L'Echo de la Fabrique : 6 novembre 1833 - Numéro 2

[3.1]Nous publions la lettre suivante de M. chastaing :

Au Gérant.

5 novembre 1833.

Monsieur,

Cédant aux sollicitations d’amis communs, je renonce à publier la lettre que j’avais adressée au gérant de l’Echo de la Fabrique. Qu’il me sache gré ou non de ce procédé peu m’importe. Les injures qu’il m’a adressées sont peut-être le salaire des éloges qu’il a reçus du Courrier de Lyon. De la part de ce dernier journal aucune attaque ne m’aurait étonné, car j’ai mérité sa haine et celle de son parti ; mais de la part de tout autre on ne peut le concevoir. Eh bien ! le croira-t-on, j’ai été attaqué par la Glaneuse avec une violence inouie ; la Glaneuse n’a fait que prêter trop légèrement, j’aime à le croire, ses colonnes à un homme qui est mon ennemi personnel, ou s’en est rendu l’instrument. Vous m’avez accompagné au bureau de la Glaneuse avec les citoyens Falconnet et Berger, je n’ai pu, vous le savez, malgré mes instances, obtenir le nom de l’auteur de l’article dirigé contre moi. Nous sommes tous solidaires, a-t-on répondu. Que des écrivains se déclarent solidaires pour les doctrines émises par un journal ; qu’ils présentent à la justice un seul homme responsable pour épuiser les vindictes du parquet, cela est naturel ; mais solidaires pour des injures, solidaires pour un article diffamatoire… se retrancher derrière la fiction légale d’un gérant pour déverser à son aise et sans risques le poison de la calomnie, c’est une véritable infamie. Je dois donc, et c’est ce que je fais, séparer la Glaneuse, journal dont je partage les principes, de l’homme qui s’est rendu contre moi le complaisant écho de la calomnie. Il ne dépend pas de lui, quelqu’acharné qu’il puisse être, de me faire perdre l’estime de ceux qui me connaissent. Je déclare donc, pour en finir, que je tiens cet anonyme pour un calomniateur. Qu’il ne prenne pas ma modération pour de la crainte : dois-je rendre un gérant responsable des écarts d’un autre que lui ? Cependant ce gérant est averti. Qu’il n’oublie pas la responsabilité qui pèse sur lui ; qu’il n’oublie pas que la loi protége l’honneur des citoyens. Signataire de la Glaneuse, qu’il la maintienne dans la ligne honorable où ses prédécesseurs, MM. Wormser et Granier, l’ont fait entrer ; qu’il cesse d’en faire un porte-voix de calomnie, tantôt contre M. Anselme Petetin, tantôt contre M. Micol, aujourd’hui contre moi. M. Petetin a méprisé les injures qui s’adressaient à lui ; force a été de faire réparation au second. J’aurais peut-être dû imiter le silence du rédacteur du Précurseur, car le mépris est la seule arme à opposer à des injures imméritées et dont l’exagération indique suffisamment la source d’où elles partent, et le but qu’on aurait voulu atteindre.

Les hommes honnêtes, et surtout les patriotes, apprécieront ma conduite en cette circonstance.

Marius Chastaing.

Note du Gérant. – Puisse ce débat fastidieux se terminer enfin. Le public est las de ces questions d’animosité personnelle ; y consacrer les colonnes d’un journal, ce n’est pas user, mais abuser de la presse. L’intérêt public réclame notre temps et celui de nos confrères. Que la Glaneuse veuille bien ne pas l’oublier : à elle il est permis d’avoir ses affections, ses antipathies ; qu’elle soit juste à notre égard comme nous le serons au sien, nous ne demandons pas autre chose.

 

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