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20 mai 1832 - Numéro 30
 
 

 



 
 
    

Notre impartialité nous fait un devoir d’insérer la lettre suivante, laissant toutefois aux chefs d’ateliers le soin de réfléchir sur la véracité des faits.

AU RÉDACTEUR.

Monsieur,

Nous vous prions d’insérer dans votre prochain N° la lettre que nous vous adressons, en réponse à la déclaration dirigée contre nous, et aux réflexions qu’elle vous a suggérées dans votre N° de dimanche dernier.

On vous a dit que nous ne payions que 60 c. le mille les schalls indiens, pendant que MM. Chaninel et Monet, St-Olive et Germain, le payent 85 c.

Mais vous a-t-on fait connaître en même temps que nous avions des dessins payés jusqu’à 1 f. le millei ? ce qui aurait suffi pour vous démontrer que sous la même dénomination sont compris plusieurs genres, qui paraissent au premier aperçu plus payés les uns que les autres et qui, au résultat, ne sont ni plus ni moins avantageux.

Nous allons vous faire toucher au doigt la preuve de ce que nous avançons :

Chez le sieur Cusinii, qui a monté successivement jusqu’à sept métiers pour nousiii, il y en a qui sont payés, les uns à raison de 60, les autres à raison de 70 à 75 c. le mille ; et, qui plus est, le même dessin exactement est payé 60 c. sur un de ses métiers, et 70 c. sur un autre : et, à la fin de la semaine, chaque métier a rendu à peu près autant, et pour mieux démontrer que cette différence de prix n’est souvent qu’illusoire, et que les dessins payés 1 fr. le mille, sont quelquefois ceux dont les ouvriers se soucient le moins, le sieur Arnaudiv, qui a 3 métiers pour nous à 60 c., nous a offert à plusieurs reprises, notamment la semaine dernière, son 4e métier, dont la façon lui est payée à raison d’un franc le mille par une autre maison.

En définitive, si ces différences donnent quelquefois lieu à des réclamations de la part des ouvriers qui ne s’en rendent pas assez compte, les chefs d’ateliers, qui comprennent mieux leurs intérêts, savent que ce ne sont souvent que des leurres dont leur expérience leur a appris à se méfierv.

En toute chose il faut considérer la fin.

[5.1]Voici une preuve de cette vérité, nous espérons qu’elle sera concluante.

Le premier atelier que nous avons occupé pour cet article que nous ne traitons que depuis environ un an, est celui du sieur Colonel vi, il se compose de 6 métiers, sur lesquels, dans l’intervalle de 1,724vii journées de travail pour les 6 métiers réunis, il s’est fait pour 11,285 fr. de façon, soitfr. 55 c. par jour sur chaque métierviii.

Pour nous venger de la dénonciation que vous avez accueillie un peu légèrement, nous ne voudrions qu’une chose, ce serait de pouvoir donner de l’ouvrage, payé de la sorte, à tous ceux qui viennent nous en demander.

Nous terminons, Monsieur, en disant que pendant les neuf ans d’existence que compte notre maison, si nous avons eu quelquefois l’occasion de rendre service à des ouvriers, nous n’avons jamais eu la crainte de nous entendre faire par aucun d’eux le reproche que vous vous êtes cru autorisé à nous adresser, d’avoir profité de leur état de gêne pour les faire travailler à rien, et d’avoir spéculé sur leur misère.

Nous ne craignons pas d’avancer que tous nos chefs d’ateliers protesteraient, au besoin, contre une si injurieuse inculpation.

Nous avons l’honneur, etc.

Cinier et Fatin.

 

 

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