|
9 septembre 1832 - Numéro 46 |
|
|
|
|
LYON. A NOS CONCITOYENS.
[1.1]La même pensée qui présida à l’association des ouvriers en soie donna naissance à l’Écho de la fabrique. Le premier N° de ce journal parut le 30 octobre 1831, il contenait le tarif accordé, cinq jours auparavant, aux besoins de cette classe de travailleurs. M. Falconnet, fondateur gérant s’adjoignit M. Vidal. Environ un mois après les événements de novembre, M. Marius Chastaing prit une part active à la rédaction : l’Echo qui dans l’origine n’avait été créé que pour être l’organe des ouvriers en soie agrandit son cadre ; à son titre de Journal Industriel il ajouta celui de Journal Littéraire : M. Falconnet appelé par ses collègues au conseil des prud’hommes, se démit de la gérance pour éviter toute idée de cumul ou de dépendance, et fut remplacé le 13 mai suivant par M. Vidal ; ce dernier atteint d’une maladie grave, a cessé de pouvoir s’occuper de la rédaction depuis le huit juillet dernier. Ayant malheureusement succombé, le cinq août, nous avons pris la gérance provisoire et le journal n’a souffert aucune interruption. Cet ordre de choses avait besoin d’être régularisé. L’assemblée des actionnaires qui a eu lieu le 3 septembre courant a confirmé notre nomination, comme gérant. M. Chastaing a été nommé rédacteur en chef, MM. Falconnet, Bouvery, Amédée Roussillac, Eugène Dufaitelle, Benoît et d’autres personnes nous ont promis leur collaboration. La rédaction de l’Echo continuera par conséquent d’être la même, en ce qui touche les doctrines. Nous chercherons seulement a y donner le plus de variété et d’utilité possible, et pour y parvenir nous faisons un appel à tous les hommes philanthropes qui s’occupent des questions graves d’économie politique et sociale. Nous en faisons un aussi à tous les littérateurs, aux jurisconsultes, aux médecins, aux artistes ; nos colonnes leur seront toujours ouvertes. Le peuple a soif d’instruction, on ne saurait trop multiplier les canaux qui doivent la répandre. Jeunes hommes, dont l’avenir garde encore le secret de la puissance, venez à nous car nous sympathisons ensemble. [1.2]Nous ne pensons pas avoir besoin de faire à nos concitoyens une profession de foi. Nos principes, nos opinions sont connus, nous saurons les défendre, de quel côté que vienne l’attaque ; nous ne faillirons pas à la mission qui nous est confiée, nous mettrons au contraire tous nos efforts à en être dignes. Nous regardons en effet la profession de journaliste comme une fonction publique. Nous pourrions nous arrêter ici, mais quelques explications sont encore nécessaires, nous allons les fournir. Un journal ne peut être utile, qu’autant qu’il est répandu : il ne peut se répandre, qu’autant qu’il répond à des intérêts divers, qu’autant qu’il sait joindre l’utile à l’agréable. Ainsi nous ne croyons pas devoir être exclusifs, et cela dans l’intérêt même des ouvriers en soie que nous représenterons toujours spécialement. Quoique cette classe soit la plus nombreuse à Lyon, elle n’est pas la seule ; nous voulons appeler les autres au succès de notre entreprise, nous voulons les inviter à en partager le bienfait. Nous serons le journal de la Caste prolétairei, toute entière ; à nous donc, artisans de toutes professions, industriels de toutes les classes ; ouvriers travailleurs de toute la France. Que l’Echo de la Fabrique, soit pour vous un centre de réunion, un point d’appui et de ralliement ; qu’il vous serve de tribune toujours ouverte pour votre défense, si vous êtes attaqués ; qu’il vous serve aussi de tribune, pour attaquer à votre tour, les préjugés, les abus, les monopoles, les privilèges qui de toute part vous étreignent et vous privent de vos droits. La presse est aujourd’ui une puissance supérieure à toutes les forces physiques, nous vous offrons son égide tutélaire. De cette manière, se formera l’association universelle des travailleurs, association qui leur donnera le pouvoir de résister avec avantage, à l’égoisme, à la cupidité, à la tyrannie des oisifs. Par là commencera cette sainte alliance des peuples, que Béranger [2.1]a chanté dans une de ses odes sublimes, et que nous entrevoyons dans un avenir peu éloigné. Voilà, citoyens, notre programme, nous pouvons vous assurer que ce programme ne sera jamais oublié par nous. Berger, gérant.
i Le mot de prolétaire dans son acception primitive, ne saurait-être pris qu’en mauvaise part. Le Précurseur pour éviter la difficulté, crut devoir dans un article ingénieux, soutenir que c’est à tort qu’on le donne aux hommes du peuple, qu’il convient plutôt aux hommes oisifs. Nous pensons qu’on peut continuer à le donner au travailleurs, en transportant son acception du physique au moral. Ainsi, selon nous, le travailleur est un prolétaire, car c’est lui qui produit ce que d’autres consomment. Nous avons donc raison de prendre ce titre et nous le portons sans rougir.
