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UN NOUVEAU JOURNAL
[1.1]La presse populaire est devenue un besoin pour la classe ouvrière. Un seul journal ne saurait lui suffire. J’ai entendu les vœux de mes confrères, et je m’empresse de les satisfaire, si c’est possible. Je ne parlerai ni de mes antécédens ni de mes doctrines, les uns et les autres sont connus ; je n’ai jamais changé. La même pensée qui m’anima lorsque de concert avec quelques chefs d’atelier je fondai L’Echo de la Fabrique, m’anime encore aujourd’hui. J’ai perdu, il est vrai, deux collaborateurs qui m’ont puissamment secondé : j’aime à le reconnaître. La mort du premier a été un deuil public ; l’éloignement du second n’est dû qu’à sa fidélité à remplir des engagemens antérieurement contractés. Ainsi je me présente seul, homme du peuple plutôt qu’écrivain. Je traduirai naïvement les douleurs de l’atelier, et si la cause prolétaire n’a pas en moi un défenseur bien éloquent, elle en aura du moins un énergique et sincère. Cependant je déclare que je m’appliquerai à être toujours juste, tenant une balance égale entre les droits et les devoirs. Je suis loin de juger les fonctions que je remplis, et que je tiens du suffrage libre de mes camarades, comme incompatible avec la profession de journaliste ; seulement mon titre de prud’homme doit servir de garantie au pouvoir comme mon titre d’ouvrier doit en servir ailleurs. Je dois prémunir la fabrique contre la crainte d’une nouvelle scission. Les débats scandaleux de l’Echo de la Fabrique et de l’Echo des Travailleurs, de la Tribune Prolétaire et de l’Indicateur ne se renouvelleront pas, du moins je l’espère. Je marcherai de conserve avec l’autre journal l’Union des Travailleurs ; rien n’est changé à mes rapports d’amitié avec son gérant et son rédacteur en chef. Nous nous prêterons un mutuel appui. Réunis pour la défense des droits de la classe ouvrière, nous pourrons bien quelquefois être en désaccord sur les moyens, mais comme aucune passion haineuse ne viendra envenimer le débat, nous nous éclairerons mutuellement. D’ailleurs, nos principes fondamentaux sont les mêmes. J’aurais donc soin d’éloigner de la discussion toute espèce d’aigreur : cela me sera facile, car je n’ai pas oublié les services rendus à la classe ouvrière par M. Marius Chastaing, de même qu’il n’a pas oublié que c’est moi le premier qui l’ai mis à même de les rendre. Ainsi la bonne intelligence qui régnera entre les deux journaux sera pour tous deux un élément de succès, et pour la fabrique un avantage immense. Combien en effet a-t-on dépensé dans des discussions oiseuses et interminables de forces qu’il eut été plus convenable d’employer pour la défense des intérêts généraux. J’appelle avec confiance à me seconder soit par leur concours comme abonnés, soit par leurs conseils, soit enfin par leurs renseignements et leurs articles, tous mes confrères, d’abord ; et ensuite tous ceux qui s’intéressent à l’amélioration physique et morale des travailleurs. Falconnet, Rédacteur-Gérant.
PROJET DE LOI CONTRE LA PRESSE
[1.2]L’horrible attentat du 28 juillet1 dernier a été pour le ministère l’occasion d’un attentat non moins grave contre la liberté de la presse. Trois projets de loi ont été présentés à la chambre des députés. Le premier sur les crimes, délits et contraventions de la presse et des autres moyens de publication ; le second sur la rectification des art. 341, 345 et 347 du code d’instruction criminelle et de l’art. 20 du code pénal ; le troisième sur les cours d’assises.
La presse indépendante s’est réunie pour flétrir ces projets de loi qui ont été justement comparés aux ordonnances liberticides dont les ministres de Charles X subissent la peine on ne sait plus, en vérité pourquoi. On raconte même qu’un député fort bonhomme disait à M. Persil le lendemain de la présentation de ces lois : « Je viens de lire la loi de M. Peyronnet, je l’aime mieux que la votre, elle est plus claire. » Comme on le pense, M. Persil a du être embarrassé en recevant ce compliment. Nous n’examinerons dans le présent numéro que le projet de loi sur la presse. Nos réflexions seront courtes et précises.
