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15 avril 1832 - Numéro 25
 
 

 



 
 
    
NOUVEAU CONSEIL DES PRUD’HOMMES1

Le nouveau conseil des prud’hommes, tel qu’il va être organisé, sera mieux en harmonie avec les besoins de l’industrie manufacturière, et nous avouons que c’est un grand pas fait dans la carrière des améliorations. Bien des gens, et nous ne sommes pas de leur opinion, disent qu’on n’a rien gagné, et que le peuple à beau réclamer, les gouvernans sont toujours sourds à sa voix. Pourtant voici venir une amélioration qui, selon nous, fera époque dans la fabrique d’étoffes de soie, et ceux qui voient avec indifférence la nouvelle composition du conseil des prud’hommes, ne comprennent pas leurs intérêts.

Nous dirons à ceux pour qui cette amélioration ne semble qu’un palliatif : De quoi vous plaignez-vous ? pourquoi réclamez-vous sans cesse contre les abus ? vous n’allez, dites-vous, jamais pardevant les prud’hommes ; ainsi, peu vous importe que le conseil soit bien ou mal composé ? Mais si par faiblesse ou par insouciance vous adhérez à tout ce que veut votre fabricant ; si vous préférez perdre et votre travail et vos frais de harnais, plutôt que de le traduire à la barre du conseil, croyez-vous que le conseil ne vous soit pas encore utile ? n’est-il pas là comme une digue puissante ou viennent se briser les efforts de l’égoïsme ? croyez-vous que sans lui, tel qui n’ose point vous accabler, parce qu’il craint ce tribunal, aurait tant de ménagement ? Le conseil des prud’hommes est comme la loi écrite ; il effraie et retient celui qui aurait la pensée de forfaire.

Pour nous qui sentons toute l’importance de cette amélioration, nous nous reposons sur le nouveau conseil pour détruire tous les abus qui entravent la marche de l’industrie. C’est de sa nouvelle jurisprudence que doit jaillir une source de prospérité pour nos manufactures, et partant pour notre cité. Les hommes qui sont appelés à en faire partie, doivent être pénétrés de la haute mission qu’ils auront à remplir et de la grandeur de leurs devoirs. Ouvriers et fabricans, c’est à eux de s’entendre afin d’établir une jurisprudence sur des bases larges et solides ; que les petites haines, l’amour-propre et l’intérêt n’aient point d’accès auprès d’eux ; c’est de leur bonne harmonie que peut résulter et la vraie justice et la répression des abus.

Les prud’hommes, bien unis et faisant tous une abnégation sincère du passé, réuniront à leurs voix deux classes séparées trop long-temps en deux camps ; deux classes enfin qui ne peuvent exister l’une sans l’autre. Leurs paroles de paix et de concorde porteront l’union et la prospérité dans notre ville manufacturière, et feront oublier ces déplorables collisions dont le souvenir déchire l’ame de tout vertueux citoyen.

Telle est la haute mission que les nouveaux prud’hommes auront à remplir. Elle sera grande, sublime ! et ceux qui seront appelés par les suffrages de leurs concitoyens à ce poste, que nous croyons pouvoir appeler poste d’honneur, doivent y apporter tout le zèle et tout le désintéressement dont est susceptible l’homme de bien.

Pénétrés à notre tour de notre mission, nous rendrons toujours compte des séances du conseil, et notre tâche sera facile à remplir ; car nous croyons n’avoir dorénavant que des louanges à lui adresser sur son impartialité [3.2]et sur ses lumières. S’il n’en était pas ainsi, et si nous étions trompés dans nos prévisions, notre Feuille, consacrée aux intérêts industriels, aurait assez de courage pour rappeler des juges à leur devoir, et livrer au public les noms de ceux dont la conduite serait peu généreuse. Mais nous pensons que le choix que feront les électeurs, nous épargnera les réflexions pénibles et les tristes effets d’une censure méritée.

Notes (NOUVEAU CONSEIL DES PRUD’HOMMES)
1 L’auteur de ce texte est Joachim Falconnet d’après la Table de L’Echo de la Fabrique (numéros parus du 30 octobre 1831 au 30 décembre 1832).

 

 

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