M. ODILON-BARROT A LYON.
M. Barrot est arrivé le mardi 28 août dernier, dans un strict incognito qu’un excès de prudence a sans doute commandé. Le jeudi suivant a eu lieu à la Rotonde de Perrache, un banquet patriotique où près de 600 convives se sont réunis, et qui s’est passé dans le plus grand ordre. Le samedi, 1er septembre, M. Barrot a porté la parole dans les trois procès du Précurseur relatifs aux journées des 5 et 6 juin, et a confirmé sa réputation d’orateur habile. On sait que ses efforts ont été couronnés du succès, et que M. Petetin a été acquitté sur ces trois procès comme il l’avait été la veille sur celui relatif à un article du 30 mai dernier, de l’Ordre légal, en suite d’une plaidoirie brillante de M. Alph. Gilardin, par laquelle il s’est placé au premier rang des avocats du barreau de Lyon. Mardi 4 septembre, MM. les prud’hommes chefs d’ateliers, notre gérant et les rédacteurs du journal, se sont rendus à son hôtel pour lui présenter un exemplaire de l’Echo de la Fabrique et l’adresse qu’on va lire que nous présumons être l’expression de l’immense majorité de la classe ouvrière. Monsieur Odilon-Barrot s’est entretenu long-tems avec eux, sur les diverses causes de dissidence qui existent entre les marchands-fabricans et les ouvriers, sur les événemens de novembre et sur diverses questions qui se rattachent à l’industrie lyonnaise. Nous avons lieu de croire que notre fabrique gagnerait beaucoup au patronage de M. Odilon, en qui nous avons cru apercevoir l’ame et les facultés d’un homme d’Etat. M. Odilon-Barrot est parti le même soir pour Paris. adresse a m. Odilon-Barrot. « Monsieur, Les soussignés s’empressent de saluer le représentant du peuple dont la voix puissante a fait triompher deux fois dans le sanctuaire de la justice, la cause sainte de la liberté. Si Paris vous doit le retour aux lois dont il avait été violemment privé, Lyon vous doit la liberté de la presse ; car, vous le savez, la cause du Precurseur n’était pas celle d’un homme ni d’un journal, mais celle de la presse provinciale tout entière. Ne vous étonnez donc pas, monsieur, si nous vous adressons les hommages publics qu’un usage servile attribuait exclusivement aux rois et aux princes ; le bon sens du peuple les a transporté aux grands citoyens qui, comme vous, sont ses défenseurs. Vous êtes du nombre de ces hommes, et l’un des premiers en qui la patrie espère, si jamais des jours mauvais, trop faciles à prévoir, venaient assombrir l’horizon de notre belle France, vous sauriez alors, dédaignant de vaines clameurs, être à la hauteur des circonstances, et du haut de la tribune nationale régénérée, demander sans crainte à la France son dernier homme, son dernier écu, plutôt que de souffrir l’infamie et l’horreur d’une troisième invasion. Permettez-nous de mettre sous votre patronage l’Echo de la Fabrique qui, né dans des circonstances graves, n’a point été infidèle à son caractère avoué. Ce journal se distingue des autres par une mission spéciale. Laissant à ses confrères le soin de s’occuper des intérêts et quelquefois [2.2]des passions de l’homme politique, il ne s’occupe que des intérêts et des besoins de l’homme social. Il a vu la société divisée en deux classes de citoyens riches et pauvres, il a cru devoir être l’organe des derniers. Les prud’hommes chefs d’ateliers que vous voyez devant vous, sont les mandataires vrais et légaux de la population ouvrière de cette ville ; car ils doivent leur mandat à l’élection. Ils se plaignent seulement que cette élection n’ait pas été établie sur une base plus large, et qu’au lieu d’être octroyée par ordonnance, elle n’ait pas été consentie législativement ; ils vous prient, dès-à-prèsent, d’appuyer, par votre influence parlementaire et par votre éloquence, la pétition qu’ils se proposent d’adresser à ce sujet à la chambre des députés. Vous allez nous quitter, nos vœux vous suivront ainsi que nos espérances, soyez-en convaincu. Oserons-nous vous prier de dire à l’illustre Lafayette, votre collègue et ami, combien son souvenir nous est cher. Sa mémoire est gravée dans le cœur des Lyonnais.
Distribution des prix aux élèves de l’Ecole de St-Pierre et de l’Institution de la Martinière. Cette cérémonie a eu lieu mardi dernier, 4 septembre, à 2 heures. Elle a été ouverte par un discours de M. Gasparin, préfet, dont nous extrayons les passages suivans : « Il y a peu de mois un des plus célèbres économistes de l’Angleterre, M. Bowring, visitant notre ville, nous disait : Nous pouvons lutter contre la fabrication unie de Lyon, il ne faut pour cela que de l’adresse, et nos ouvriers n’en manquent pas, mais nous ne parviendrons jamais à l’égaler dans le façonné ; il faut ici du goût, et nous succombons dans la lutte. Ce sont vos artistes qui vous assurent le monopole des façonnés, et nous ne pouvons vous opposer que des ouvriers. Lyon placé au débouché des Alpes, à la porte de l’Italie, au point culminant de cette vallée qui va finir au milieu des souvenirs de la Grèce et de l’antiquité ; Lyon fait partie de ce bassin où l’inspiration des arts semble être un don de la nature. Prenez-en la confiance, messieurs, de cette enceinte doivent sortir de nouvelles réputations qui deviendront européennes, et grâces aux efforts de ses enfans, Lyon, si long-temps célèbre par son industrie et son commerce, est aussi appelé à prendre place dans le monde comme un centre de lumières et de goût. Déjà les travaux de vos magistrats préparent cette nouvelle ère de prospérité et de renommée. Déjà plusieurs écoles s’organisent pour répandre le bienfait de l’instruction dans toutes les classes. Déjà des asiles vont préparer les jeunes intelligences aux bienfaits de l’éducation ; les écoles primaires se multiplient et se perfectionnent ; les écoles normales leur préparent des instituteurs ; la Martinière deviendra le centre des études techniques ; une faculté de médecine demandée par le conseil général, ne tardera pas à recevoir la sanction du gouvernement. Les autres facultés des sciences vous seront rendues ; l’école vétérinaire, long-temps isolée, entrera désormais comme partie intégrante de ce haut enseignement ; une école d’artillerie accroîtra dans vos murs le nombre des hommes éclairés, amis des sciences ; et vous, messieurs, vous couronnerez l’édifice en jetant sur l’austère sévérité de ces études les fleurs des beaux-arts, et le charme de la vie d’artiste. Dévouons-nous tous avec ardeur à assurer ce bel avenir de la ville de Lyon. » [3.1]Nous donnerions avec plaisir le programme des prix décernés si l’espace ne nous manquait. Nous nous permettrons une observation relativement à ceux donnés aux jeunes élèves de la Martinière. Indépendamment de la médaille les premiers prix des classes de chimie et d’arithmétique ont été accompagnés d’une inscription de la caisse d’épargnes de 100 fr. ; et au deuxième prix de la classe de chimie a aussi été jointe une inscription de cette même caisse de 60 fr. Nous ne doutons pas que cela n’ait eu lieu dans un but philanthropique, mais nous croyons qu’il n’est pas convenable de familiariser l’idée de jeunes hommes avec le calcul d’une récompense pécuniaire ; la gloire doit payer la gloire. La somme donnée n’est pas suffisante pour assurer un bien-être physique, elle ne peut produire au moral qu’un résultat fâcheux. Nous soumettons cette observation à l’autorité, la priant de la prendre en considération dans l’intérêt des mœurs et des beaux-arts, que notre siècle ne soit pas flétri du sobriquet de siècle d’argent ou des banquiers. Dans cette solennité toute pacifique, nous avons été étonnés de trouver un luxe militaire auquel les Bourbons eux-mêmes ne nous avaient pas habitués ; il n’y a cependant rien de si beau que le peuple faisant lui-même la police, et se passant de gendarmes, comme il arrive aux fêtes vraiment populaires. D’un autre côté, le désordre le plus complet a régné. Beaucoup de personnes n’ont pu trouver place ; d’autres, notamment un général qui n’était pas dans l’exercice de ses fonctions, n’ont dû qu’à la faveur d’en trouver une. Parmi les personnes qui se plaignaient, nous avons reconnu trois prud’hommes, qui, porteurs de lettres nominatives, et appelés par la nature de leurs fonctions à juger les progrès des élèves, soit de l’école de St-Pierre, relativement à la mise en carte, soit de l’institution de la Martinière, auraient dû trouver une place convenable, dont-ils ont été cependant privés par l’insouciance ou pour mieux dire la brutalité du concierge qui, ce nous semble, n’a pas rempli son devoir en cette occasion.