Par l’article premier le délit d’offense envers la personne du roi, déjà prévu par la loi de 1819, est érigé en attentat à la sûreté de l’état. Le but est de soustraire la connaissance de ce délit au jury, et de l’attribuer à la cour des pairs ; mais dépend-il du législateur de changer la signification des mots, et par une qualification nouvelle d’échapper au texte de la charte2 qui exige l’intervention du jury dans toutes les affaires de presse. A ce crime nouveau une pénalité absurde est attachée : le délinquant sera puni de la détention et d’une amende de 10 à 50,000 fr. La détention est une peine infamante, elle est précédée de l’exposition publique et du carcan ; mais l’on aura beau faire, le pouvoir ne pourra jamais rendre infâme les écrivains qui auront le courage de se déclarer dissidens. Une amende de 10 à 50,000 fr. n’est pas l’indemnité due à la société par un membre coupable, mais bien une confiscation, quoiqu’on dise ; or la confiscation a été abolie par la charte.
L’art. 2 est un modèle de niaiserie. Il punit d’un emprisonnement de 6 mois à 5 ans, d’une amende de 500 à 10,000 fr. et de l’interdiction des droits civiques pendant toute la durée de la peine augmentée d'un temps égal quiconque aura tenté de tourner en dérision la personne ou l’autorité du roi. On a déjà assez fait remarquer qu’il y avait là une faute de langage assez grave : on ne tente pas de tourner en dérision, mais on tourne en dérision oui ou non. Plut à Dieu que l’on ne put accuser les ministres de ne pas savoir la grammaire.
Il est défendu par l’art. 3 de faire intervenir directement ou indirectement par voie d’allusion le nom du roi dans la discussion des actes du gouvernement. Cette contravention est punie d’un mois à un an de prison, de 500 à 5000 fr. d’amende. L’absurdité de cet article a choqué même le Journal des Débats3. Le [2.1]ministre qui a présenté la loi serait lui-même coupable, car dans l’exposé des motifs il a dit : nous venons au nom du roi, etc. Le Messager4 fait observer avec raison que si cet article était adopté, il en résulterait une mort civile morale contre le roi, puisqu’on ne pourrait plus parler de lui ni en bien ni en mal. Que dire d’ailleurs de ce crime d’allusion inventé par le gouvernement du 7 août, il ira rejoindre celui de tendance que la restauration avait trouvé. Toute attaque contre le principe ou la forme du gouvernement du roi, toute provocation directe ou indirecte à les changer est qualifiée dans l’art. 4 d’attentat à la sûreté de l’état, et celui qui s’en rendra coupable devra être puni de détention et d’une amende de 10 à 50,000 fr. Nous ferons la même observation que sur l’article premier ; mais nous ajouterons que pour être au moins juste, la loi devrait dire ce qu’elle entend par le principe du gouvernement. Est-ce la souveraineté du peuple, est-ce la légitimité ou la quasi-légitimité ? Louis-Philippe règne-t-il quoique bourbon, ainsi que le prétend M. Dupin, ou parce que il est de la race bourbonniène, ainisi que l’affirme M. Guizot. Le principe de la légitimité ne peut évidemment subsister en présence de la souveraineté du peuple, et si l’on nie ce dernier, comment s’entendre ? En effet, le principe de légitimité repose sur la tête du fils de Caroline, et il nous est bien permis en ce moment de l’attaquer ; mais si celui que ses partisans nomment Henri V venait à mourir, nous serait-il également permis de blasphémer contre la légitimité. Louis-Philippe prétendrait-il substituer à son titre de roi élu celui de roi légitime. Vraiment on s’y perd ; qu’est-ce qu’un principe qui peut changer d’un instant à un autre.
