L'Echo de la Fabrique : 14 avril 1833 - Numéro 15

 

Au Rédacteur.

Monsieur,

Je viens vous rendre compte d?une conciliation, suite des premiers différends que je fus forcé d?avoir avec les sieurs Pellin et Bertrand, il y a environ un mois, que je fus obligé de traduire ces messieurs à la barre du conseil. Reconnaissant leur tort, ils m?allouèrent la somme de 25 fr. pour défraiement de temps perdu, rectifièrent le déchet qu?ils ne m?avaient bravement porté qu?à la moitié de celui voulu par les us et réglemens. Ils ajoutèrent les tirelles qu?ils avaient omis ; ils rayèrent aussi sur mon livre, et sur ceux des maîtres qui travaillent pour eux, les scandaleuses conventions qu?ils fabriquaient et voulaient imposer à leurs ouvriers. Ils me promirent enfin de me continuer de l?ouvrage sur la même disposition ; mais ce n?était qu?une promesse fallacieuse, ils ont refusé depuis, et alors je fus encore obligé de les citer de nouveau au conseil ; l?affaire fut renvoyée devant deux prud?hommes. Ces arbitres décidèrent qu?une somme de 16 fr. m?était due au lieu de celle de 36 fr. que je réclamais ; malgré la lésion que j?éprouve, je m?y conforme pour éviter de nouvelle difficulté et temps perdu ; mais je crois devoir rendre publics les sentimens que professent ces messieurs. Dans une conversation que nous eûmes, ils se plaignaient amèrement de la haine dont les ouvriers paraissent les poursuivre, et leur ton des plus impérieux ressemblait au délire, surtout lorsqu?ils parlaient de leur procès avec le gérant de l?Echo. ? Nous en avons rappelé, quoique ce ne soit pas pour nous, puisque nous ne demandions rien, mais uniquement pour détruire dans l?opinion des ouvriers ce journal. Nous avons de la réputation, et nous ne souffrirons pas qu?on y porte atteinte. Je fus forcé de leur répondre qu?il n?y avait pas assez longtemps que je les connaissais pour en juger. J?ajoutai : je crois au surplus que de pareilles difficultés ne sauraient leur porter bonheur. ? C?est une menace que vous voulez nous faire, me répondirent-ils arrogamment ; nous ne demandons des bénédictions à personne, etc.

Agréez, etc.

Sturin.

Note du rédacteur. ? Nous avons rempli par un etc. [5.1]la fin de la conversation de MM. Pellin et Bertrand, car nous n?y attachons, en ce qui nous concerne, aucune importance. Quoique ces messieurs fassent, et même à cause de ce qu?ils feront, l?Echo de la Fabrique ne perdra rien dans l?estime et la bienveillance des ouvriers. Nous avons l?orgueil de le croire, parce que nous avons la conscience d?avoir toujours rempli notre devoir, la résolution de persister, malgré tous les obstacles, dans notre conduite, et que nous avons en même temps confiance dans le bon sens de la classe prolétaire. Seulement nous sommes bien aises d?apprendre que MM. Pellin et Bertrand se sont amendés ; le procès de l?Echo de la Fabrique n?aurait-il eu d?autre résultat, nous nous en féliciterions.

 

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