L'Echo de la Fabrique : 2 mars 1834 - Numéro 61

 

Nouvelles diverses

huit sous par jour pour la famille d?un travailleur !

Loin de nous la pensée d?exciter les pauvres contre les riches ! Mais nous ne cesserons jamais d?invoquer la justice et l?humanité sur le déplorable sort du peuple.

Ceux qui dînent fort largement chaque jour, qui ont des loges à l?Opéra, des chevaux à l?écurie, une douzaine de pensions, parce qu?ils ont prêté serment de fidélité à une douzaine de gouvernemens différens, qu?ils ont tous trahi, ceux-là disent que tout est pour le mieux du monde dans ce meilleur des mondes.

Voici un fait que nous empruntons au Courrier du Bas-Rhin, et qui prouve tout le contraire :

« Les ouvriers de la manufacture de tabac, dit ce journal, recevaient 20, 22 ou 24 sous par jour ; c?était à peine assez pour vivre. Mais voici que d?après un nouvel arrangement qu?on a voulu leur imposer, leur salaire journalier se trouve réduit à 8 ou 10 sous. Il n?y a pas de terme assez énergique, assez sévère pour qualifier un fait semblable : car c?est tout simplement prendre à ces malheureux ouvriers la moitié du pain qu?ils gagnent péniblement et qui suffit à peine pour leur nourriture. »

Ce n?est pas l?ouvrier salarié à 8 sous par jour, ce ne sont pas ses enfans, sa femme, qui manquent de pain, qui doivent trouver que tout est pour le mieux dans ce meilleur des mondes.

(Populaire.)

Mlle Adélaïde, s?ur de Louis-Philippe1, qui se prétend propriétaire de la place publique de Randan, l?avait récemment fait entourer de barrières, afin qu?on ne pût s?y promener. Les habitans de Randan, se fondant sur des titres qui leur confèrent la jouissance perpétuelle de cette place, se sont réunis en grand nombre, ont enlevé les barrières et en ont fait un feu de joie. Décidément les bonnes traditions se perdent ; il n?y a plus rien à faire du peuple.

(Idem.)

Les paysans des environs de la saline de Gouhenans, dont nous avons rapporté dernièrement l?illégale et sauvage destruction, étaient dans l?habitude de venir prendre les crasses provenant des cuissons, et de racler les chemins empreints du sel provenant du coulage des chaudières ; ils avaient cru pouvoir continuer à enlever ces résidus sans valeur, et abandonnés par les propriétaires. Tout-à-coup, sur un ordre barbare, et qu?il ne lui a pas été permis de discuter, à raison de l?obéissance passive que les réglemens militaires lui imposent, la troupe cantonnée à Gouhenans a fait feu sur les malheureux paysans, dont, par un hasard miraculeux, aucun n?a été atteint par les balles.

(Idem.)

Notes de base de page numériques:

1. Mention ici d?Adélaïde d?Orléans (1777-1847), s?ur cadette de Louis-Philippe 1er.

 

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