L'Echo de la Fabrique : 27 octobre 1833 - Numéro 43

 

Le Conseiller des Femmes.

Tel est le titre d’un petit journal devant être rédigé par des dames et dirigé par Mme niboyet, née mouchon1, ainsi que l’indique le prospectus que nous venons de recevoir.

Au temps où nous sommes ; – et quand c’est presque avec le sourire de l’ironie, qu’on accueille ceux qui travaillent à l’émancipation de la femme, en même temps qu’à une régénération sociale, dont tout autour de nous vient attester l’urgente nécessité ! – Il est bien, qu’élevant une tribune d’où elle puisse faire entendre sa voix, LA FEMME prenne aussi sa place dans le champ où s’agitent une foule de graves questions auxquelles elle ne saurait plus désormais rester étrangère : – c’est pourquoi nous applaudissons de grand cœur à la venue de ce journal.

« Aujourd’hui (dit Mme niboyet) notre époque, toute de critique, semble préparer à la civilisation une voie nouvelle ; il est donc temps que la femme jette un regard attentif sur la génération qui s’avance, et que, de sa voix tendre, elle fasse pénétrer bien avant, dans le cœur de ses enfans, des principes de paix et d’harmonie. Impuissante dans l’état actuel de notre législation, elle peut beaucoup dans la famille. Appelée à être le guide constant et naturel de l’enfance, l’avenir de la prochaine génération lui appartient tout entier. Elle peut à son gré, par la douceur de ses manières, modifier le caractère aigri d’un époux, d’un frère, d’un ami, que le vent des passions emporte. A tous les âges, dans tous les états, ou peut sentir son influence, car son pouvoir, pour être caché, n’en est pas moins réel. Qu’elle n’oublie donc pas que si les hommes font les lois, les femmes font les mœurs. Que, pour entrer dans l’arène, elle rappelle à son souvenir les noms si justement célèbres de Mme Roland, à l’âme si élevée ; de Mme de Staël2, au génie si fécond, au style si pur !… Astres brillans qui ont laissé sur leur passage un rayon d’immortalité ! »

Nous voudrions bien encore citer quelques passages de ce prospectus qui ont appelé notre attention ; – mais, resserrés que nous sommes dans les étroites limites de notre journal, nous laissons au CONSEILLER DES FEMMES le soin d’inspirer à tous l’intérêt que nous lui portons en particulier.

Ce journal paraîtra, à dater du 1er novembre, tous les samedi de chaque semaine. – Le prix de l’abonnement, qui ne pourra être de moins d’une année, est de 10 fr. – Le bureau du journal est rue Royale, n° 14. – On s’abonne aussi chez M. Léon Boitel, imprimeur, quai St-Antoine, n° 36.

Notes de base de page numériques:

1. Eugénie Niboyet (1799-1882) allait publier Le Conseiller des femmes, entre novembre 1833 et septembre 1834. Un court moment après allait lui succéder, à partir d’octobre 1834, La mosaïque lyonnaise. Journal littéraire. À Lyon, L’Écho de la Fabrique sera l’un des très rares journaux à saluer sans restriction cette parution. Significativement, à quatre reprises par la suite, le journal des canuts reproduira des articles du Conseiller des femmes, articles signés par Eugénie Niboyet, mais aussi Louis Maignaud ou Jane Dubuisson.
2. Référence ici à Germaine de Staël (1766-1817) et à Jeanne-Marie Rolland de la Platière (1754-1793). Cette dernière avait publié, peu avant la Révolution, plusieurs articles dans le Courrier de Lyon.

 

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