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5 avril 1835 - Numéro 14 |
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un mot sur les fabriques étrangères de soieries, A propos de l’exposition de leurs produits, faite par la chambre de commerce de Lyon. Par M. Arles Dufour, négociant, membre de la chambre de commerce. [1.1]Nous venons un peu tard rendre compte de la brochure de M. Arles Dufour1, sur l’exposition des produits des fabriques étrangères, qui a eu lieu à Lyon, sur la fin de l’année dernière. Heureusement cette brochure n’est pas de celles dont tout le mérite est dans l’actualité ; fruit d’études réfléchies et d’investigations sévères, elle sera toujours utilement consultée par ceux qui voudront s’enquérir de la fabrique lyonnaise. Cependant nous devons déclarer que nous sommes loin de partager quelques-unes des doctrines émises par M. Arles Dufour. Nous nous en expliquerons incessamment. Tous les journaux, à l’exception d’un seul (l’Indicateuri), ont rendu compte de l’exposition dont s’agit, mais seulement sous un point de vue théorique ; ceux qui désireraient une appréciation pratique des marchandises étrangères admises à cette exposition, doivent consulter les articles que notre ami et collaborateur M. Falconnet a consacrés à cet objet, dans les numéros 2, 3, 5, 7, 8 et 14 de la Tribune Prolétaire. Cette exposition, la première de ce genre, méritait un historien, elle l’a trouvé dans M. Arles Dufour, dont la compétence sur cette matière ne saurait être révoquée en doute. M. Arles Dufour envisage la fabrique lyonnaise d’un point de vue élevé, c’est à dire philosophique et moral. Ce qu’il dit est triste, mais vrai ; et d’abord il commence par se prononcer contre l’opinion qui tendrait à considérer comme sans rivale l’industrie lyonnaise ; loin de là, il s’étonne qu’on puisse penser qu’elle ait, contrairement à la loi qui régit le monde, le privilége de ne pas faiblir en vieillissant, et de ne pouvoir mourir. Ne nous laissons pas éblouir, ajoute-t-il, par les belles phrases obligées des discours d’apparat, et regardons sérieusement autour de nous. N’oublions pas que si la vieillesse a pour elle le savoir, l’expérience, la renommée ; la jeunesse en compensation possède à un degré supérieur l’activité, l’énergie, l’ambition. – Une vieille industrie a des habitudes qui entraînent des abus, etc. Si M. Arles avait voulu faire de l’érudition, il aurait pu citer les villes jadis si florissantes de Tyr, Carthage, dont on cherche aujourd’hui les ruines, de Venise, Gênes, etc., qui ont couvert la mer de leurs vaisseaux, établi des relations commerciales dans toutes les parties du monde, et ne sont aujourd’hui que des villes obscures, sans importance. M. Dufour admet bien ensuite que la fabrique de [1.2]Lyon n’est pas arrivée à cette période de la vie où l’on se sent faiblir et mourir. Sa conviction est qu’elle sortira rajeunie de la crise, qui depuis long-temps la tourmente ; mais il faudra qu’elle sacrifie bien des traditions et des habitudes. Quelles sont ces traditions et ces habitudes que sous peine de mort la fabrique de Lyon doit sacrifier ? Nos lecteurs ne s’y attendent peut-être pas ; nous allons le leur dire. M. Dufour demande l’émigration des ouvriers dans les campagnes, et plus encore leur réunion dans de vastes ateliers, sous la conduite de contremaîtres intelligents. Pour qu’on ne nous accuse pas de faire dire à notre auteur le contraire de ce qu’il a écrit nous allons citer. Nous lisons page 140 : « Ainsi que je viens de le prouver, la grande industrie lyonnaise est en voie de progrès, et quoique ce soit à la condition de s’éloigner de la ville. etc. »ii 2 Nous lisons page 15. « Pour diriger et employer les 9 à 10,000 métiers du canton de Zurich, il y a tout au plus 25 fabricans (marchands-fabricans) ; pour un nombre égal de métiers, il y en aurait ici une centaine. Est-ce un mal, est-ce un bien ? Je crois que, vu les développemens que prend partout l’industrie, la concurrence qui en résulte, la grande division est un mal. » Et plus loin, p. 138. « Dans mon opinion, notre industrie doit suivre tôt ou tard la marche de l’industrie cotonnièreiii, et c’est pourquoi j’ai particulièrement appelé l’attention de mes concitoyens sur le Manchester et le Lancashire en général. Que si on venait à me demander ce que je pense des résultats probables de cette transformation, relativement à l’amélioration du sort de l’ouvrier, je répondrais que, pour juger les conséquences d’un fait il faut le laisser