Sur un article du Nouvelliste1. Le Nouvelliste, journal ministériel, dans un article, en date du 19 août dernier, cherche un remède au malaise qui tourmente les masses ; il prétend que pour diminuer le nombre de bras qu’emploie l’industrie, il faut défricher les landes et les communaux qui couvrent un cinquième de la superficie du sol, et par ce moyen employer à ces défrichemens l’excédent des populations industrielles qui surabondent dans les villes manufacturières ; que, d’un autre côté, pour augmenter les salaires et en même temps livrer les produits manufacturés à bas prix à la consommation, il faut employer beaucoup de machines, et ne demander à l’homme que son intelligence en la payant cher. Je vais tâcher d’examiner si ces deux propositions résoudraient le problème ; mais je prie que l’on ne m’accuse pas de mauvaises intentions, si dans ce que je vais dire il se trouve quelque chose qui peut paraître hasardé. Mon unique intention, en disant les choses telles que je les vois, est de provoquer, de la part d’hommes plus habiles que moi, des explications propres à éclairer mon ignorance et rectifier mon jugement. Je ne suis ni un ambitieux, ni un homme de désordre ; mais je crois que l’on n’a pas fait jusqu’à présent tout ce que l’on pouvait faire pour améliorer le sort des classes inférieures de la société, et c’est à chercher les moyens d’établir l’équilibre entre les diverses classes du peuple, sans troubles et sans bouleversemens, que [3.2]j’applique mes faibles efforts ; si comme il n’y a pas de doute, la tâche est au-dessus de mes forces, j’espère que mes camarades les prolétaires me sauront gré de l’avoir essayée, et c’est toute la récompense que j’ambitionne. Oui, je suis de cet avis, le mal n’est pas dans l’énormité des impôts, dans le prix élevé des subsistances, des locations et de toutes les nécessités de la vie. Toutes ces choses étaient mauvaises lorsque la société était établie sur d’autres principes que ceux qui dominent aujourd’hui ; mais maintenant qu’il s’agit d’élever un nouvel édifice social, elles doivent entrer comme élémens dans sa construction. D’un autre côté, croit-on détruire le mal en défrichant les landes et les communaux ? non, car c’est bien un moyen, mais ça n’en est qu’un, et le mal a pénétré trop profondément dans les entrailles du corps social, pour céder à l’emploi de ce seul moyen : d’ailleurs, il n’existe pas seulement dans le défaut de travail, mais il est encore autre-part ; en rejetant dans les campagnes le trop plein de nos populations industrielles, l’on s’expose à deux inconvéniens plus funestes peut-être que ceux qu’on veut éviter. D’abord l’on appauvrira les cités et l’on fermera les débouchés intérieurs de cette industrie que l’on voudrait rendra si florissante à l’aide des machines ; ensuite l’on infectera les campagnes de ces vices, et de ces besoins des villes qui jusqu’à présent n’y ont que lentement pénétré, et, par ce moyen, en étendant la contagion l’on rendra la catastrophe plus inévitable, plus certaine, plus rapprochée et plus terrible. Quant à l’argument, tiré de l’emploi des machines pour produire à bon marché, je croirais que c’est une mauvaise plaisanterie, si je ne voyais cette assertion reproduite partout et sous toutes les formes. Je dois donc penser que c’est ma perspicacité qui est en défaut ; et dès-lors, je prierai les partisans de ce système de m’expliquer comment ils soutiendront une population immense dont tous les moyens d’existence consistent dans le travail, lorsqu’elle sera repoussée des ateliers qui n’emploieront que des machines, de sorte que dans telle manufacture qui autrefois donnait de l’occupation à mille ouvriers, et qui, en favorisant la consommation, faisait vivre dix mille individus ; maintenant qu’elle n’emploiera que des machines, elle n’aura plus de salaires à donner qu’à cinq ou six intelligences suffisantes pour mener toute l’affaire, et qu’elle payera cher, je le veux bien, mais moins cependant qu’elles ne valent, grâce à l’égoïsme. Qu’on me dise ce que l’on fera de ces mille ouvriers jetés incontinent sur le pavé et sans ressources : on leur dira de prendre patience ; et si la faim qui, de sa nature, n’est pas patiente, et qui de plus n’a pas d’oreilles, les pousse à crier un peu haut et à se mutiner, oh ! alors il -y a cet argument irrésistible qu’on appelle ultima ratio regum. Soit… cependant étaient-ils bien coupables, et était-ce là tout ce qu’on pouvait faire pour eux ? D’après ce que je viens de dire, il me semble démontré que les moyens que l’on propose pour obvier aux dangers que peut faire craindre l’état de misère et de souffrances dans lequel sont plongées les classes infimes de la société, s’écartent d’autant plus du but, que l’on n’a pas saisi la véritable cause du mal, et qu’après avoir régénérés l’état social dans sa partie politique, il reste encore à le régénérer aussi dans la partie qui touche au bien-être des hommes. Il me reste à indiquer, et la cause du mal, et les moyens propres à le guérir, et ce sera l’objet d’un prochain article. Bouvery.
[4.1]Le Progressif de l’Aube contient un article remarquable : Du peuple et de la nécessité d’améliorer sa condition. Il s’agit bien vraiment, dit-il, d’étroits intérêts de localité, de l’existence de tel ou tel trône, c’est du bien-être matériel qu’il nous faut, c’est le développement libre de toutes les intelligences, qui importe… Que font au peuple les querelles des princes, les susceptibilités de cabinet, ces prétendues questions d’état, ces protocoles du Foreing-Office ? c’est du pain, du travail qu’il lui faut… Oui, c’est du peuple qu’il fout s’occuper ; car, en résumé, toutes les institutions sociales doivent avoir pour but son bien-être. On sait bien s’adresser à lui quand il faut de l’argent ; mais quand il faut penser à améliorer son sort, on recule devant les difficultés qu’on regarde comme insurmontable… A l’œuvre donc, profonds politiques… ministres, etc…
PROCÈS FAIT AUX SA1NT-SIMONIENS. (Suite, voyez n° 45) Audience du 27 août. MM. Barthélemy-Prosper Enfantin, âgé de 36 ans, ancien élève de l’Ecole polytechnique ; Michel Chevalier, âgé de 28 ans, ancien élève de la même école, ex-ingénieur des mines et directeur du Globe ; Emile Barrault, âgé de 33 ans, ex-professeur à Sorrèze et à Paris ; Charles Duveyrier, âgé de 29 ans, avocat et rédacteur du Globe, en costume saint-simonieni, et M. Olinde Rodrigues, s’asseyent au banc des prévenus. Les autres membres de l’association dite la famille de Ménilmontant les suiventii . Un débat s’élève sur l’audition des témoins, que le président soutient ne devoir être entendus que sur la moralité des accusés ; des conclusions sont prises, et la cour consent à entendre les témoins ; mais ceux-ci refusant de prêter serment sans le consentement du père Enfantin, la cour refuse avec raison une semblable prestation de serment. M. Delapalme soutient l’accusation ; divers membres de la famille saint-simonienne y répondent. Le père Enfantin devait se faire défendre par deux femmes ; mais le président lui l’ayant refusé, il s’en plaint publiquement à l’audience, et la cause est renvoyée au lendemain. Ainsi se terminent les conciles, s’écrie M. Barrault. Audience du 28 août. M. Enfantin se lève avec gravité, et cherche ce que, suivant ses dogmes, il appelle une inspiration par le regard. M. le président et l’avocat-général ne concevant rien à ces formes oratoires, paraissent s’en fâcher et l’audience est suspendue. Reprise un quart d’heure après, M. Enfantin présente enfin sa défense. Après quoi le jury ayant déclaré les accusés coupables, la cour condamne Enfantin, Duveyrier et Chevalier à un an de prison et 100 f. [4.2]d’amende chacun ; Rodrigues et Emile Barrault à 50 fr. d’amende ; ordonne la dissolution de la société saint-simonienne, et condamne les prévenus aux frais solidairement. L’arrêt sera affiché au nombre de 100 exemplaires. Les condamnés se sont pourvus en cassation.