C’est toujours en quelque sorte de plus fort en plus fort ; viennent les art. 5 et 6 qui punissent toujours de peines énormes ceux qui feront publiquement acte d’adhésion à une autre forme de gouvernement en s’appelant républicains, légitimistes, etc., en attribuant des droits au trône à un autre qu’à Louis-Philippe ou à ses déscendans. Cela empêchera-t-il qu’il y ait des républicains, des légitimistes ? Certainement non. Seulement il faudra recommencer la comédie des quinze ans. En vérité, nous ne devons pas des conseil à nos ennemis, mais nous pouvons bien leur assurer que lorsque la démocratie ne s’appellera plus la république, elle sera bien plus redoutable. Il l’ont bien senti les écrivains du Réformateur lorsqu’ils ont imprimé : votre loi ne nous atteindra pas, nous ne nous occuperons que de doctrines sociales. Cet agent de change M. M… qui disait publiquement à la bourse depuis les projets de loi : ma charge vaut cent mille francs de moins, a senti comme le Réformateur la conséquence immédiate de cette prohibition nouvelle, et M. Garnier-Pagès l’a exprimé énergiquement dans l’un des bureaux de la chambre, en disant : « Vous nous empêcherez de nous dire républicains ; eh bien ! nous dirons que vous êtes riches et que nous sommes pauvres : que gagnerez-vous à ce nouveau mode de discussion ? » L’art. 7 montre toute la haine doctrinaire contre la presse : en cas de récidive contre la même personne ou le même journal dans le cours d’une année la peine devra être élevée jusqu’au quadruple, s’il sagit de la presse périodique, ainsi une amende de DEUX CENT MILLE FRANCS pourrait être prononcée. –En conscience, on ne peut discuter de pareils articles, c’est au Charivari, à Figaro et au Corsaire à en faire justice. Jusqu’à ce jour les corréligionnaires d’un journal s’étaient empressés de venir à son secours par des souscriptions, c’est à M. Broglie lui-même, que l’idée première en est due ainsi que cela résulte d’une lettre qui vient d’être publiée adressées par lui à M. Chevalier, éditeur de la bibliothèque historique condamné sous la restauration, pour prétendu délit de presse 5; l’article 8 interdit d’ouvrir ou d’annoncer publiquement des souscriptions. L’infraction à cette défense sera punie correctionnellement d’un emprisonnement d’un mois à un an, et d’une amende de 500 à 5000 francs. Encore une violation de la charte qui veut que les délits de la presse soient jugés par le jury. On appelle contravention ce [2.2]qu’on ne peut ériger en attentat, et sous ce prétexte on veut livrer les écrivains aux juges correctionnels. L’article 9, interdit sous les mêmes peines de publier, soit avant soit après les arrêts, les noms des jurés et de rendre compte de leurs délibérations intérieures. Nous serons justes : les journaux qui s’étaient permis de signaler les jurés qui avaient prononcé des verdicts de condamnation, avaient commis un grave abus et bien irrationnel. Nous pensons nous, qu’il est juste que chacun réponde de ses œuvres, et nous aurions désiré que les comptes rendus des audiences commençassent toujours par la composition de la cour et du jury, mais nous aurions voulu cela comme mesure générale de rédaction sans distinction de condamnation ou d’acquittement et sans injures ni menaces. Le titre 2, traite des gérans et dans les quatre articles dont il se compose le ridicule se joint à l’odieux. On veut astreindre le gérant à signer en minute chaque numéro du journal. Il a été reconnu que cela est impossible. Comment des ministres qui ont presque tous été journalistes ont ils pu proposer une mesure semblable ? Nous ne dirons rien de l’article 11, qui moyennant le remboursement des frais, astreint le gérant à insérer tous les renseignemens ou rectifications qui lui seront adressés par le gouvernement sur les faits insérés dans son journal ; seulement la pénalité est absurde, car elle n’est pas en proportion avec la contravention. L’article 12, mérite à lui seul une flétrissure éclatante. En cas de poursuites judiciaires, le gérant est tenu sous peine d’un mois à un an de prison et de 1000 à 5000 d’amende, de dénoncer l’auteur de l’article incriminé. Ici le projet de loi est pris en état flagrant d’immoralité ! Il faudra qu’un gérant se fasse délateur ? Oh ! Monsieur Persil ; c’est trop fort.