s’accompliriv, et je suis loin de considérer le fait des ateliers de Manchester comme accompli. La question devient d’ailleurs plutôt sociale qu’industrielle, et quoi qu’il soit impossible de séparer complètement l’une de l’autre, mon intention n’est pas de l’examiner ici. » Il résulte évidemment de ces citations que M. Arles Dufour ne croit possible de soutenir la concurrence de la fabrique de Lyon contre les fabriques étrangères qu’à ces deux conditions que nous avons énumérées ci-dessus, et qui consistent : 1° dans l’émigration des ouvriers dans les campagnes, 2° dans la concentration des ouvriers [2.1]dans les manufactures de soieries, à l’instar des manufactures de coton. Nous ne partageons pas ces principes, et quelque estime que nous ayons pour le talent de M. Dufour nous sommes obligés de nous élever contre l’aberration de ses doctrines ; M. Dufour a eu raison de le dire en traitant la seconde proposition ; la question devient plutôt sociale qu’industrielle ; nous n’avons pas à examiner pourquoi il n’a pas jugé convenable de la traiter sous le nouvel aspect qui se présentait ; nous ne le ferons pas non plus nous-mêmes, et cela par le seul motif que nous sommes encore sous le coup d’un arrêt qui a décidé que les questions sociales étaient des questions politiques ; mais aussitôt que cette entrave sera levée, nous reviendrons sur ce sujet ; quant à présent nous nous contenterons de renvoyer les lecteurs à ce que nous avons dit précédemment dans l’Echo de la Fabrique et dans ce journal. La suppression de la classe des chefs d’atelier est au fond du système de M. Arles, et nous croyons que bien malgré lui, si ce système prévalait, le sort des ouvriers empirerait. Nous avons dit et nous le répétons parce que nous en sommes convaincus : L’émigration des ouvriers dans les campagnes les livre nécessairement aux exigences tyranniques de la cupidité des marchands ; leur concentration dans des ateliers n’est autre chose, sous un autre nom, que la glèbe industrielle, remplaçant la glèbe agricole. Nous avions besoin d’exprimer d’abord notre discordance, nous n’avons plus que des éloges à donner. M. Arles est partisan de la liberté commerciale, de la suppression des droits de douane, de l’abandon des priviléges et droits prétendus protecteurs de l’industrie. Nous sommes complètement de son avis et nous unissons notre faible voix à la sienne. Nous ne répéterons pas les éloges que nous avons donnés en commençant cet article déjà long, aux recherches consciencieuses de M. Dufour. Son livre est à cet égard un recueil de documens précieux, mais nous y renvoyons les lecteurs désireux de s’instruire ; autrement il nous faudrait transcrire sa brochure, et nous ne pensons pas que copier un livre sous prétexte d’en rendre compte soit autre chose qu’un plagiat effronté, un vol littéraire.v
i. La même chose était arrivée à l’Echo de la Fabrique depuis qu’il changea de direction en août 1833. Ce journal fut le seul qui ne parla pas de la crise de février 1834, et fit plus il oublia au mois de mars suivant de parler de l’élection des prud’hommes négocians, qui eut lieu à cette époque. ii. L’Indicateur, dans son numéro 27, a indignement tronqué ce passage. Les lecteurs qui viennent de lire le texte précis de M. Arles n’ont qu’à le comparer avec celui de l’Indicateur ; on verra par là jusqu’où ce journal pousse la mauvaise foi. Voici comment s’exprime l’Indicateur : « Ainsi que nous l’avons démontré, la grande industrie lyonnaise est en voie de progrès, et quoique quelques ouvriers aient jugé convenable de s’éloigner de la ville, etc. » On peut continuer ce rapprochement ; maintenant l’Indicateur peut parler à son aise de sa bonne foi. Lorsqu’on travestit ainsi l’écrit d’un auteur, on prend place parmi les forbans littéraires. Il est vrai que l’Indicateur, pour cacher son plagiat, a supprimé le nom de M. Arles au bas de l’article. Ceci ne l’excuse pas. – C’est dans ce même article que le rédacteur a dit : « Depuis Alexandre de Lacédémone jusqu’à Napoléon, etc. » M. Arles n’était pas homme à commettre une telle bévue historique. Nous avons vérifié le texte ; les mots que nous avons soulignés sont le fait du plagiaire. iii. La réunion des ouvriers dans la même manufacture, sous des contremaîtres. iv. Nous pensons qu’il vaut mieux les prévoir. v. C’est ce qu’a fait l’Indicateur ; il a dans ses numéros 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, copié environ vingt pages de la brochure de M. Arles, et cela sans aucune discussion de sa part.