i Ce costume se compose d’une redingote bleue sans collet, dont les revers très-dégagés laissent apercevoir une tunique blanche bordée d’un ruban ponceau moiré. Une ceinture de cuir attachée par une boucle de cuivre, est serrée autour des reins. M. Enfantin porte sur sa poitrine ces mots brodés en rouge : Le père. Sa tête est belle ; sa longue barbe noire, ses cheveux flottans sur ses épaules nues, fixent les regards. Michel Chevalier est remarquable par la régularité de ses traits et la vivacité de ses regards. ii Charles Lambert, Léon Simon, Bruneau, Hoart, Gustave d’Eichtal, Adolphe Rigaud, Moïse Retouret, Antoine Olivier, Charles Duguet, Massol, Joseph Machereau, Félix Tourneux, Ribés, Paul Juttus, Jules Toche, Charles Penneserre, Victor Mercier, Dominique Lajan-Rogé, Auguste Chevalier, Félicien David, Casimir Cayol, Louis Desessarts, Raymond Bonheure, Victor Bertrand, Thomas Orbum, Desloges, Jean-Terson, Paul Rochette, Réné Rousseau, Pouyat, Alexis Petit, Henri Fournel et René Holstein.
Défense devant le Conseil des Prud’hommes. Nous avions promis de ne plus revenir sur ce sujet, que nous croyons épuisé, convaincus que si le droit d’assistance devant le conseil des prud’hommes, continuait d’être refusé ou entravé par le président, ce n’était plus qu’un acte de despotisme brutal, auquel il était du devoir de tout bon citoyen, de résister par toutes voies possibles, même par celle de la prise à partie ; nous espérions d’ailleurs, que M. le Préfet, qui a promis de s’en occuper ferait bientôt cesser ce conflit scandaleux, entre ces messieurs et la presque totalité de leurs concitoyens ; mais nous avons cru devoir pour dessiller les yeux des plus aveugles, recueillir le témoignage d’un homme qui, avant d’être connu comme représentant du peuple, était célèbre comme avocat. MM. les prud’hommes chefs d’atelier, qui ne laissent échapper aucune occasion, d’être utiles à la classe qu’ils représentent, se sont chargés de cette mission ; ils nous communiquent la lettre suivante qu’ils viennent de recevoir de M. Odilon-Barrot. « Le droit de se faire assister, est de droit commun ; il ne se trouve dans le décret du 11 juin 1809, que deux conditions auxquelles l’individu cité soit assujeti ; d’abord, de se rendre en personne, ensuite, et dans certain cas, de se faire représenter, soit par un fondé de pouvoirs, soit par un parent. Ces deux conditions une fois remplies, on a satisfait au décret. On ne saurait en aucun cas, suppléer une disposition prohibitoire, surtout quand on doit par là diminuer les priviléges de la défense à laquelle la loi accorde toujours une si grande faveur. » Lyon, le 4 septembre, 1832. Agréez, etc. Signé, Odilon-Barrot.
Fabrique de rubans de st-etienne. La fabrication des rubans emploie annuellement à St-Etienne et à St-Chamond : Environ 400,000 kilog. de soie à 50 fr. le kilog. : 20,000,000 25,000 kilog. coton à 6 fr. le kilog. : 150,000 Total : 20,150,000 Les soies brutes sont apprêtées dans des fabriques appelées moulins à soie, mis en mouvement par des cours d’eau et des machines à vapeur. On les convertit en trame, en organsin, et surtout en marabous, espèce de tors nécessaire pour les rubans gaze. Il y a 120 moulins dans l’arrondissement ; ils occupent 2,000 ouvriers, et donnent lieu à une valeur nouvelle de : 1,500,000 La teinture vient ensuite : A 4 fr., prix moyen, les 425,000 kil. coûtent 1,700,000 Le tissage des rubans s’exécute sur : 5,000 métiers à la Jacquard, depuis 1 jusqu’à 12 pièces. 5,000 métiers à la zurichoise, depuis 8 jusqu’à 36 pièces. 20,000 métiers à la basse-lisse à une pièce. 500 métiers à la haute-lisse à une pièce. Ainsi, en total, 30,500 métiers qui occupent environ 20,000 ouvriers. Les métiers à la Jacquard seuls sont constamment occupés, la majeure partie des autres habituellement en chômage. [5.1]La valeur moyenne du tissage peut être estimée 4 fr. par kilogr. : c’est donc : 17,000,000 Les frais accessoires et généraux sont de1 fr. par kilogr. : 4,500,000 Total des matières premières, et mains-d’œuvre pour rubans : 44,850,000 La fabrication des lacets de soie, coton et fil, emploie en matières premières les quantités suivantes : 1° En soie 15,000 kilog. à 40 fr. : 600,000 2° En coton 35,000 kilog. à 6 fr. : 210,000 3° En fil 10,000 kilog. à 10 fr : 100.000 Laine, fil d’or et d’argent, approximativement : 50,000 Total : 960,000 Les frais de fabrication s’élèvent à : 1,040,000 Total : 2,000,000 Il existe 3,000 métiers depuis 8 jusqu’à 60 fuseaux pour chaque. Ils sont mus par des roues hydrauliques ou des machines à vapeur : 200 ouvrières y sont occupées. En résumé, la valeur totale des produits de la fabrication des rubans, lacets, velours, etc., dans l’arrondissement de St-Etienne, s’élève à 46,850,000. Le Vulcain, n° 12 (19 août 1832.)
Avis aux Industriels.1 Le vingt-unième volume contenant les descriptions des machines et des procédés consignés dans les brevets d’invention, de perfectionnement et d’importation, dont la durée est expirée, ainsi que ceux dont la déchéance a été prononcée ; (ouvrage publié par les ordres de M. le ministre du commerce et des traveaux publics) ; vient d’être déposé au secrétariat de la Préfecture, où il sera communiqué à toutes les personnes qui désireront en prendre connaissance. Nous croyons devoir mentionner les inventions suivantes qui ont rapport à l’industrie de notre cité, savoir ; cantre à plusieurs faces, propre à ourdir la soie, inventée par le sieur Théron : avec cette Cantre, l’ouvrière placée à côté de son ourdissoir, peut sans se déranger, opérer tous les changemens des dispositions des soies, et prendre à volonté les couleurs dont elle a besoin. Cette machine peut se faire plus ou moins longue, et de plus ou moins de roquets. Métier-mécanique, en fonte et en fer, propre au tissage de toute espèce d’étoffes de soie, laine, coton et fil. Ce métier a été importé des Etats-Unis, et perfectionné par M. Dugueyt, négociant, à Lyon. Machine epeutisseuse, destinée à dégager les tissus de toute espèce de nœuds et autres aspérités qui se trouvent sur leur surface par MM. Paturle et Lupin. Mexico-Français, étoffe destinée à fabriquer des chapeaux ; ce tissu, battu et lassé est composé d’un mélange raisonné de poils de dromadaire, de chameau, de lièvre et de vigogne, et apprêté de manière à soutenir la comparaison avec le feutre par sa solidité, son imperméabilité et sa durée. Le fil qui compose la chaîne, peut être indistinctement, en chanvre, lin, soie, et poil, inventé par Vincard, artiste de Paris. Velours caroline, par MM. Hébert-Tavernier, Père, fils et Ce, négociants à Amiens. Ce velours tout soie est sans envers, et ne se coupe pas sur le métier ; mais lorsque la pièce est fabriquée, ou la place bien tendue sur une table creuse, où à l’aide d’un instrument tranchant très-fin, et se terminant en pointe, en opère la coupe, [5.2]Pompe à balancier hydraulique et à vapeur, applicable à divers usages par M. Gensoul. Voiture-mécanique à trois roues. Le mécanisme de cette voiture peut être applicable, comme moteur, à toute espèce d’usines et machines, par Chalmas ainé, et Barret, de Lyon.
