L'Echo de la Fabrique : 15 juillet 1832 - Numéro 38

CONSEIL DES PRUD’HOMMES1.

Séance du 11 juillet,

(présidée par m. goujon.)

- La séance est ouverte à six heures et demie ; les causes qui ont offert quelque intérêt sont les suivantes :

Le sieur Burgat réclame au sieur Ajac une pièce de 20 aunes ; le conseil, dans l’audience du mois précédent, a déclaré que le sieur Ajac devait la lui donner.

[8.1]Le sieur Trotton, fondé de procuration du sieur Ajac, répond que c’est le sieur Burgat qui a manqué de rendre, comme il avait été convenu pardevant le conseil, un schal tous les 7 jours, et que, maintenant, il ne peut donner qu’une pièce de 10 aunes sur un métier seulement.

Attendu que le chef d’atelier n’a pu remplir ses engagemens, attendu que le sieur Ajac n’a pas fait travailler le métier suffisamment, vu ses frais de montage, le conseil décide qu’il sera tenu de donner une pièce de 10 aunes sur chaque métier.

Le sieur Troubat expose au conseil que le sieur Desmaison n’étant point venu lui rembourser le solde des matières qu’il lui doit, comme il le lui avait dit, il ne veut point se rendre à la conciliation faite par MM. Vuldy, Gamot, Charnier et Martinon, et demande que le conseil statue sur le fonds de son affaire. Il dit ensuite que le sieur Desmaison l’accuse injustement de lui avoir donné la grenadine mouillée, ce qu’il peut prouver par ses livres, en confrontant les pesées remises à l’ouvrier avec celles rendues par le teinturier ; que par conséquent et dans l’intérêt de la fabrique, le sieur Desmaison doit lui payer les matières dont il est en solde le même prix qu’elles lui coûtent, c’est-à-dire, cent francs le kilogramme ; car ; dit-il, en ne faisant payer le solde des matières que 65 fr. le kilog., les ouvriers auraient intérêt à vendre les matières et à se mettre en soldei. Que le solde du sieur Desmaison provient de ce que ses pièces n’ont pas rendu le même nombre de schals que celles du même aunage fabriquées chez d’autres chefs d’ateliers.

Le sieur Desmaison répond qu’il ne veut pas faire d’emphase à la manière du sieur Troubat ; que peu de paroles lui suffiront pour détruire ses assertions, qui sont toutes fausses. Il représente qu’il lui était impossible de soustraire des schals, puisque les pièces étaient toutes marquées à la longueur de chaque schals ; que souvent la distance d’une marque à l’autre était de 54 pouces au lieu de 50 ; que même, il est arrivé qu’il se trouvait deux marques au lieu d’une, et qu’il ne peut être responsable des erreurs de l’ourdisseuse. Il dit aussi, ne point consentir à la conciliation, parce que l’indemnité qui lui a été accordée n’est pas en rapport avec ses dépenses. Et il déclare récuser M. Gamot, ayant été gravement insulté par lui.

Attendu qu’une nouvelle enquête est nécessaire, et que les membres nommés pour concilier les parties, n’ont pas fait de rapport, le conseil renvoie l’affaire à la huitaine pour prononcer son jugement, pendant lequel temps un rapport écrit lui sera communiqué. Le conseil a omis de statuer sur la récusation de M. Gamot.

Le sieur Coronin, mécanicien, réclame au sieur Falquet père, un défraiement pour la nourriture de son fils pendant trois mois, qu’il a gardé pour lui apprendre son état, et les journées qu’il a perdu pour lui montrer, ainsi que celles d’un manœuvre, qu’il était forcé d’employer pour faire travailler son élève. Le sieur Falquet répond qu’il a refusé de passer les engagemens de son fils, avec le sieur Coronin, car son tempérament est trop faible pour continuer cet état, et que la vue lui manque.

[8.2]Attendu que l’élève n’a pu continuer l’état, le sieur Falquet payera au sieur Coronin, la somme de 85 fr. pour tout défraiement.

La réclamation du sieur Chouard contre le sieur Tocannier, renvoyée pardevant MM. Gamot et Falconnet a été conciliée. Le sieur Tocannier payera la somme de 40 fr. pour défraiement de montage de métiers et temps perdu.

Notes de base de page numériques:

1 L’auteur de ce texte est Marius Chastaing d’après la Table de L’Echo de la Fabrique (numéros parus du 30 octobre 1831 au 30 décembre 1832).

Notes de fin littérales:

i Le sieur Troubat prétend que les matières doivent être comptées aux ouvriers le même prix qu’elles coûtent aux fabricans. Sans nul doute, le sieur Troubat n’aura pas manqué de donner cet exemple en payant les avances de ses ouvriers au prix de 100 fr. le kilogramme. Avis aux chefs d’ateliers.

 

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