Quelques chefs d’atelier ayant paru croire que nous entendions par libre défense le ministère des avocats ou avoués ou autres agens d’affaires substitué à la présence des parties, nous nous empressons de détruire leur erreur. Nos principes bien connus auraient dû cependant nous mettre à l’abri de toute fausse interprétation. Nous pensons que la présence des parties est toujours nécessaire, et que c’est un grave abus de les avoir dispensées de paraître devant les tribunaux ordinaires : ainsi nous ne saurions vouloir pour le conseil des prud’hommes ce que nous déclarons monstrueux dans les autres juridictions. Nous nous réservons de traiter plus amplement cette question de la présence des parties assistées, si bon leur semble, par des défenseurs, dans une série d’articles que nous ferons paraître sans le titre de réforme judiciaire.
AU RÉDACTEUR.
Chaque jour on apprécie davantage l’utilité d’un journal comme le vôtre, indépendant de tout système et n’ayant d’autre influence à subir que celle à laquelle la presse ainsi que tout le monde est soumise. Je viens donc vous prier de me prêter vos colonnes pour repousser d’un côté les attaques que M. Derrion, rédacteur en chef de l’Indicateur a dirigé contre la maison centrale, et répondre en même temps aux articles de votre confrère, en faveur d’une réforme commerciale qu’il prétend opérer par le moyen d’une boutique d’épiceries. Dans le numéro 17 de l’Indicateur, M. Derrion s’exprime ainsi : « Oui travailleurs, nous vous le répétons, notre conviction est que le moment n’est pas encore arrivé pour établir des maisons centrales, etc. » [2.2]Evidemment le but de M. Derrion a été de jeter de la défaveur sur la maison centrale actuellement existante. Nous ne savons en vérité pourquoi ; dans quel intérêt ? il n’a eu sans doute d’autre mobile, que celui d’attirer des chalands à son système. Nous le lui pardonnons bien volontiers, mais qu’il dise aujourd’hui que sa mission est d’ériger et non de détruire, il est prouvé à nos yeux comme à ceux des lecteurs intelligens, que telle n’est pas sa pensée secrète. Ce qui est écrit est écrit ; sans insister davantage sur une chose évidente, on se demande quel a pu être le motif de cette attaque de M. Derrion. Moins que tout autre, il devait se la permettre, son rôle de novateur s’y oppose ; et comment veut-il qu’on écoute avec faveur son système, lorsqu’il censure celui des autres ? Comment veut-il qu’on se laisse fasciner par le programme d’une institution qui n’existe encore que dans son imagination, lorsqu’il prononce anathème contre une institution déjà existante, qui a fait ses preuves, et qu’il faudrait au moins connaître pour la juger. Certes, il est plus facile de comprendre une réforme commerciale dans l’association du travail et du capital, dans la réunion du commerce à la fabrique, que dans la suppression de la classe intermédiaire des marchands, classe utile et qu’il n’est pas plus permis d’exproprier de son industrie, que toute autre classe. Il est plus rationnel, selon moi, d’espérer une amélioration matérielle du sort des travailleurs, par leur introduction immédiate dans la sphère commerciale, que en leur assurant une part, dans des bénéfices quelconques, sans y apporter autre chose que leur consommation individuelle. Dans