Ecole théorique et pratique d’horlogerie mécanique à Mâcon. Cet utile établissement que nous nous empressons de signaler, compte déjà trois années d’existence. L’enseignement théorique comprend la grammaire française, l’algèbre, la géométrie élémentaire, descriptive et analytique, la trigonométrie, la statique, la chimie, la physique, le dessin linéaire et l’architecture. L’enseignement pratique comprend l’horlogerie dite de commerce, celle de haute précision, l’horlogerie marine, celle de châteaux et d’églises, la mécanique, la ciselure et tout ce qui se rattache à cet art. Les demandes d’admission d’élèves ne seront reçues que jusqu’au 15 octobre prochain, et l’entrée des élèves n’aura lieu que jusqu’au 1er novembre : passé cette époque, ils seront renvoyés au 1er avril suivant.
CONSEIL DES PRUD’HOMMES.
Séance du 6 septembre, (présidée par M. Putinier.) L’audience de ce jour a été remarquable par la demande en indemnité du sieur Coq, fabricant de schals, contre le sieur Frassier, maître-ouvrier. Cette affaire qui a déjà paru aux deux petites audiences des 26 août et 1er septembre dernier, présente une particularité nouvelle. Le sieur Coq dit avoir fait lire un dessein qui lui coûte une forte somme, et destiné à continuer le métier du sieur Frassier ; il expose que ce dernier lui avait promis de faire les changemens nécessaires à son métier, et même de le remonter entièrement, que déjà même il était allé s’entendre à cet effet avec le sieur Jaillet, liseur ; que de plus il avait fait prendre par son laceur des cartons chez ce dernier. Cependant quelques jours après son fils s’étant transporté dans l’atelier du sieur Frassier, il lui fut répondu qu’on ne s’occupait pas de son métier, que le sieur Coq, n’ayant pas réglé les comptes, comme ils en étaient convenus, ils ne devait plus compter sur lui ; le sieur Coq se livre, comme aux deux précédentes audiences, à un discours véhément, et des démentis sont échangés ; il cherche à faire concevoir le tort que peuvent faire à la fabrique lyonnaise et principalement aux fabricans, les ouvriers, si, lorsque on leur a promis de leur donner de l’ouvrage, et que l’on s’est occupé de le leur préprarer, ils le refusent ensuite sous divers prétextes. Le sieur Frassier répond qu’il avait d’abord réellement promis au sieur Coq de lui continuer son métier, qu’à cet effet, il était allé chez le liseur afin de s’entendre avec lui, mais que lorsqu’il avait fait cette promesse le sieur Coq lui avait également promis de balancer les comptes de matières ; attendu qu’il se trouvait en solde par le fait dudit sieur Coq qui ne lui a porté le déchet qu’à 25 gr. par kilog. au lieu de 30 gr. suivant l’usage, qu’au sur-plus, il avait averti le sieur Coq que ne tenant pas ses promesses à son égard, et s’écartant des régles et usages, il ne voulait plus avoir à démêler [6.1]avec lui et qu’il ne devait plus compter sur son métier. Il dit encore qu’après l’avoir averti il fut de suite dire à son laçeur de s’arrêter, et que depuis le 17 août que son compte avait été réglé, il ne s’était plus occupé du métier ; que le 21, lorsque le fils du sieur Coq était allé chez lui, il en fut étonné autant que de sa réclamation en indemnité, puisqu’au fait, il a droit de lui réclamer la différence des déchetsi. Les membres du conseil passent dans la salle des délibérations, où, après une demi-heure de discussion, M. le président renvoie de nouveau l’affaire pardevant quatre membres, MM. Favier, Perret, Verra et Gamot, en les chargeant de s’enquérir de la vérité. M. le président fait observer à M. Coq, que les déchets doivent être portés selon l’usageii. La dame Méruès, qui a été prise deux fois en contravention, réclame contre la validité desdites contraventions disant que l’une n’a pas été réclamée par l’ouvrier, et que les éprouvettes sur lesquelles ont été essayés ses flottes, n’étaient pas justes, et qu’au surplus, elle en avait averti l’ouvrier ; elle demande également à être déchargée des frais, alléguant l’absence de son mari, ainsi que le remboursement des frais du port de son métier, prétendant que le sieur Avias doit en être chargé. La dame Méruès s’exprime ensuite avec une vivacité et une véhémence tellement inconvenante, que M. le président s’est vu plusieurs fois dans la nécessité de la rappeler à l’ordre. Le conseil après avoir entendu les membres qui ont constaté la contravention, confirme son précédent jugement, qui condamne la dame Méruès à payer la somme de 70 fr. pour supplément de façons, plus les frais ; la déboute en outre de sa demande en remboursement du port du métier, attendu qu’elle n’avait pas prévenu le sieur Avias.
i Le précédent conseil avait fixé les déchets pour les matières bourre-de-soie et laine à 45 gr. par kilog. Le nouveau conseil n’a encore rien statué sur cette matière, par conséquent, les anciennes décisions du conseil, doivent être encore en vigueur et faire loi. ii Ce qui est étonnant, dans celle affaire, d’ailleurs si simple, mais qui, au fait, ne nous surprend pas, c’est qu’après avoir paru à deux audiences, elle n’ait pu se terminer aujourd’hui, malgré l’audition du témoin, le sieur Jaillet, qui a déclaré que c’est bien le 10 que le sieur Frassier s’est transporté chez lui pour prendre connaissance dé l’état du dessin, par conséquent, quelques jours avant que le sieur Coq n’eût définitivement réglé le compte de l’ouvrier et que ce dernier n’eût refusé son ouvrage. Nous avons remarqué que le fils du sieur Coq était également présent à l’audience, où il assistait son père, et que ses dépositions ont été en contradiction avec les assertions avancées par son père aux précédentes audiences. Nous croyons qu’il eût été plus simple de débouter le sieur Coq de ses prétentions insolites.