Si le ministère avait voulu une loi juste, et atteindre certainement les auteurs, il n’avait qu’à supprimer les gérans ou mieux les assimiler aux imprimeurs, et ordonner qu’à l’avenir tous les articles d’un journal seraient signés par leurs auteurs, et que le rédacteur en chef serait responsable des articles dont la contexture ne permet pas qu’ils soient signés, comme nouvelles etc. ! Toute la presse libérale aurait applaudi à cette disposition. Alors nous connaîtrions les écrivains des journaux ministériels, et ceux qui vivent de plagiat. On se souvient même que long-temps les écrivains patriotes ont eu l’usage de signer leurs articles. Ils y ont renoncé lorsqu’ils ont vu par l’exemple de la Tribune, qu’il n’enlevaient rien par cette conduite noble et franche à la responsabilité des gérans. Il y a plus ; une discussion s’est élevée à ce sujet, entre eux et les journaux ministériels. Ces derniers ont blâmé cette prétention, disaient-ils, de se montrer en spectacle. Ils ont soutenu qu’un écrivain ne devait pas parler en son nom, mais en celui du journal. Une polémique a eu lieu à Lyon même, entre le Précurseur et le Courrier. Il est donc souverainement injuste d’exiger des uns ce qu’on n’exige pas des autres ; la loi doit être une. Le gérant condamné ne pourra plus signer le journal pendant tout le temps de la durée de sa peine. Cela est monstrueux. Jamais on ne s’était ainsi joué de la propriété, jamais on n’avait osé porter d’aussi odieuses entraves à la liberté de la presse, pour qui et par qui a été faite la révolution de juillet, et cependant c’est par elle que sont arrivés au pouvoir, les Thiers, les Persil, etc. qui veulent aujourd’hui l’assassiner. Les titres 3 et 4, rétablissent la censure, l’un pour les dessins, caricatures, etc., l’autre pour les théâtre. La Charte avait dit que jamais la censure ne serait rétablie. Le titre 5 et dernier, de cet infâme projet de loi, traite de la poursuite et du jugement. Le ministère public ne sera plus astreint à passer par la filière de l’instruction judiciaires ; il pourra citer directement et ab irato, devant les cours d’assises. Le prévenu ne pourra plus faire défaut, la cour, sera maîtresse de lui accorder ou de lui refuser un délai, et si elle le refuse elle jugera sans assistance de jury, sans défense, et le jugement sera réputé contradictoire. Le pourvoi en cassation ne sera plus admis sur les arrêts incidens, on ne pourra se pourvoir contre eux qu’en même temps qu’on se [3.1]pourvoira contre l’arrêt sur le fond. Une cour d’assises extraordinaires sera formée par ordonnance motivée du président, si celle ordinaire est terminée et qu’il ne doive pas s’en ouvrir d’autre à une époque rapprochées. Nous avons oublié de dire que par la classification de certains délits de presse dans la série des attentats à la sûreté de l’état, le ministère aura le droit d’étendre aux journalistes les douceurs de l’arrestation préventive, moyen assez commode de désorganiser un journal, de ruiner une entreprise et de s’assurer l’exécution d’une condamnation judiciaire exhorbitante. Il paraît qu’on regrette de n’avoir pas arrêté préventivement M. Cabet ; à l’avenir si cette loi passe on ne se fera pas faute de s’assurer de la personne des écrivains. Nous avons encore omis de dire que par une prévoyance draconienne, le dernier paragraphe de l’article 7 du titre 1., dispose que les peines ne se cumuleront pas et seront toutes intégralement subies ; décidément la presse est mise hors la loi. On lui refuse ce qui est accordé sans difficulté aux voleurs, aux assassins. Elle est donc bien coupable. Ce ne serait pas au gouvernement qui est issu d’elle, à le dire.
AVIS SANITAIRE.
