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8 avril 1832 - Numéro 24
 
 

 



 
 
    
CONSEIL DES PRUD’HOMMES.

[7.2]Séance du avril.

(présidée par m. guérin.)

La séance est ouverte à 6 heures et demie. Les causes qui ont offert quelqu’intérêt, sont les suivantes :

Le sieur Marion, fabricant de tulles bobins, a fait, il il y a trois mois, une signification à son contre-maître, par laquelle il le met hors de chez lui, n’étant pas content de sa gestion. L’affaire avait été portée au tribunal de commerce, qui a renvoyé les parties pardevant le conseil. Le contre-maître explique au conseil que, par les conventions qu’il a faites avec le sieur Marion, il a encore deux ans à rester chez lui, et qu’un défrayement doit lui être alloué ; il y a trois mois qu’il a été forcé de sortir de l’atelier, et depuis lors il est resté sans place.

Le conseil, après avoir entendu le rapport de la section des tulles, déclare qu’il n’y a pas lieu à casser les conventions ; et que dans le cas ou le sieur Marion ne voudra pas recevoir son contre-maître, il sera tenu de lui payer, à titre d’indemnité, la somme de 800 fr., sans y comprendre la somme qui lui revient du bénéfice des apprentis de l’atelier.

Le sieur Ponson expose au conseil que venant de fabriquer sept pièces de gros de Naples au sieur Grillet, il se trouve en solde de 80 gr., sur une pièce levée avec le rouleau et le remisse, que cette pièce n’a pas été pesée, et que le poids a été marqué au gré du négociant. Le sieur Ponson réclame en outre des tirelles sur les sept pièces. Le sieur Grillet répond qu’il a agi de confiance avec cet ouvrier, que c’est lui qui a été chercher la pièce et les ustensiles chez la personne qui ne pouvait plus continuer, et que le poids de cette pièce a été marqué, déduction faite d’une aune qui avait été fabriquée, que pour les tirelles, il a reçu des peignes qui avaient chacun une petite tirelle en coton, et qu’il ne peut par conséquent les recevoir et les payer ; il montre au conseil les tirelles et les peignes.

Le sieur Ponson réplique que les peignes et les prétendues tirelles ne sont que quelques coups de coton pour tenir les fils, et ne pèsent ensemble que dix gr.

Le conseil déclare qu’il est d’usage, lorsqu’un ouvrier se charge d’une pièce levée, que les comptes soient respectivement balancés, que les tirelles sont dues de droit au chef d’atelier, et qu’il est d’usage d’accorder 15 gr., chaque pièce pour cet effet.

Le négociant demande que son livre soit examiné et que l’on fasse sur les tirelles qu’il doit accorder, déduction de celles en coton qu’il a reçuesi. Le conseil accorde et nomme M. Bouillon pour examiner les livres.

Le sieur Ponson réclame en outre des tirelles sur les sept pièces.

Le sieur Gagnieu réclame aux sieurs Velay et Pascal, sur un velours uni, le prix de 5 fr. par aune qui lui avait été précédemment payé. La dernière coupe qu’il vient de terminer étant plus large que les précédentes, devrait, par conséquent être plutôt augmentée que diminuée. Le sieur Vélay vient, contre son attente, de porter au prix de 4 fr. 50 c. cette dernière coupe. Le négociant répond que cette coupe a été longue à se fabriquer, qu’elle n’est pas de bonne fabrication, et prétend même faire lever le reste de sa toile, 30 aunes environ.

Le conseil, attendu qu’il n’y a pas eu de prix marqué à cette pièce, déclare qu’elle doit être portée au même prix que la précédente, que le négociant ne peut pas faire [8.1]lever sa toile sans le consentement de l’ouvrier, ou lui donner un défrayement. Le sieur Gagnieu consent à laisser lever sa toile. Les parties sont ainsi conciliées.

L’affaire de la dame Cuissard, avec son propriétaire, le sieur Robert, de laquelle nous avons rendu compte dans notre numéro précédent, est appelée de nouveau.

La dame Cuissard réclame un défrayement de la somme de 530 fr., soit pour ses harnais qui ont été brisés, soit pour le temps qu’elle a perdu, soit enfin pour les dépenses qu’elle a faites ayant été obligée de déménager, par suite de l’écroulement du plancher.

Le sieur Robert réplique à cette demande, par des dénégations insignifiantes, et offre de donner pour défrayement à la dame Cuissard, une année de sa location.

Cette proposition est rejetée par la dame Cuissard.

Attendu que les membres nommés par le conseil pour arbitres ont déclaré avoir vu et vérifié les dégâts produits par la chute du plancher, lesquels ont été évalués tant pour les ustensiles de fabrique, que pour les dommages et intérêt du temps perdu, à la somme de 265 f., le conseil condamne le sieur Robert à payer cette somme à la dame Cuissard, sans toutefois y comprendre les réclamations portées devant la justice de paix, pour les objets mobiliers que les membres du conseil n’ont pu expertiser, ni les droits du sieur Drevet, déjà reconnus par le sieur Robert.

Le sieur Escot réclame au sieur Gorgeon un défrayement de la somme de 200 fr. pour avoir gardé et nourri son fils en qualité d’apprenti, pendant l’espace de neuf mois. Le père de l’apprenti répond que n’ayant pas encore passé d’engagemens avec le sieur Escot qui plusieurs fois lui avait dit que son fils ne faisait pas de progrès dans l’état, il avait cru devoir le retirer, sans pour cela se croire tenu à une indemnité envers le sieur Escot, puisque son fils lui avait servi de domestique.

Attendu que les ouvriers ne prennent pas les jeunes gens pour domestiques, mais pour apprentis, le conseil condamne le sieur Gorgeon à payer au sieur Escot la somme de 50 fr. par jour montant à 130 fr.

 

 

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