NOTE SUR LA FABRIQUE DE LYON. 1
Depuis quelques jours, notre commerce et notre industrie semblent se ralentir. L’on ne saurait, dans l’état [6.2]de paix et de tranquillité où nous nous trouvons, en connaître la cause. L’article popeline a seul pris un peu d’activité ; plusieurs négocians en font fabriquer au prix de 50 cent, l’aune, c’est-à-dire avec une augmentation de 5 cent. Les étoffes pour gilets, les velours coupés et frisés et les peluches pour chapeaux, sont toujours demandés, et la vente de ces articles paraît devoir se soutenir encore long-temps ; mais il n’en est pas de même de quelques articles dont les commandes paraissent achevées plutôt qu’on n’avait lieu de l’espérer.
VARIETÉS.
Diminution de numéraire. M. Jacob auteur d’une histoire des métaux précieux, prétend que le numéraire diminue chaque jour ; selon lui, à la fin de 1809, il existait en Europe et en Amérique, 9,500,000,000 francs d’argent monnayé, et à la fin de 1829, un 6me de moins. Depuis 1810 les mines d’or et d’argent n’ont rendu que la moitié de leurs produits habituels, tandis que la quantité d’or et d’argent employée en bijoux et ornemens précieux, à plus que vingtruplé. Revue de Paris, t. 41. N° 4. p. 259. Association polytechnique. Les anciens élèves de l’école polytechnique ont formé une association sous ce nom, dont le siége est à Paris, rue St-Thomas-du-Louvre, n° 39, et dont on a le droit d’attendre de grands résultats. Son but est de rapprocher les anciens élèves, de leur fournir les moyens de s’entr’aider et de répandre parmi les classes laborieuses les premiers élémens des sciences positives ; à cet effet, des cours gratuits s’organisent en ce moment dans les divers quartiers de la capitale. Procédé pour percer le fer et l’acier, sans le secours d’aucun outil. Il faut amener la barre de fer ou d’acier qu’on veut couper ou percer, à un état complet d’incandescence et la disposer en sortant du feu, de manière à ce qu’elle n’éprouve pas un refroidissement trop prompt. A cet effet, on le pose sur un cerceau de fer de 2 pouces environ de haut, qui est aussi chauffé et qu’on tient placé près du foyer de la forge. Pour percer ou couper, on se sert d’un bâton de souffre, de la forme dont on à besoin, c’est-à-dire, moulé en baguettes cylindrique, ellyptique, carrée, en forme de losange ou de treffle, etc., comme on voudra. On observera un phénomène curieux. C’est la production d’une gerbe de feu extrêmement belle, qui s’élève à la hauteur de 8 à 10 pouces chaque fois qu’on applique la baguette de souffre sur le fer incandescent. Cette découverte est due à un colonel d’artillerie, et a été constatée par M. Wartemann, de Genève. Le Vulcain, n° 12, 19 aout 1832.
NOUVELLES DIVERSES.
D’après la gazette de Stutgard on aurait la presque certitude de voir les associations de commerce hesso-prussienne, bavaro-wurtembergeoise se réunir bientôt en une seule. Cette réunion aurait pour effet d’exclure de l’Allemagne les industries anglaises et françaises ; elle aurait encore le but politique de rompre les relations des Allemands avec deux peuples constitutionnels. A Dijon, par un arrêté de la mairie, du 1er septembre, [7.1]le pain de toute qualité vient d’être diminué de trois centimes par kilogrammes. En revanche, à Lyon, le pain a été également, depuis le 1er de ce mois, augmenté de deux centimes 1/2 par livre. Ceci nous paraît, à la suite d’une récolte abondante, d’une contradiction telle que nous ne pouvons l’expliquer. Nous invitons les personnes qui en connaissent les causes à vouloir bien les signaler, dans l’intérêt de notre population.
Respect aux loups, caresse aux singes, mépris aux agneaux, c’est la devise des gens du monde ; une autre classe de ces mêmes hommes a pour devise : indifférence à tous. Soyez la vérité, soyez le mensonge, soyez le vice ou la vertu, au fond peu leur importe pourvu qu’arrivé d’hier vous ne paraissiez qu’aujourd’hui, et repartiez demain. Servan. Il est des hommes dont l’existence, semblable à l’Océan pacifique, n’a jamais été agitée par aucune tempête. Les passions sont pour eux ces plages lointaines dont on n’entend parler que par les relations des voyageurs dont plusieurs y ont péri. Gottliab Werner. La vie est une fable contée par un imbécile avec un grand fracas de mots et de gestes emphatiques. Shakespeare. Relève la bête de somme de ton ennemi si elle est tombée en chemin. Phocylide2. Lorsque le peuple souffre de la faim, il ne s’en prend ni à la rigoureuse saison, ni aux élémens, ni à aucune cause naturelle, il tourne ses regards vers ceux qui gouvernent, et conclut, non sans quelque raison, que, puisqu’ils ne savent pas le nourrir, ils ne sont pas non plus dignes de le gouverner. Montjoie3. Pour avoir la conscience de sa propre inhabilité, il faut encore une certaine portion de lumières. Idem. Nés pour souffrir, nous sommes puissamment armés contre les peines déchirantes du cœur. Mme Genlis4. La vertu se suffit à elle-même ; les talens ont besoin d’éclat et de louanges. Idem. L’infortune est saine à déjeûner, indifférente à diner, mortelle à souper. Pror-Ecossais Tout homme sans propriété et sans emploi dans une société (la société actuelle), n’a que trois partis à prendre : de s’expatrier et d’aller chercher fortune ailleurs, ou de voler pour subvenir à sa subsistance, ou d’inventer quelque commodité ou parure nouvelle en échange de laquelle ses concitoyens fournissent à ses besoins. Helvétius5. Il y a oppression contre le corps social, lorsqu’un seul de ses membres est opprimé : il y a oppression contre chaque membre, lorsque le corps social est opprimé. Consti. de 1793. L’homme est usé dans la société comme les pièces d’argent qui, à force de circuler, perdent leur empreinte. Diderot6. Vis bien et meurs de bout en face du soleil. Le sage boit, s’enivre avec un bon ami. Aime à vivre surtout, seulement pour bien vivre. En mai couvre de fleurs la borne de ton champ. Trois jours, suspends ta hache avant d’abattre un arbre. Donne un nom de famille à l’arbre que tu plantes. Plante un arbre en famille au milieu d’une fête, Abrite-toi, jeune homme à l’ombre d’un homme sage. Que ton petit manoir ait un large foyer ; Au souvenir des morts consacre quelques nuits. Qu’un gazon offre un siége à côté de ta porte ; Observe les bonnes lois d’un heureux voisinage. [7.2]Ne retiens pas captifs les oiseaux voyageurs. Ne fais point égorger tes poulets par ta fille ; N’égorge point l’agneau sous l’œil de tes enfans ; Ne vend point au boucher ta vache nourricière. Sylvain Maréchal7. (Vers blancs faits le jour de sa mort.) Née de l’engoûment ou de la haine, repoussant tout ce qui peut l’éclairer, saisissant avec avidité tout ce qui la flatte, la prévention absout ou condamne sans examen et sans pudeur. Anonyme. Où les monarques sont des dieux, le sage craint de cesser d’être homme. J.-J. Leutiette8 Avoir beaucoup d’esprit et peu de jugement, c’est, avec le superflu, manquer du nécessaire. Trublet9. Partout où les hommes peuvent se dire : Nous sommes bien, toutes les autorités sont consenties. L. D. H10. (Lettres sur la Législation. – Berne, 1775. Quand on doute quel est le meilleur et le plus court chemin, il faut tenir le plus droit. Charron.
