L'Echo de la Fabrique : 12 mai 1833 - Numéro 19 Littérature.
Un de nos collaborateurs, M. Amédée Roussillac, adresse à Jeanne les stances qu’on va lire et dont nous avons été obligés de supprimer quelques vers par des motifs que la sagesse de nos lecteurs appréciera. [4.2]Le courage malheureux doit être honoré partout où il se trouve. C’est à ce titre seul que nous appelons l’attention sur le héros du cloître St-Méry. Nous ne voulons ni ne pouvons juger sa conduite, notre cadre s’y oppose ; mais Jeanne appartient à l’histoire, et pour le faire connaître nous empruntons au National la notice suivante (Voy. le National, 8 novembre 1832, n° 313). « Quel est ce Jeanne ? C’est le type des vainqueurs de juillet. Dans les grandes journées, il s’arme, il se précipite, il se multiplie ; il est partout, à la porte St-Martin, à la Grève, à l’arcade St-Jean ; il emporte le Louvre ; il marche sur les Tuileries ; six fois blessé, mitraillé, les doigts coupés, il se jette au-devant du peuple furieux, sauve la vie à 23 gardes royaux qu’on allait égorger, et tombe évanoui. Un vif sentiment de l’injustice, si ordinaire chez les caractères ardens et généreux, l’a poussé dans les rangs des insurgés du 5 juin. Les soldats, dit-il, avaient tiré sur les gardes nationaux, sans provocation ; il le croit, il s’indigne, il vole, il crie aux armes ! et, suivi d’un petit nombre d’exaltés, il se retranche derrière les barricades et repousse toutes les attaques. Une balle l’atteint au milieu des reins et le renverse ; il se relève, et toute la nuit il fait feu. Les accusés ordinaires s’excusent en disant qu’ils n’y étaient pas ; que c’est faux ; qu’ils étaient contraints ; qu’ils assistaient en curieux ; qu’ils n’ont ni tiré, ni fait entendre des cris, ni fondu de plomb, ni porté de poudre, ni construit de barricades. Mais Jeanne répond intrépidement : « Oui, j’ai veillé toute la nuit ; oui, j’ai fait feu ; oui, j’ai distribué des cartouches ; oui, j’ai tiré des croisées ; oui, je serais resté derrière les barricades si les cartouches ne nous eussent manqué ; oui, je recommencerais sous l’influence des mêmes sentimens ! » Et quand l’artillerie et la cavalerie, la ligne et la garde nationale s’avancent pour le combattre ; quand ses munitions sont épuisées ; quand la barricade ploie et fléchit sous le poids du nombre, cet homme petit et faible, qui a eu les reins frappés d’une balle, qui a passé à se battre toute une nuit et toute une journée, va-t-il fuir ou demander grâce ? Non, lui dixième, il traverse à la baïonnette une ligne d’infanterie ! C’est de la folie, dira-t-on, c’est du délire… C’est tout ce que l’on voudra ; mais si ce n’est pas là de l’héroïsme, on ne sait plus à quel signe le reconnaître. Qui ne serait frappé d’étonnement et d’admiration en entendant tant de mots si simples, si francs, si précis, si décisifs, si hardis et si fiers ? Que dites-vous de cette réponse ? « Renversé par une balle, je me relevai toutefois et je tirai un coup de fusil, un seul coup, car ils avaient fui. » Mettez ce mot dans la bouche d’un soldat devant l’ennemi, ne le trouverez-vous pas sublime ? Et cette autre réponse de Jeanne à l’un des combattans qui lui demandait des vivres : « Des vivres ! il est trois heures : à quatre heures nous serons tous morts. » Et cette apostrophe lancée à l’un des témoins, qui l’a abandonné et qui l’accuse : « Il s’est retiré par peur ; c’est un lâche ! » Et lorsqu’on lui conseille de détacher sa décoration : « Qu’ils me l’ôtent, dit-il, la France me la rendra. » Il est bon que ces mots-là restent ; il est bon que le pays sache, et les étrangers surtout, quels nobles cœurs battent chez les plébéiens qu’ils méprisent et qui les anéantiraient ! » [5.1]Au citoyen Jeanne ! stances. O Jeanne, ta voix fut divine ; … Vienne un jour notre république, … Car un nom c’est tout un principe, Dans notre semaine sublime Non, le brigand supplie et rampe, En toi nous admirons le type … Dans les fers, loin d’être abattue, Et ta mère, la noble femme, C’est que les mœurs républicaines Vainqueurs, soyez bouffis de gloire : … Du Cloître ils ont rougi les dalles ; Notes de fin littérales:i Ce héros des insurgés de ii De nombreuses souscriptions ont été faites en faveur de |