L'Echo de la Fabrique : 13 novembre 1833 - Numéro 4

Association commerciale d?échanges.

AVIS.

Le mouvement et les travaux de l?échange ayant repris leur cours, une assemblée de MM. les Actionnaires-Sociétaires a eu lieu dimanche dernier dans une des salles du café du Messager des Dieux.

Les administrateurs de la société, en soulevant une question grave, déja soumise aux tribunaux de commerce, ont fait comprendre à leurs auditeurs qu?ils étaient tous associés entr?eux d?après la lettre même des statuts ou pacte social ; qu?alors même qu?il n?en serait pas ainsi, leur intérêt bien entendu exigerait qu?ils se considérassent comme tels. Ils ont représenté le monde travailleur sous la dépendance du monde des écus, l?industrie en véritable état de servage, et démontré que l?échange, par son mécanisme ingénieux et facile, enlève au numéraire le rôle dominateur qu?il a usurpé. Ils ont établi pour base de leur système, le travail et l?activité : tout en démontrant les vices du système monétaire, ils en ont cependant reconnu les avantages ; mais ils l?ont établi comme compensateur, et non pas comme dominateur ; ils en ont reconnu l?utilité, mais non pas l?absolue nécessité.

MM. les Sociétaires ont compris enfin que le manque d?argent entravant le développement et l?extension qu?ils pourraient donner à leur industrie, et l?échange y aidant au contraire (car l?échange augmente également la production et la consommation), ils devaient concourir à l?affermissement de ce système. Ils ont en conséquence, unanimement consenti à aller renouveler, par-devant notaire, l?adhésion souscrite sous seing privé, et, sur la demande formelle de MM. les administrateurs, il a été nommé trois commissaires ayant droit de surveillance dans les bureaux et devant servir d?experts pour la plus ou moins value des objets pris ou donnés à l?échange.

Ces commissaires ne sont que provisoires. Dans une assemblée qui aura lieu incessamment, et à laquelle tous les Sociétaires devront concourir, il sera définitivement nommé un nombre déterminé de commissaires surveillans, et un tribunal de prud?hommes ou juges de l?échange, jugeant en dernier ressort les différens entre leurs co-associés, [2.2]tant sur le prix des marchandises que pour les retards que MM. les adhésionnaires pourraient apporter dans l?exécution de leurs obligations.

Ainsi, l?échange qui aura déja appris aux hommes à considérer le travail comme la seule richesse, leur apprendra à se passer d?une justice coûteuse, et à terminer en famille les discussions d?une nouvelle famille ; et tous les associés ayant entr?eux les mêmes intérêts et les mêmes besoins, ces jugemens deviendront la base de l?harmonie sociétaire et le plus ferme appui de l?échange.

J. dubroca.

Note du rédacteur. ? Nous assistions à cette séance vraiment remarquable, et nous devons déclarer que chacun en est sorti avec une intention bien arrêtée de resserrer les liens d?une société qui réalise dès à présent la théorie de Fourrier, avec laquelle elle a des rapports frappans. Nous devons aussi payer un juste tribut d?éloges au talent oratoire de M. Dubroca qui, dans une improvisation de longue haleine, a su captiver constamment un auditoire assez nombreux, par une diction élégante et logique. Ce jeune homme, natif de Bayonne, est un sujet précieux pour la propagation du système de l?échange.

 

Contrat Creative Commons

LODEL : Logiciel d'édition électronique