L'Echo de la Fabrique : 27 janvier 1833 - Numéro 4

 INDUSTRIE.

CANNETIÈRES TRANCHAT.

Depuis quelques années diverses mécaniques ont été inventées pour le dévidage et le cannetage. Mais un perfectionnement, dont le besoin se faisait vivement sentir vient d’être ajouté aux cannetières. Son invention est due au sieur Tranchat, mécanicien, qui en a obtenu le brevet. Ce perfectionnement consiste à arrêter la cannette subitement lorsqu’un des brins casse ou que la soie d’un roquet est employée, en laissant toujours une longueur de huit pouces pour nouer. Par ce moyen, les faux tours aux cannettes sont impossibles, et l’attention pour soigner le nombre des bouts n’est point fatiguée ; toute personne, même un enfant, peut sans peine, sans gâter ni salir la soie, faire parfaitement, en quatre heures de temps, autant de cannettes qu’à un rouet pendant toute la journée. Outre cet inappréciable avantage, il en est un autre qui ne laisse rien à désirer pour la perfection des cannettes, c’est la disposition de la cantre, qui permet, en chargeant les roquets, de tendre la soie à volonté. Par ce moyen on étendra les trames dures, gros noir ou souples, elles deviendront lisses et brillantes, et l’étoffe, en diminuant de poids, prendra tout l’éclat dont elle est susceptible. Le crémage, les trames tirantes sont impossibles par l’emploi de ces canettes. Ces mécaniques procurent donc une grande économie de temps et de matières, non-seulement pour le cannetage, mais encore pour la fabrication ; l’ouvrier n’étant jamais arrêté par les défauts de la cannette, tissera plus facilement et plus régulièrement. Ainsi, en rendant l’étoffe plus belle et moins lourde, le fabricant y trouvera aussi son bénéfice, et nous ne craignons pas d’avancer, parce que nous en avons les preuves, que ce dernier peut, avec bénéfices, faire une augmentation de 5 et même de 10 c. par aune, sur les étoffes fabriquées avec les cannettes provenant de ces mécaniques.

Ainsi on peut donc, sous tous les rapports, considérer l’invention des cannetières comme une véritable amélioration dans la manutention de la soie et de la fabrication des étoffes. Son introduction immédiate dans la fabrique, supprimerait entièrement le rouet à cannettes, dont l’usage remonte à l’époque la plus reculée de l’invention du tissage, et avec lequel on ne fait péniblement qu’une seule cannette à la fois. Véritable galère pour les enfans, que la misère du père de famille force à captiver trop jeunes à ce travail ; travail qui, en les privant de l’éducation qui leur est due, les rend souvent difformes ou bossus par la mauvaise position de leur corps, étant obligés de tourner continuellement et d’une seule main, une roue ce, qui ne laisse pas d’être fatigant. L’humanité réclamait donc depuis long-temps un nouveau mode pour le cannetage, et nous avons lieu d’être surpris, après tant de mécaniques inventées pour la fabrication des étoffes façonnées, que celle qui permet de supprimer l’insipide rouet, soit venue la dernière.

Les cannetières du sieur Tranchat, répondent à tous les besoinsi, espérons que les avantages seront compris [5.1]des fabricans et des chefs d’atelier, il est de l’intérêt des premiers d’aider les seconds a s’en procurer, et dans peu tous les ateliers posséderont des cannetières, tous y trouveront avantage et l’ouvrier aura la satisfaction de pouvoir faire instruire ses enfans.

F.......

Notes de fin littérales:

i On peut le voir en activité chez M. MorelMorel, rue des Tables-Claudiennesrue des Tables-Claudiennes.

 

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