La Mairie de Lyon a fait afficher une instruction délibérée par la commission centrale de salubrité de l’arrondissement de Lyon, sur les moyens de se préserver du choléra-morbus. Nous croyons utile d’en soumettre l’analyse aux lecteurs. Les prescriptions qu’elle renferme sont utiles à suivre lors même, ce qui paraît probable, que ce fléau ne viendrait pas affliger notre cité. Améliorer les conditions physiques d’existence de la classe prolétaire, est encore selon nous, travailler d’une manière efficace à son émancipation ; car, nous l’avons dit et nous ne cesserons de le répéter sans crainte de paraître fastidieux : l’émancipation des classes ouvrières repose sur deux pivot, amélioration physique, amélioration morale ; le bien être physique doit être relatif au bien être intellectuel, si nous pouvons nous exprimer ainsi. A nos yeux le bien être physique comprend non seulement, une alimentation saine, c’est là la vie animale, mais plus encore des conditions de propreté et d’aisance dans le logement et l’habillement, de manière a effacer de plus en plus l’anomalie qui existe sous ces divers rapports entre la classe riche et la classe pauvre. Il faut selon nous, que par le langage, l’instruction, les manières, les habitudes, en un mot dans tout ce qui concerne la vie, il n’y ait plus que des hommes comme il faut. Voici le résumé des précautions que les savans médecins qui composent la commission centrale de salubrité prescrivent, et auxquelles nous adhérons complètement. 1.° Ecarter soigneusement toutes les causes qui pourraient altérer la pureté de l’air. Un vicié par la malpropreté est une cause active de développement et de progrès du choléra-morbus. 2.° Balayer exactement les appartemens, les débarrasser de toute espèce d’immondices même des hardes hors de servie, des meubles usés et inutiles, des linges sales ; etc.
3.° Gratter et frotter les carreaux des appartemens, et si on les lave, faire disparaître promptement l’humidité. 4.° Eviter de nourrir des animaux tels que les poules, pigeons, tourterelles, lapins, cochons d’Inde ; ne conserver les chiens et les chats qu’autant qu’ils seront d’une utilité réelle. 5.° Ne pas faire sécher le linge dans les appartemens. 6.° Ne pas laisser les fenêtre ouvertes pendant la nuit, mais renouveler l’air plusieurs fois dans le jour, en ouvrant les fenêtres et les portes, afin d’établir des courants. 7.° Tenir les latrines propres et exactement bouchées, nettoyer soigneusement tous les matin les vases de nuit, laver à grande eau les éviers, les plombs, les conduits des eaux ménagères et pluviales. [3.2]8.° Tenir les vitre propres et transparentes : la clarté du jour est utile à la santé. Faire passer une couche de lait de chaux sur les mus des chambres obscures qui n’ont pas été blanchies depuis long-temps. 9.° Eviter quand on a chaud de se placer dans des courants d’air ; éviter de s’exposer aux variations brusques de la température, ne pas se promener pendant les soirées fraîches et humides. 10.° Entretenir la chaleur aux pieds par une bonne chaussure et même des bas de laine. Si la température vient à s’abaisser, entretenir la chaleur au ventre par une camisole de flanelle ou une large ceinture d’étoffe de laine, laver tous les huit jours ces objets. 11.° Ne pas poser les pieds nus sur le sol en sortant du lit. Cet usage, dangereux dans tous les temps, pourrait devenir mortel quand le choléra existe. 12.° Tenir très propres les vêtements de drap et de laine, parcequ’ils s’imprègnent aisément de sueur et de poussière ; changer de linge au moins une fois par semaine. 13.° Laver les toiles de paillasse, en renouveler la paille, exposer à l’air pendant quelques heures chaque matin les matelats et même faire carder ceux qui ne le sont pas depuis plus d’un an, secouer fortement les couvertures, supprimer les rideaux des alcôves et des lits, afin de bien aérer les alcôves et les lits. 14.° Se laver tous les matins le visage et les mains avec de l’eau tiède ou du moins qui ne soit pas tout récemment sortie du puits, se laver au moins deux fois par semaine les pieds et les jambes avec de l’eau tiède légèrement savonnées. 