L'Echo de la Fabrique : 20 novembre 1833 - Numéro 6

Nous nous empressons d’insérer la lettre suivante, qui nous est adressée contre le système de l’association commerciale d’échange. On le voit, nous n’oublions pas les promesses de notre prospectus. Nous l’avons dit, parce que c’est notre conviction : un journal est une tribune où toutes les opinions doivent librement se produire. Nous n’acceptons la responsabilité que de ce que nous signons ; c’est ainsi que, dans l’Echo de la Fabrique, les doctrines St-simonienne et fourriériste ont pu se développer successivement. Nous n’avons voulu subir la tutelle d’aucunei, nous agirons de même dans la nouvelle rédaction qui nous est confiée1. L’association commerciale d’échange a des champions dévoués, écrivains de beaucoup de mérite, qui relèveront le gant que lui jette notre correspondant ; ce dernier ne manquera pas sans doute non plus de donner à son attaque tous les développemens qu’elle exige. La cause du progrès ne peut que gagner dans ces débats, et le public jugera entre les partisans et les adversaires de l’échange. Provisoirement, nous sommes neutres.

Lyon, le 14 novembre 1833

A M. le rédacteur en chef de l’Echo des Travailleurs.

Monsieur,

Deux articles successifs sur l’association commerciale d’échange, tous deux émanant d’administrateurs ou d’intéressés de cet établissement, ont été insérés dans l’Echo des Travailleurs.

Vous avez annoncé que cette feuille était une tribune où chacun pouvait, suivant sa foi et ses lumières, défendre ou attaquer toutes les institutions capables d’améliorer ou de porter atteinte à la position matérielle ou sociale des travailleurs. Je viens éprouver les promesses de votre prospectus, en vous déclarant que ma conviction et mon expérience me commandent de combattre le système d’échange qu’on veut introduire dans notre cité, de l’attaquer surtout dans les formes adoptées par la compagnie actuelle, parce que je considère les conditions formulées, comme étant très préjudiciables aux intérêts des travailleurs en général. J’essaierai de leur faire comprendre toute la portée des engagemens qu’on leur fait contracter, et tout ce que ces engagemens ont d’onéreux. Je suivrai pas à pas les tentatives de l’établissement qu’on essaie de reconstituer, et j’éclairerai mes concitoyens sur les conséquences des opérations qu’ils se proposeraient d’entamer.

Nous sommes dévoués aux progrès, Monsieur, mais il ne faut pas accueillir avec un même empressement toutes les innovations qu’on nous présente entourées de phrases pompeuses et sonores. De nos jours, le mot philantropie est un manteau pour bien des gens, et ne savez-vous pas d’ailleurs que les meilleures choses, mal exploitées, mal dirigées, ne produisent que de fâcheux résultats ? Qui n’a pas approuvé, par exemple, la création de la caisse hypothécaire ? Qui n’a pas vu dans cet établissement un puissant appui pour l’agriculture ? Eh bien ! malgré son capital de 50 millions, ses opérations ont eu pour effet de ruiner prêteurs et emprunteurs ! Prenons garde à la même école.

Veuillez donner une place à cette lettre dans vos colonnes, et agréez, Monsieur, l’assurance de ma considération très distinguée.

Un de vos lecteurs, J.

Notes de base de page numériques:

1 Les jugements que porte Chastaing sur L’Echo de la fabrique ne sont pas sans biais. Cette remarque est toutefois extrêmement importante, signalant, au sein de L’Echo de la fabrique, l’empathie croissante entre mutuellisme et fouriérisme.

Notes de fin littérales:

i. M. BernardBernard, gérant actuel de l’Echo de la FabriqueL’Écho de la Fabrique, a déclaré adhérer au système de FourrierFourier Charles. (V. l’Echo de la FabriqueL’Écho de la Fabrique, N° 39, p. 318. Du Système etc.).

 

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