quelques époques lyonnaises. 1168. Pierre Valdo, natif de Vaux en Dauphiné, riche marchand à Lyon, rue de Vendran, vend ses biens et devient le chef des Vaudois, ou pauvres de Lyon. 1200. Les Templiers et les chevaliers de St-Jean de Jérusalem s’établissent à Lyon. 1536. François I donne des lettres-patente à Turquet et Nariz, pour établir des manufactures de soie à Lyon. 1540. Jean Neyron, riche bourgeois, fait construire, derrière l’église des Augustins, le premier théâtre de Lyon. 1554. Au mois de décembre. Arrêt du conseil, qui homologue les premiers règlemens de police faits par les maîtres-gardes, pour la fabrication des étoffes d’or, de soie et d’argent de Lyon. 1731. Arrêt du conseil qui veut que les maîtres-ouvriers et les marchands d’étoffes d’or, d’argent et de soie, optent pour l’une de ces professions. 1736. Etienne Mazard légue à la Charité 40,000 fr. et une maison vendue 110,000 fr., à la charge de donner annuellement à titre de dot, à 35 jeunes filles présentées par les curés et fabriciens des paroisses de Lyon et Taluyers, 150 fr. chacune. Le capital fut placé sur l’Hôtel-de-Ville de Lyon, moyennant 7,500 fr. de rente, liquide eau tiers. Cette donation a été rétablie le 11 mars 1807, mais seulement pour avoir son effet tons les deux ans. Le testament de Mazard est du 21 avril 1735 ; son codicile du 14 avril 1736. 1744. Arrêt du conseil qui confirme celui de 1731 ; il est suivi d’une émeute. 1745. Un crocodile ayant remonté le Rhône, et s’étant arrêté à la dernière arcade qui joint la rive gauche, deux hommes condamnés à mort le combattirent et le tuèrent ; ils se servirent de longues piques, dont ils percèrent le monstre après l’avoir aveuglé avec du sable. La dépouille fut suspendue à la voûte de la chapelle du St-Esprit ; elle est aujourd’hui à la coupole du grand dôme de l’Hôtel-Dieu. Ces deux hommes reçurent leur grâce qu’ils avaient stipulée. 1824. Une proposition a été faite à M. le maire de Lyon, pour faire revivre la donation faite par Pierre Giron, capitaine Pennon, du quartier de rue Neuve, et exécutée jusqu’en 1788, d’une dot de 200 fr. à une fille pauvre de rue Neuve, prise parle choix du hazard sur trois, dont les deux autres reçoivent pour indemnité 6 fr. chacune.
M. Dervieux fils, chapelier, absent au moment du procès des Lyonnais, dans lequel il était impliqué, s’était constitué prisonnier, et se présentait, le 29, à la cour d’assises de Riom. Sur dix témoins cités, six manquaient à l’audience, l’affaire a été renvoyée à prochaine session, en dépit des réclamations de M. Dervieux qui demandait à être jugé de suite, malgré l’absence des témoins cités. – Ainsi, voilà M. Dervieux dont l’acquittement ne pouvait faire l’objet d’aucun doute, éloigné pour plusieurs mois encore de ses affaires. – [8.1]On assure que plusieurs des six témoins qui ont envoyé des certificats de maladie, ont été vus constamment à leurs affaires. – On s’étonne que M. l’avocat-général n’ait pas demandé une contre-enquête, pour établir la sincérité des certificats de maladie délivrés aux témoins. (Patriote du Puy-de-Dôme).
– M. Joseph Blanc, ex-commis de M. Fosseret, nous écrit pour se plaindre des procédés de ce négociant à son égard. Nous ne croyons pas devoir, quant à présent, insérer cette lettre, nous réservant de le faire si cela devient nécessaire.
COUPS DE NAVETTE.
On a enterré incognito la mère Curiale ; on craignait l’affluence de ses nombreux amis. Les chefs d’atelier et ouvriers, s’assemblent en ce moment pour voter des remercimens : devinez à qui ? La mère curiale étant morte, on demande qui va lui succéder ? Qu’est ce que l’Écho ? c’est un journal : Qu’est-ce qu’un journal ? c’est un écho. Il y a écho et écot. Beaucoup de prolétaires s’apperçoivent qu’il vaut mieux retrancher sur le second, pour avoir le premier. Pourquoi tant s’inquièter de la mort de M. Tarif, et de celle de la mère Curiale ? Les M … agiciens ne sont ils pas là, au besoin, pour les faire ressusciter quand il faudra.
Demain lundi 10 septembre, à neuf heures du matin, aura lieu, pardevant M. Valois à ce délégué et dans l’une des salles de la préfecture, place des Jacobins, une enquête de commodo et incommodo sur la question de savoir si les Brotteaux seront distraits de la Guillotière, et, en cas d’affirmative, s’ils formeront une commune séparée ou s’ils seront réunis à la ville de Lyon.
La distribution de la médaille, fondée par la société du Bazar, en mémoire de la révolution polonaise, et dont le produit est affecté au soulagement des réfugiés de cette nation, a commencé lundi dernier, 3 septembre, et elle se continue tous les jours de midi à 4 heures. Le grand nombre de distribution à faire, joint à l’impossibilité de les rendre assez promptes pour répondre au juste empressement des souscripteurs, oblige la société du Bazar, à modifier l’engagement qu’elle avait pris de faire porter les médailles à domicile. Un motif d’éconnomie, que ses concitoyens apprécieront, justifiera d’ailleurs à leurs yeux cette disposition nouvelle. La société prévient qu’une exposition de divers ouvrages remarquables, dus à des réfugiés polonais, célèbres par leur talent ou leur patriotisme, aura lieu en même temps, par les soins de sa commission exécutive, dans l’intérieur du bureau qu’elle occupe à l’Hôtel-de-ville, et que le public sera admis à y souscrire ou à en faire l’achat immédiat. Au nombre de ces mêmes publications, déjà assez connues pour exciter l’intérêt général, se trouvent : Les cent portraits de polonais et polonaises ayant figuré avec distinction dans la dernière guerre de l’indépendance, accompagnés d’une biographie à l’appui de chaque portrait, par Joseph Straszewicz : [8.2]Les illustrations nationales, œuvre de gravure, par les frères Oleszcynski ; Les scènes politiques de la révolution Polonaise, par Stanislas Bratkowski ; L’histoire de la Lithuanie et de son insurrection, par Michel Pietkiewicz. Après avoir été si constante, depuis dix-huit mois, dans ses preuves de sympathie envers la Pologne, la ville de Lyon ne cessera pas de s’intéresser à ces hommes qui, meurtris par le fer et dénués de tout, font tourner encore aujourd’hui les misères de l’exil au profit de leurs gloires nationales ! Lyon, 31 août 1832. Le Secretaire, Sylvain Blot Nota. La médaille ne sera remise aux souscripteurs-résidens que sur l’exhibition du récépisé dont chacun d’eux est resté dépositaire, et, à partir de mardi 11 septembre courant, sa distribution n’aura lieu que de 3 à 4 heures du soir.