15.° Observer pour sa nourriture une grande tempérance, éviter cependant d’arriver trop brusquement à la réforme de son régime habituel, mais le faire progressivement. 16.° Ne point faire de repas copieux surtout manger peu au souper ; boire pendant les repas du vin avec de l’eau. Les vins acides tournés, la bière trop fermentée sont nuisibles, l’eau pure est préférable : manger peu de salade, s’abstenir de fruits dont la maturité n’est pas complète, s’abstenir de la viande des animaux trop jeunes telle que des veaux, agneaux et notamment des chevreaux ; ne manger qu’avec réserve de la viande de porc, du poisson salé, des fromages fermentés ; préparer sous forme de purée les haricots, fèves, pois, lentilles, etc. manger du pain rassis préférablement au pain frais ; ce dernier est indigeste, les œufs durs le sont également. 17.° On peut continuer l’usage du café mais il faut éviter le café au lait ; le lait seul ne doit être pris que par les personnes qui digèrent facilement. 18.° Hors des heures consacrées aux repas, il ne faut boire du vin, de la bière ou des liqueurs qu’en petite quantité et si l’on éprouve une soif réelle. Si l’on a une soif ardente il ne faut pas boire de l’eau pure mais la mélanger avec un peu de vin, de bière, vinaigre et eau-de-vie, ces deux dernières substances ne seront employées qu’à la dose d’une cuillerée par litre d’eau ; si l’on a chaud il faut s’abstenir de boissons froides. 19.° On connaît la bonne eau à sa qualité de dissoudre le savon sans le décomposer, elle doit être claire, d’une saveur douce et fraîche et bien cuire les légumes. 20.° L’habitude de boire à jeun de l’eau-de-vie ou du vin blanc est mauvaise, si on ne peut y renoncer : de suite, il faut, pour en corriger l’effet, manger un peu de pain. 21.° Un exercice modéré est nécessaire, chacun doit continuer ses travaux, mais éviter toute fatigue poussée à l’extrême et surtout les veilles prolongées. 22.° On doit profiter des dimanches et fêtes pour aller respirer l’air de la campagne et de préférence sur les lieux élevés. 23.° Enfin conserver le calme de l’esprit, et pour cela s’efforcer d’atteindre à la modération de ses passions, fuir autant que possible toutes les causes d’émotions fortes, de perturbation morale, s’affranchir par conséquent de la peur de la maladie, et cela est facile en observant les règles de conduite ci-dessus prescrites. Leur influence salutaire a été constatée pendant toute [4.1]épidémie en général et particulièrement pendant celle du choléra partout où il s’est montré. En résumé : Un air pur, la propreté du corps et des appartemens, la bonne qualité des alimens et des boissons, la sobriété, l’exercice régulier et modéré de la chaque jour, le calme de l’esprit, le soin d’éviter tous les excès physiques, sont les seuls moyens capables de préserver des atteintes du choléra ; il concourent aussi à les rendre moins violentes quand elles ont lieu. La même commission a publié aussi une instruction sur l’emploi du chlorure de chaux sec, et liquide et du chlorure de soude ou liqueur de La barraque. 1.° On met une forte cuillerée à bouche de chlorure de chaux sec en poudre bien étendue sur une assiette, on en prépare ainsi plusieurs que l’on place dans les divers appartemens et auprès des habits et vêtemens de laines réunis dans un placard ou cabinet. 2.° On se sert du chlorure de chaux liquide pour arroser et désinfecter le plancher des appartemens, les latrines, cuisines, éviers, le sol des cours, les murs ; etc. 3.° Le chlorure de soude, sert au lavage des mains et du visage : pour celui des mains on met une cuillerée à soupe dans un verre d’eau ordinaire, pour celui du visage on ne met qu’une demi-cuillerée à café, et pour se rincer la bouche seulement quelques gouttes.
CONSEIL DES PRUD'HOMMES
