L'Echo de la Fabrique : 1 juillet 1832 - Numéro 36

JURISPRUDENCE USUELLE1

des locations.

Nous nous proposons de traiter sous ce titre tout ce qui a rapport à la location des maisons, et nous pensons être éminemment utiles à nos concitoyens. En effet, combien de contestations les particuliers n’éviteraient-ils pas, s’ils savaient les prévoir ? Combien n’en termineraient-ils pas à l’amiable s’ils connaissaient les principes en vertu desquels les juges prononceront. Il est un axiome de droit qui porte que nul n’est censé ignorer la loi, nemo censitur ignorare legem ; mais, dans la réalité, combien l’ignorent ! Cependant, c’est là l’origine d’une foule de procès minimes et ruineux. La société, jusqu’à ce jour, a-t-elle fait assez pour l’instruction de ses membres ? Non… elle a des juges pour condamner, des prisons pour punir, mais elle manque d’instituteurs pour enseigner ; elle manque d’écoles où la jeunesse et l’âge mûr puissent se rendre. L’Echo s’appliquera, autant que cela dépendra de lui, à combler cette lacune. Si cet essai est accueilli, nous nous ferons un plaisir de continuer cette tâche en traitant successivement des autres parties du droit dans leur application usuelle ; mais sans nous assujettir à un ordre méthodique.

du bail à loyer.

Un bail est une convention par laquelle un propriétaire loue un appartement à un individu qui prend le nom de locataire.

On désigne encore le propriétaire sous le nom de bailleur, et le locataire sous celui de preneur.

Le bail peut se faire de deux manières : par convention écrite ou par convention verbale.

[4.1]La convention écrite se fait pardevant notaire, ou par acte sous seing privé.

Le bail fait devant notaire n’a lieu que dans trois cas, 1° si la location est importante, 2° si l’une des parties ne sait pas signer, 3° si l’on craint que l’une des parties soit de mauvaise foi et désavoue plus tard sa signature.

Hors ces trois cas, le bail sous seing privé est aussi bon que le bail notarié.

Le bail sous seing privé doit être écrit en deux originaux sur papier timbré, en ayant soin de laisser intacts les deux timbres du côté du recto, mais on peut écrire dessus au verso de la page. Il doit contenir la mention de fait et signé double ; la date du jour où il est passé, et être réellement signé par les deux parties.

Le bail sous seing privé fait sur papier non timbré, qu’on appelle papier libre ou mort, est également bon et obligatoire ; néanmoins, indépendamment qu’on commet par-là une contravention à la loi, délit léger en apparence, mais qu’un bon citoyen ne doit pas se permettre, on peut regretter plus tard cette économie ; car, si l’on est obligé de produire ce bail en justice, il est soumis à une amende.

Que le bail soit fait par acte notarié ou par acte sous seing privé, il doit contenir :

1° Les noms, prénoms, profession et demeure des parties ;

2° Le prix du bail en toutes lettres ;

3° L’époque des paiemens, c’est-à-dire par demi, de six en six mois, ou par quart, de trois en trois mois ;

4° Le temps de la durée du bail ; c’est-à-dire l’époque à laquelle il commence et celle où il finit, lequel temps est à la volonté des parties, mais ne peut excéder neuf ans si le bailleur loue en qualité de tuteur de ses enfans ;

5° La faculté réservée par les deux parties, ou par l’une d’elles seule, de dédite, soit pour les deux termes de la première année, soit pour un seul, soit pour toute la durée du bail. Il est, en effet, permis de faire à ce sujet telle stipulation qu’on veut.

6° La défense de sous-louer sans le consentement écrit du propriétaire ; à cet égard, si le locataire est un marchand, ou exerce un état susceptible de transmission, il doit réfléchir que cette clause peut l’empêcher de vendre son fonds, son atelier, etc. ;

8° La désignation exacte des lieux loués ;

9° L’indication des réparations que soit le propriétaire, soit le locataire s’obligent de faire ;

10° La dispense de payer l’impôt des portes et fenêtres, parce qu’à défaut de cette dispense, cet impôt, avancé par le propriétaire, peut être répété par lui contre son locataire pour les trois dernières années,

Toutes ces clauses sont de rigueur, et de même qu’il n’en faut omettre aucune, il faut se garder d’allonger le bail par d’autres inutiles.

Il convient de faire enregistrer le bail sous seing privé, afin de lui donner une date certaine. Cet enregistrement est peu coûteux. On additionne le montant du bail pour toute sa durée, et sur cette somme totale il est perçu 25 centimes p. %, plus le décime. Ainsi un bail de 400 fr., pour trois ans, fait 1,200 fr. pour la totalité, et à raison de 25 cent. par cent, il est dû 3 francs, plus 30 cent. pour décime. Cette formalité doit être remplie dans les trois mois ; à défaut de quoi on perçoit la moitié en sus par forme d’amende.

(La suite au prochain N°.)

Marius Ch.......g.

Notes de base de page numériques:

1 L’auteur de ce texte est Marius Chastaing d’après la Table de L’Echo de la Fabrique (numéros parus du 30 octobre 1831 au 30 décembre 1832).

 

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