l’espèce le bénéfice est trop minime pour arrêter les regards de ceux qui ne se contentent pas d’étudier la superficie des choses. Quant à l’amélioration morale elle doit être comptée pour beaucoup, et sous ce rapport je ne vois pas comment le système de M. Derrion pourrait soutenir la comparaison avec celui de la maison centrale. C’est donc bien à tort que le rédacteur en chef de l’Indicateur a, passez-moi l’expression, jeté une pierre dans notre jardin. Cela m’étonne encore d’autant plus de sa part, qu’il avait paru d’abord sympathiser avec l’établissement des maisons centrales ; mais il paraît que la fixité dans ses opinions n’est pas son caractère dominant ; ceci soit dit sans intention de l’offenser. M. Derrion a cru trouver merveille en empruntant à Fourrier le Phalanstère ; mais d’une idée grande et belle quoique impraticable à l’état de civilisation où nous sommes arrivés, il a fait une indigne parodie. C’est un géant qu’il a mis sur le lit de Procuste et il en a fait un nain. Je voulais me tenir sur la défensive et insensiblement je suis devenu agresseur, mais je suis loin d’avoir tout dit, et cette lettre, étant déjà longue pour le cadre de votre journal, je la terminerai ici dans une seconde que je vous adresserai pour votre prochain numéro je continuerai l’examen critique du système de M. Derrion. Agréez etc., gauthier.
La lettre suivante nous est parvenue trop tard pour avoir place dans notre dernier numéro. AU REDACTEUR. Dans votre compte-rendu de la séance du conseil des prud’hommes du 19 mars, vous avez fait une grave erreur, (nous la croyons involontaire) en faisant dire au sieur Vincent ce qu’il n’a pas dit lui-même ; vous nous représentez comme étant les débiteurs de ce chef d’atelier pour la façon de deux pièces. Il y a erreur complète. Sa réclamation est une demande en remboursement, 1° d’une action souscrite dans notre société et dont la valeur est de 25 fr. ; 2° d’une somme de 14 fr., provenant de cotisations payées par lui à la même société et réglées par les articles de son contrat, lequel fixe à cinq ans la durée de chaque action ; de telle sorte que ce n’est que le premier janvier 1839que le sieur Vincent sera recevable à faire la demande qu’il faite aujourd’hui, si toutefois la société ne l’a pas, dans son intérêt, remboursé auparavant. Nous sommes d’autant plus étonnés d’avoir été appelés dans une cause semblable, que nous pouvions être demandeurs envers ce sociétaire qui nous tient depuis plusieurs mois à découvert d’une certaine quantité de marchandises, sans aucune raison plausible. Mais il y a plus, et c’est lui qui vous l’apprend, le remboursement de tout ce qu’il a mis dans la société lui a été offert par un des sociétaires, nommé Gautier, à la condition que le sieur Vincent rendrait ses comptes ; cela n’est-il pas de toute justice, et ce dernier peut-il rester le détenteur de ce qui ne lui appartient pas, sans se rendre coupable d’un abus de confiance. Il doit à notre modération que les tribunaux n’aient déjà sévi contre lui pour ce fait. Veuillez, monsieur le rédacteur, faire connaître dans votre prochain numéro ces explications que tout le monde peut vérifier. Agréez l’assurance de notre considération, Les gérans de la Maison-Centrale, BONNARD, CHARPINE et Cie.
CONSEIL DES PRUD’HOMMES.
