L'Echo de la Fabrique : 24 juin 1833 - Numéro 25

CONSEIL DES PRUD’HOMMES.

(présidé par m. riboud.)

Audience du 20 juin 1833.

D. La partie qui a obtenu un jugement de condamnation, peut-elle faire citer de nouveau aux mêmes fins la partie condamnée ? – R. Non. Les frais de cette citation sont frustratoires et doivent rester à sa charge.

Par jugement du conseil des prud’hommes du 6 juin courant, Méry a été condamné à payer à Roux et Combet 15 fr. pour prix de cartons non rendus. Méry n’ayant pas payé, était cité pour cette audience. Il offre de payer mais non les frais de cette nouvelle citation.

« Considérant que Roux et Combet devaient, à défaut de paiement, lever le jugement rendu à leur profit contre Méry et non le citer de nouveau,

« Le conseil dit qu’il n’y a lieu à statuer, et condamne Roux et Combet aux dépens du présent jugement. »

D. Un chef d’atelier peut-il se refuser à payer l’empontage à un monteur de métiers, sous le prétexte que les cordes ont été changées lorsqu’il n’en fournit aucune preuve ? – R. Non.

Ainsi jugé entre Rozerat et Bouvier.

D. Lorsqu’un chef d’atelier fait délivrer un livret au fils d’un de ses collègues, qu’il a retiré sans le consentement du père, le conseil a-t-il le droit de déclarer nul ledit livret et d’ordonner au jeune homme de réintégrer le domicile de son père ? – R. Oui.

Ainsi jugé entre Giraud et Fournier, tous deux chefs d’atelier.

D. Lorsqu’il est établi qu’à l’époque de son entrée chez son maître, l’apprenti avait des dispositions à la maladie ou difformité, à raison de laquelle elle demande la résiliation de son engagement, le conseil doit-il prononcer cette résiliation et condamner l’apprenti à des dommages-intérêts ? – R. Oui.

[3.2]Bessy, père d’une apprentie, présente un certificat de médecin qui constate que sa fille ne peut continuer l’état de la fabrique ; il est en même temps établi que c’est mal à propos que le père de famille a eu l’idée de donner cet état à sa fille, attendu qu’elle avait une tendance évidente à contracter la difformité qui est le motif de sa réclamation.

« Le conseil, par ces motifs, résilie l’engagement et condamne Bessy à payer 100 fr. d’indemnité au chef d’atelier. »

D. Les mauvais traitemens d’un maître envers son élève sont-ils un motif suffisant de prononcer sans indemnité la résiliation de l’engagement contracté ? – R. Oui.

Ainsi jugé entre Mauvenon, ferblantier, et son apprenti.

Auguste Dépouilly, prud’homme négociant, a été condamné à payer à Niche, chef d’atelier, 70 c. le mouchoir, qu’il ne voulait (quoique prud’homme) payer que 60 c., et attendu son refus de continuer le métier, à payer à 15 fr. de dommages-intérêtsi pour le montage de métier.

Deux affaires ont été renvoyées à huitaine.

La première, celle de Bouvery contre Delès ; ce négociant refuse le déchet et l’enlaçage des cartons, contrairement aux décisions du conseil. Nous ne concevons pas ce renvoi, car il n’y a pas à délibérer : demandez à MM. Gentelet et consorts.

La seconde présente une question assez grave à résoudre et qui est celle-ci : Lorsqu’un acte d’apprentissage été résilié moyennant une somme de..., payable par l’apprenti ou la personne qui a stipulé pour lui, cet apprenti peut-il, sans que le paiement ait eu lieu, se placer chez un autre chef d’atelier. Ce dernier commet-il une contravention en le recevant chez luiii ?

Notes de fin littérales:

i Il nous semble que le conseil n’aurait pas dû arbitrer séance tenante cette indemnité, mais renvoyer, suivant son usage, devant un de ses membres. Cette indemnité nous paraît de beaucoup trop au dessous de ce qu’il était juste d’accorder à NicheNiche. Ce chef d’atelier s’est plaint au conseil que DépouillyAuguste Dépouilly lui avait dit que ses réclamations étaient des tours de force, et qu’il n’aimait pas les ouvriers qui font appeler au conseil. Nous n’avons pas entendu la mercuriale que M. le président a sans doute adressée à son collègue à raison de cette impertinence.
ii Nous pensons que l’apprenti ne peut se replacer sans avoir satisfait à la condition imposée à la résiliation de son engagement, et dès-lors le chef d’atelier qui l’occupe en second lieu doit être condamné par le jugement du conseil à renvoyer de suite l’élève ou à payer sauf son recours.

 

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