6 AOUT. –M. Riboud, président. –Membres : MM. Blanc, Bret, Chantre, Cochet, Falconnet, Gaillard, Joly, Milleron, Roussy, Ville, Warin. V° Dechaud c. Gauthier et Cuchet. Question à juger Le conseil est-il compétent pour juger les difficultés qui s’élèvent relativement à une convention faite entre un négociant et une brodeuse, par laquelle cette dernière s’est engagée à garder à un certain prix des mouchoirs à elle remis pour être brodés, dans le cas où elle ne les rendrait pas à l’époque fixée ? –Non. 13 AOUT. –M. Riboud, président. –Membres : MM. Arragon, Charnier, Chasselet, Dufour, Mathevon, Pellin, Perret, Putinier, Teissier, Verat, Warin. M. Charnier, de retour à Paris , a prêté serment. André
c. Drevet (D.lle). La D.lle Drevet était entrée comme ouvrière chez le sieur Drevet. Ce dernier s’étant aperçu qu’elle ne savait pas travailler, ne voulut la garder que comme apprentie, et une convention verbale pour un an eu lieu à ce sujet. Trois moi sont écoulés et la D.lle Drevet, s’est perfectionnée, nie aujourd’hui la convention. Le conseil s’en est rapporté en chef d’atelier : la D.lle Drevet finira son apprentissage. Bruyset c. D.lle Perraud. Le sieur Bruyset avait fait une avance de 172 fr. à la D.lle Perraud qui travaillait chez lui comme maîtresse. Il lui en faisait la demande devant le conseil des prud’hommes ; le conseil s’est déclaré incompétent, et a renvoyé à huitaine pour aviser à ce qu’il doit faire relativement la D.lle Perraud qui a deux livrets, l’un d’ouvrière et l’autre de maîtresse, ce qui n’est pas tolérable. Frédéric c. Durand-Rion. Il s’agit d’une question grave de montage de métiers par suite de l’importation en France d’un nouveau genre d’étoffes, spéculation abandonnée ensuite par les négocians et dont la perte frapperait le chef d’atelier. Frédéric avait conclu à ce qu’il lui fut permis de se faire assister d’un défenseur. Le conseil a renvoyé la cause devant MM. Falconnet et Joly, sans permettre aucune explication à Frédéric. –Nous ne pensons pas cependant que ce soit pour esquiver la question de la libre défense soulevée par Frédéric. Cela nous paraîtrait étonnant après ce qui a été dit dans la Tribune Prolétaire sur ce sujet1 sans aucun désaveu de la part du conseil2. Lamure (femme) c. dame Pavy. La dame Pavy retient une pesée de soie attendu que la femme lui doit 20 fr. Le conseil a ordonné l’apport de la soie au greffe, et condamné la femme Lamure à payer de suite, et faute par la dévideuse de se conformer à cette décision, elle sera passible d’une indemnité pour les journées perdues. [4.2]Rascalon c. Potantier. Question à juger. Est-il dû une huitaine aux ouvriers teinturiers par leurs maîtres et réciproquement ? –Non.
Le Moniteur du Commerce, journal ministériel, contient dans son n° du 12 de ce mois, un long extrait d’un mémoire présenté à la cour des pairs par M. Rivière cadet dans lequel ce prévenu d’avril contumace déclare qu’il n’appartient plus au parti républicain depuis environ un an avant les événemens d’avril 1834 qu’il a abandonné les associations et les principes de ce parti, aussitôt qu’il a connu et apprécié la doctrine de Fourrier la seule qu’il ait eu en vue de propager en écrivant dans l’Echo de la Fabrique1.
COUR D’ASSISES DU RHONES.
Les assises du 3e trimestre de 1835, s’ouvriront jeudi prochain sous la présidence de M. Dangeville, assisté par MM. Durand et Josserand, conseillers.
COUR DES PAIRS.
La Cour des Pairs se réunit tous les jours pour délibérer sur les accusés d’avril. –Elle poursuit aussi avec activité l’instruction de l’attentat du 28 juillet dernier.
CHAMBRE DES DÉPUTÉS.
C’est le 4 août qu’ont été présentés les projets de loi dont nous avons parlé dans le présent numéro. –La veille la chambre s’était réunie pour nommer une députation à l’effet d’assister à la cérémonie funèbre en l’honneur des victimes de l’attentat Fieschi. Nous avons remarqué avec étonnement que, cinq ans après la révolution de juillet, M. Dupin ait invité ses collègues à reprendre le costume qu’elle a aboli. En effet, pourquoi l’abolir alors, ou pourquoi le reprendre aujourd’hui. –Des commissions ont été nommées pour l’examen de ces divers projets de loi ; elles sont toutes ministérielles. 11 août. –M. Thiers a demandé un crédit de 500,000 francs pour les fêtes funèbres dont s’agit, et diverses pensions pour les familles des victimes.