Séance du 2 avril 1835. Président M. Riboud, Membres : MM. Berthaud, Bourdon, Chantre, Cochet, Dufour, Fichet, Joly, Labory, Micoud, Milleron, Pellin, Wuarin. 20 affaires sont appelées, dont 1 sur citation. Dans ce nombre, figurent les trois de M. Auguste Depouilly, [3.1]contre des fabricants de crêpes établis à la campagne. Trois causes ont été arrachées, deux jugées par congé-defaut et 4 par défaut (Bret et autres C. Sivoux ; Pradel C. Ginet et Ce ; etc. ) 1 a été renvoyée à huitaine et deux plaidées à huis clos savoir : Mes Lassauzay C. Berard et Serrière C Dlle Perriet. Cette dernière a été conciliée ; quant à l’autre, la convention d’apprentissage a été résiliée et l’apprentie condamnée à 50 fr. d’indemnité. Les autres causes ont été jugées ainsi qu’il suit : carrier C. dame gautier. Le conseil sur le vu de l’enquête à laquelle il a fait procéder (voy. le n. 13) a ordonné que l’apprenti rentrerait dans l’atelier, et l’a mis sous la surveillance de M. Perret, prud’homme. depouilly (Auguste) C. bigot, mellan et perron. Le conseil par son jugement du 19 mars dernier (voy n. 12.) avait délégué MM. Milleron et Pellin, pour vérifier l’état des matières, et savoir si les pièces étaient faisables et, à défaut, en référer au conseil pour autoriser la levée. Les prud’hommes ont déclaré que les pièces étaient faisables et le conseil a ordonné en conformité que les chefs d’ateliers seraient tenus de les fabriquer. Il a fixé la journée à 12 mouchoirs qui seraient rendus chaque semaine, et ordonné qu’à défaut par eux de ce faire, ils payeraient la valeur de la chaînei. giraud-bedda C. cherpas. Cherpas a été condamné à payer 10 fr. d’indemnité pour avoir levé sans autorisation du conseil, une pièce que lui avaient confié Giraud-Bedda. pellerin C. troubat-vernas. Les questions à juger étaient celles-ci : L’apprenti dans une fabrique d’impression où il est salarié suivant l’usage, s’il vient à quitter sans raison l’atelier, doit-il être condamne à payer une indemnité ou seulement à remplacer le temps perdu. – Résolu dans le premier sens ? Si le manufacturier n’a pas mis cet apprenti en demeure de rentrer, peut-il exiger l’indemnité qui lui est due ? Non. Pellerin qui avait encore deux ans à faire, a été condamné à réintégrer l’atelier pour y finir son temps, mais il a été renvoyé de la demande en indemnité, formée par Troubat-Vernas, par le motif qu’il n’avait pas été mis en demeure.
i. Cette cause doit servir de leçon aux négociants qui emploient des fabricants dans les campagnes ; ceux-ci ayant d’autres moyens d’existence ne se gênent pas pour lever les pièces et se refuser à toute fabrication difficile. Cependant, pour être justes, nous devons ajouter que Bigot, Mellan et Perron ne paraissent pas être tout-à-fait dans leur tort. Ils ont déclaré que les pièces étaient infaisables, et de plus l’un d’eux a présenté cette réflexion assez naturelle, qu’il fallait bien que cela fut, puisque depuis trois ans qu’il travaillait pour la maison Auguste Depouilly, c’était la première fois qu’il se refusait à fabriquer. Entre les allégations des chefs d’atelier et le rapport des prud’hommes délégués, nous savons que le conseil ne pouvait pas hésiter ; aussi c’est sur le choix de ces délégués que nous aurions plus d’une observation a soumettre au conseil, et par exemple, pourquoi n’a-t-on pas choisi M. Charnier qui connaît spécialement l’article crêpe ? Il ne faut pas l’oublier, c’est du zèle des prud’hommes rapporteurs, de leur fermeté à soutenir les droits des ouvriers et enfin, de leur aptitude que dépend en grande partie le sort des contestations soumises au conseil.
COUR D’ASSISES DU RHÔNE. NAPOLY et GAUTHIER ont été condamnés pour vol domestique et recel à deux ans de prison. L’affaire de TRABUCCO a été renvoyée aux prochaines assises. MM. Victor PENNICAUD Victor et Paul-Emile PRUDHON, le premier rédacteur et le second gérant du Censeur, ont été acquittés. Pascal et Jean-Baptiste GEAY, frères, ont été condamnés à trois ans de prison, et GEAY père à un an ; il s’agissait de coups et blessures graves, ayant occasionné la mort, dans une rixe.
