît la bonne eau à sa qualité de dissoudre le savon sans le décomposer, elle doit être claire, d’une saveur douce et fraîche et bien cuire les légumes.

20.° L’habitude de boire à jeun de l’eau-de-vie ou du vin blanc est mauvaise, si on ne peut y renoncer : de suite, il faut, pour en corriger l’effet, manger un peu de pain.

21.° Un exercice modéré est nécessaire, chacun doit continuer ses travaux, mais éviter toute fatigue poussée à l’extrême et surtout les veilles prolongées.

22.° On doit profiter des dimanches et fêtes pour aller respirer l’air de la campagne et de préférence sur les lieux élevés.

23.° Enfin conserver le calme de l’esprit, et pour cela s’efforcer d’atteindre à la modération de ses passions, fuir  autant que possible toutes les causes d’émotions fortes, de perturbation morale, s’affranchir par conséquent de la peur de la maladie, et cela est facile en observant les règles de conduite ci-dessus prescrites. Leur influence salutaire a été constatée pendant toute [4.1]épidémie en général et particulièrement pendant celle du choléra partout où il s’est montré.

En résumé : Un air pur, la propreté du corps et des appartemens, la bonne qualité des alimens et des boissons, la sobriété, l’exercice régulier et modéré de la chaque jour, le calme de l’esprit, le soin d’éviter tous les excès physiques, sont les seuls moyens capables de préserver des atteintes du choléra ; il concourent aussi à les rendre moins violentes quand elles ont lieu.

La même commission a publié aussi une instruction sur l’emploi du chlorure de chaux sec, et liquide et du chlorure de soude ou liqueur de La barraque.

1.° On met une forte cuillerée à bouche de chlorure de chaux sec en poudre bien étendue sur une assiette, on en prépare ainsi plusieurs que l’on place dans les divers appartemens et auprès des habits et vêtemens de laines réunis dans un placard ou cabinet.

2.° On se sert du chlorure de chaux liquide pour arroser et désinfecter le plancher des appartemens, les latrines, cuisines, éviers, le sol des cours, les murs ; etc.

3.° Le chlorure de soude, sert au lavage des mains et du visage : pour celui des mains on met une cuillerée à soupe dans un verre d’eau ordinaire, pour celui du visage on ne met qu’une demi-cuillerée à café, et pour se rincer la bouche seulement quelques gouttes.

 

 

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