FAITS HISTORIQUES
– M. Offray , prévenu d’avril, de la catégorie Lyon, a été arrêté à Paris. – Le nom de l’assassin du roi est enfin connu ; ce n’est pas Gérard qu’il s’appelle mais Fieschi. – L’attentat de Fieschi a été le signal d’odieuses persécutions contre la presse, nous ne les mentionnerons pas toutes, mais seulement deux. On a eu l’audace d’arrêter M. Armand Carrel ; il a été remis en liberté. –Moins prudent que lui, M. Raspail a été retenu pour injures envers M. Zangiacomi ,1 lorsqu’on a vu qu’il était impossible de le retenir comme complice de l’attentat. – M. Carnot (Jean-François-Claude), Conseiller à la cour de cassation, frère du célèbre et vertueux Carnot, est mort le 31 juillet dernier . Il était né à Nolay, (Côte d’Or), le 22 mai 1752. – La Catalogne fermente en ce moment. Une insurrection républicaine a eu lieu à Barcelone, et menace d’envahir toute cette province. Le général Bassa a été assassiné. – Une émeute violente vient d’avoir lieu à Berlin, capitale de la Prusse, le jour de la fête du roi. Nous attendons des nouvelles plus précises.
On annonce que MM. Beaune, Martin, Albert, Hugon, Reverchon, Lafont et Desvoys ont été condamnés à la déportation ; les autres, condamnés de 1 à 13 ans de détention. Girard, Poulard (Antoine),
Corréa,
Cochet,
Marcadier,
Bertholat,
Ravachol et Margot sont mis en liberté. –Le Procureur général a déposé son réquisitoire contre les contumaces, Sylvain Court, Rivière cadet, etc.
MONT-DE-PIÉTÉ
La vente des effets mobiliers, engagés pendant le mois de juillet 1834, c’est-à-dire, du n°44818 au n°52689 commencera mardi 25 du courant à 4 heures du soir, dans la salle ordinaire de vente, rue de l’Archevêché.
Falconnet, rédacteur-gérant. – On demande un bon ouvrier pour Gilets lancé, sur 400 à Cors, s’adresser au bureau du journal.
Impr. de Mlle Perret, rue St-Dominique, n.13.
Notes (PROJET DE LOI CONTRE LA PRESSE)
Le 28 juillet 1835, le républicain corse, Giuseppe Fieschi, fait exploser une bombe au passage du cortège royal, en vue d’assassiner le roi Louis-Philippe 1er. Louis-Philippe n’est que légèrement blessé, mais on compte 18 morts, dont le grand chancelier de la Légion d'honneur, le Maréchal Adolphe Edouard Casimir Joseph Mortier. Cet attentat annonce la loi de septembre 1835, que Thiers va faire voter, et qui réprimera les délits de presse ainsi que tout ce qui peut être assimilé à de la propagande anticonstitutionnelle. Il s’agit, comme évoqué pour les précédents numéros, de la Charte de 1830, qui abolissait la censure en donnant à tous français « le droit de publier et de faire imprimer ses opinions en se conformant aux lois ». Le journal des Débats en effet, était réputé pour être plus prompt à exprimer les idées politiques des ultras que celles des libéraux. Il s’agit du journal Le Messager des Chambres (1830 - 1852). Il y’a sans doute ici une légère erreur : s’il s’agit bien de Michel Chevalier, il avait été condamné à un an de prison, non pas sous la Restauration, mais sous la Monarchie de Juillet, en 1832, lorsque la doctrine Saint-Simonienne fut déclarée « contraire à l’ordre publique ». Voir L’Echo de la Fabrique, n°22 de l’année 1833. En effet, éditeur du Globe, il fut condamné, comme il est dit ici, pour « délit de presse », c’est à dire pour avoir publié dans Le Globe, des articles du Père Enfantin, mais aussi pour son « association illicite » (art. 291 du Code pénal) au Saint-Simonisme.
Notes (CONSEIL DES PRUD'HOMMES)
Voir en effet, le n°26 (1835) de la Tribune Prolétaire . : « N’ayant reçu aucun désaveu de notre article inséré dans le dernier numéro, par lequel nous avons annoncé le triomphe de la libre défense, résultat de la permission donnée à M. Versel, de présenter la défense de M. Gentelet, nous sommes fondés à croire que le conseil des prud’hommes s’est rendu à l’évidence et consent à interpréter, comme tout le monde, l’art. 29 du décret du 11 juin 1809, qui n’impose aux justiciables du conseil d’autre obligation que celle de paraître en personne. »
Notes (Le Moniteur du Commerce , journal ministériel,...)
Notes (FAITS HISTORIQUES)
Joseph Zangiacomi (1766-1846) : président de la chambre des requêtes de la cour de Cassation; depuis 1831, et pair depuis le 11 octobre 1832.
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