La 2e Livraison de la revue du lyonnais, publiée par M. Léon Boitel, et qu’il faut de plus en plus se garder de confondre avec un cahier mensuel qui s’imprime aussi à Lyon, d’où lui est venu le titre de Revue de Lyon, vient de paraître. Nous y avons remarqué une Lettre d’un canut en 1769 qui ne déparerait pas la revue rétrospective ; [3.2]un article de M. Ernest Falconnet1 sur l’Église de Brou ; des notices sur l’Abbé de Pure, sur Bourgelat, etc.2 – Cette livraison est enrichie d’un portrait de jacquard , fort ressemblant ; ainsi, l’éditeur tient plus qu’il n’a promis. – La Revue du Lyonnais paraît tous les mois par livraisons de 48 à 64 pages d’impression. – On souscrit chez M. Léon Boitel, imprimeur, quai St-Antoine, n. 36. – Prix : 2 fr. payables à la réception de chaque livraison. La 12e Livraison de la revue républicaine vient de paraître. Elle complète le tome 4 et se compose des articles suivans. Préliminaires de la diplomatie populaire ; Salon de 1835, par Alex. decamps ; du Suffrage universel, direct et départemental, par F. dupont ; Ugo Fosçolo3, par Louis blanc ; Lettres sur les hommes et les choses de ce temps-ci, par Armand marrast ; La fin du monde, par godefroy cavaignac ; Presse étrangère, par A. J. ; De la Liberté dans les Républiques. Nous ne saurions trop recommander la lecture de cette Revue qu’il faut distinguer du nombre des écrits éphémères que la presse enfante chaque jour. – On s’abonne à Paris au bureau rue du Croissant n. 16. Il paraît une livraison chaque mois. Trois livraisons forment un vol. Prix : 22 fr. par trimestre.
Le 15 avril prochain une Exposition de peinture, dessin, sculpture et architecture aura lieu à GRENOBLE. Elle sera close le 15 mai suivant.
PRODUITS DES IMPOTS INDIRECTS Ce Tableau est extrait du n° 15 du moniteur.
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1832. |
1833. |
1834. |
Enregt., timbre, greffe et hypothèques : |
191,999,000 ; |
194,047,000 ; |
191,795,000. |
Douanes, navigation : |
105,510,000 ; |
106,236,000 ; |
106,102,000. |
Boissons : |
62,731,000 ; |
68,244,000 ; |
74,621,009. |
Voitures publiques, navigation, etc. : |
22,247,000 ; |
25,058,000 ; |
26,401,000. |
Vente des tabacs : |
67,488,000 ; |
69,631,000 ; |
72,643,000. |
Des poudres : |
3,423.000 ; |
3,561,000 ; |
4,553,000. |
Taxe des lettres et droit de 5% : |
31.103.000 ; |
32,032,000 ; |
32,712,000. |
Du service rural des postes : |
1,437,000 ; |
1,503,000 ; |
1,606,000. |
Produit des malles-poste et Paquebots : |
1,600,000 ; |
1,829,000 ; |
1,809,000. |
Droits de consommation des sels à l’intérieur : |
6,362,000 ; |
6,757,000 ; |
7,331,000. |
Droits de consommation à l’extraction sur les côtes : |
53,846,000 ; |
54,911,000 ; |
53,307,000. |
Loterie : |
11,109,000 ; |
10,140,000 ; |
5,583,000. |
Total : |
558,855.000 ; |
573,949,000 ; |
578,463,000. |
Projet d’un canal souterrain à pratiquer dans la montagne de la Croix-Rousse, pour la jonction du Rhône et de la Saône. (Suite Voy. nos 7 et 9). Outre les avantages qui doivent nécessairement résulter pour le commerce en particulier et pour les habitants de la cité en général du percement de la montagne de la Croix-Rousse ; cette admirable entreprise, en découvrant un grand nombre de sources, d’excellentes eaux, résoudra infailliblement et avec succès le problème de la fourniture de l’eau nécessaire à la consommation de la grande majorité des habitants de Lyoni. Toutes ces sources seraient recueillies en un ou plusieurs vastes réservoirs pratiqués de chaque côté de la voûte du canal. Leurs produits en seraient tirés au moyens de procédés hydrauliques et conduits à d’autres réservoirs dans l’intérieur de la ville. La montagne de la Croix-Rousse renferme, à différens niveaux, une immense quantité d’eau ; on peut s’en convaincre par le grand nombre de puits qui y existent. Ces puits offrent en profondeur 19, 27, 31, 38, 52 et 108 pieds ; un seul porte 131 pieds. Il est donc hors de doute que par l’agglomération des sources et par l’emploi d’une faible portion des fonds [4.1]annuellement votés pour alimenter les fontaines de la ville, les habitans seront mis en possession d’eaux abondantes et non moins légères et salubres que celles de la