(46) A louer, des appartemens pour la fabrique, montée du Garillant, n° 8. S’adresser à M. de Vittard, rue de Puzy, n° 15. (53) Les Srs Deleigue et Bailly, mécaniciens, rue St-George, n° 29, à Lyon, préviennent MM. les fabricans, chefs d’ateliers et dévideuses qu’ils viennent d’obtenir un brevet d’invention et de perfectionnement d’un nouveau genre de mécaniques rondes, dites à roue volante, propres à dévider, trancanner et faire des cannettes à plusieurs bouts, de toutes sortes de soie. Par un nouveau procédé, elles suppriment rouleaux, cordages et engrenages, et sont supérieures à toutes celles qui ont paru jusqu’à ce jour. Les broches tournant par une seule roue qui tourne horizontalement font qu’elles tournent toutes régulièrement. Ces mécaniques sont d’une grande simplicité, et offrent beaucoup d’avantage à l’acquéreur. On les livre à un prix très-modéré avec garantie. (78) Une mécanique en 900 et deux en 400, à vendre. On désirerait en acheter une en 1500. S’adresser au Bureau. (81) A vendre, 2 métiers complets, mécanique en 400 : l’un en courant, et l’autre en mouchoirs. S’adresser au Bureau. [82] A vendre plusieurs règulateurs, remisses et peignes de 3/4 et 7/8 de 72 à 84 dents au pouce, navettes en bois pour battant à boutton. S’adresser au Bureau. (69) Un atelier de 3 métiers lancé avec accessoires, 2 en 6|4 au quart, mécanique 1,500. 1 en 5/4, mécanique 900. Il y a beaucoup d’ustensiles que l’on cèderait à l’acquéreur. S’adresser au Bureau du Journal, ou cours Morand, n° 8, au 4me, aux Brotteaux. [84] Deux métiers de velours à prendre dans une maison de santé, à Brignais, près du moulin, maison Hybert. Les ouvriers ou ouvrières jouiront de l’agrément d’un vaste clos. (85) A vendre, pour cause de changement de commerce, un joli café sur un quai des plus marchans et de plus passagers de la ville. On donnera des facilités pour les payemens moyennant sûreté. S’adresser au Bureau. (86) A vendre de gré à gré en totalité ou en partie, atelier pour l’apprêt du satin, consistant en calandre, presse, cartons, etc. S’adresser rue des Tables-Claudiennes, n° 15. CABINET GÉNÉRAL D’AFFAIRES, quai de Retz, n° 36, au 4me, à Lyon, dirigé par le sieur Benoit, J. P. L., ancien employé au secrétariat de la mairie, agent principal de la banque de prévoyance des placemens sur les fonds publics, et de l’assurance mutuelle contre les chances du recrutement pour toute la France, représentant de la compagnie du Phénix, teneur de livres, professeur de grammaire française, d’arithmétique commerciale, etc. Le directeur de cet établissement se charge de toute espèce de rèdactions ou transcriptions, réglemes de comptes, vérifications d’écritures, suite d’affaires administratives ou contentieuses, recouvremens de créances, vente et achat de propriétés, régie d’immeubles et généralement de toutes les opérations pour lesquelles on peut avoir besoin d’un mandataire probe et éclairé. [87]
Notes
(Sur un article du N ouvelliste . Le N ouvelliste...)
La question de la délocalisation de la production des soies hors des murs de la ville de Lyon sera reposée et d’une façon beaucoup plus directe au printemps 1833. Dans le Journal du commerce, « organe des négocians », la menace est agitée par les marchands d’exporter dans les campagnes les ateliers de production pour se soustraire à l’agitation des ouvriers ainsi qu’à leurs revendications. L’Echo de la fabrique répondra à cette menace en montrant les conséquences économiquement catastrophiques d’une telle mesure tant pour les négociants eux-mêmes que pour Lyon ou pour l’économie de la France. Le journaliste de L’Echo soulignera que c’est plutôt la lutte contre les « privilèges » qui doit occuper l’attention, mais qu’une telle lutte nécessite avant tout « d’autres institutions », celles notamment préconisées dans les grands journaux républicains tels que La Tribune ou Le Précuseur (numéros des 14, 18 avril et 12 mai 1833).
Notes
(Avis aux Industriels. Le vingt-unième volume...)
L’auteur de ce texte est Joachim Falconnet d’après la Table de L’Echo de la Fabrique (numéros parus du 30 octobre 1831 au 30 décembre 1832).
Notes
(NOTE SUR LA FABRIQUE DE LYON.)
L’auteur de ce texte est Joachim Falconnet d’après la Table de L’Echo de la Fabrique (numéros parus du 30 octobre 1831 au 30 décembre 1832).
Notes
(LECTURES PROLÉTAIRES. )
L’auteur de ce texte est Marius Chastaing d’après la Table de L’Echo de la Fabrique (numéros parus du 30 octobre 1831 au 30 décembre 1832). Voir la note du n° 44 à propos des Lectures Prolétaires. Phocylide de Milet dont les Préceptes avaient été traduits en français par J.-F. Duché de Vancy en 1698. Galart de Montjoie (1756-1816), auteur notamment de Histoire de la conjuration de Louis-Philippe-Joseph d'Orléans (1796) et de Histoire de la Révolution de France et de l'Assemblée nationale (1797). Stéphanie de Genlis (1746-1830), ses Mémoires inédits de madame la comtesse de Genlis sur le dix-huitième siècle et la Révolution Française étaient parus à Paris en 1825. Claude-Adrien Helvétius (1715-1771), philosophe français, collaborateur de L’Encyclopédie de Diderot et D’Alembert, auteur de De l’esprit (1758). La citation est ici tirée de De l’Homme, de ses facultés intellectuelles et de son éducation (1771). Denis Diderot (1713-1784). La citation est tirée de Jacques le Fataliste et son maître. Sylvain Maréchal (1750-1803), écrivain, poète et pamphlétaire français auteur en 1796 du Manifeste des égaux. Jean-Jacques Leuliette (1767-1808), éditeur, traducteur et homme de lettre, auteur en 1805 de Discours sur cette question : ″Comment l'abolition progressive de la servitude en Europe a-t-elle influé sur le développement des lumières et des richesses des nations ? » et d’un Tableau de la littérature en Europe, depuis le seizième siècle jusqu'à la fin du dix-huitième (1809). Nicolas Trublet (1697-1770), l’Abbé Trublet, auteur en 1735 de Essais sur divers sujets de littérature et de morale et d’un Eloge de M. de Fontenelle (1758). Marquis de Mirabeau,(1715-1789), Lettres sur la législation, ou l'Ordre légal, dépravé, rétabli et perpétué. Par L. D. H. [l'Ami des hommes]... publié à Berne en 1775.
|
|
|
|
|
|