Chana et de St-Georges. Le percé de la montagne offrira, sous sa voûte, une gare des plus utiles aux Brotteaux, contre les glaces ; et un abri sûr pour toute espèce de marchandises contre les pluies, les gelées, les neiges et même les vols. Des galeries parallèles à sa direction pourraient être ouvertes sur les parties latérales. Les dimensions et la position de ces galeries seraient différentes d’après l’usage auquel on les appliquerait. Dans l’endroit le plus sec on établirait un magasin à poudre ; dans les endroits humides seraient placés des réservoirs d’eauii, des glacières, des entrepôts de vin, etc., etc. Un souvenir des plus tristes vient à l’appui de cette perspective d’utilité générale. L’arsenal de Lyon, à l’époque du siège, fut réduit en cendres. Un canal voûté comme il a été dit, aurait alors sauvé la fortune publique. Lyon pourrait un jour être assiégé ; il convient qu’il ait une retraite à l’épreuve du boulet et de la bombe, pour recéler ses archives, sa bibliothèque, ses tableaux et tout ce que la propriété publique ou particulière offre de plus précieux. Moyens d’exécution du canal. Ce serait se tromper que de croire qu’une entreprise aussi considérable exigerait une énorme mise de fonds. Des capitalistes initiés aux grandes opération financières, MM. les frères Séguin, furent chargés en 1830, par M. le préfet de l’époque, de lui faire un rapport sur le projet de ce canal. Le rapport de ces messieurs lui fut favorable, et la dépense d’après leur estimation, devait être de 1,535,000 mille fr., somme fort minime si on la compare à celle des produits de tout genre qu’offre l’exploitation du canal et des établissement accessoires dont il doit être le principe. MM. Séguin, d’après toute probabilité, auront calculé que de grands frais seraient épargnés dans cette entreprise ; que l’emplacement à acheter n’était point d’une grande valeur ; que les pierres et le sable se trouveraient sous la main ; que le Rhône et la Saône offraient de beaux bassins et réservoirs, qu’il n’y avait point à faire établir des canaux de charge ; que si la vente des terres devait être à peu près nulle, celle des pierres présentait plus de bénéfices, à en juger par l’exploitation du rocher de Pierre-Scize, dont les produits s’élèvent de 45 à 80 fr. la toise, tandis qu’ils ne sont payés aux extracteurs que de 20 à 22 fr. la toise. C’est d’après de telles considérations que le devis de l’entreprise ne leur aura point paru devoir excéder ladite somme de 1,535,000 fr. Si, d’un autre côté, l’on considère que le besoin des eaux devient de jour en jour plus impérieux dans la ville et que l’exploitation souterraine des sources se lie à celle du canal, et permet d’adopter à cet égard un nouveau système, on peut sans crainte d’être taxé d’exagération, prédire que les produits de l’entreprise excéderont, sous moins de dix ans, les capitaux qui y seront employés. Ce serait une question digne d’être méditée par le gouvernement de savoir si cette entreprise ne devrait pas être faite pour le compte de l’état, et si dans ce cas ce magnifique travail ne devrait pas être exécuté par des ouvriers appartenant à l’armée, comme le fut dans le temps le canal de Châlons. Deux compagnies de mineurs, munis de la poudre nécessaire, pourraient dans l’espace de deux ans, au moyen d’un procédé qui leur serait donné par l’auteur de ce projet, percer les rochers de la Croix-Rousse et ouvrir une communication réclamée par tant d’intérêts. L’auteur de ce projet, encouragé par le suffrage flatteur de personnes graves et instruites, s’adresse avec confiance à MM. les négocians du Rhône pour en accomplir 1’accomplissement. Il est convaincu que lorsqu’un tel projet aura été étudié sous le rapport des avantages généraux qui y sont signalés, et sous celui des développemens immenses dont il est susceptible, son adoption ne pourra faire l’objet d’un doute. Il ne saurait se persuader que les autorités et administrations du département du Rhôneiii, [4.2]qu’un grand nombre de riches propriétaires, ne s’empresseront point de participer à une entreprise monumentale si utile à la population lyonnaise, et dont l’exécution sera si glorieuse pour ses fondateurs. A. bigaud1.
i. Les travaux qui s’exécutent aujourd’hui pour la conduite des eaux du Rhône pourraient être utilisés pour y conduire aussi les eaux de sources. ii. Qui, s’ils eussent existes dans les étés de 1822 et 1823, auraient rendu services aux habitants en les distribuant ainsi que cela se pratique à Paris. iii. Le projet a été présenté à M. Prunelle, maire, le 20 juin 1831, et à M. Gasparin, préfet, le 12 octobre 1833.
LE VIEUX CHÊNE. Air de la bonne vieille. « Près du foyer où je vis la lumière, Un chêne antique étendait ses rameaux ; Il était cher aux fils de la chaumière, Sous son ombrage ils oubliaient leurs maux ; Las du travail d’une longue semaine, Un jour heureux leur devenait permis : Ah ! quand pourrai-je à l’ombre du vieux chêne, M’asseoir encore auprès de mes amis ! « Sous ses hameaux la jeunesse folâtre Venait chercher des plaisirs sans regrets : Le vieux guerrier devenu simple pâtre, Parlait de gloire en buvant un vin frais ; Rêvant encor notre splendeur trop vaine, Il croyait voir tous les peuples soumis : Ah ! etc. « Plus d’une fois, sous son ombre propice, La volupté vint chercher un abri ; Son tronc poudreux vit plus d’un sacrifice Où la pudeur jeta son dernier cri. Du voyageur, égaré dans la plaine, Sous ses rameaux le couvert était mis : Ah ! etc. « Quand je partis, il m’en souvient, mon père Sous ses rameaux me fit un long discours ; Sous ses rameaux la belle qui m’est chère Me fît serment d’être à moi pour toujours ; Un long baiser confondit notre haleine ; Plaisir plus vif au retour fut promis… Ah ! etc. » Ainsi chantait un enfant du village ; Il touche enfin à l’instant du retour ; Il songe alors aux amis du jeune âge, A son vieux père, au chêne, à son amour. Mais son amante avait brisé sa chaîne, Ses vieux parens s’étaient tous endormis, l’orage avait renversé le vieux chêne, La mort avait moissonné ses amis !
PROCÈS des detenus d’avril, devant la cour des pairs. (38-1) Ce procès sera publié par livraisons de huit grandes pages d’impression, paraissant chaque jour. Il sera précédé de l’acte d’accusation de M. Girod (de l’Ain). Prix de chaque livraison, 10 centimes. On souscrit à Lyon : chez MM. gagnoux, rue du Bœuf, n. 36 ; Dlle perret, rue St-Dominique, n. 13 ; gallien, rue d’Egypte, n. 5 ; tournissou, cafetier à la descente du pont de la Guillotière ; martin, perruquier, rue des Prêtres, n. 30 ; bertachon, rue St-Georges, n. 45 et au bureau du journal. (35-3) On demande une fille qui sache dévider ; on lui donnera un gage. S’adresser chez M. martinon, place de la Croix-Rousse, n. 17, au 2e. (39-1) A VENDRE Un métier de courant, avec mécanique en 600, et un rouet à canettes. S’adresser à M. Tondat, rue Confalons, n. 6, au 5me, en face la Halle-au-Blé.
Notes (un mot sur les fabriques étrangères de...)
Rappelons qu’Arlès-Dufour venait de publier un ouvrage intitulé Un mot sur les fabriques étrangères de soieries, à propos de l'exposition de leurs produits faite par la Chambre de commerce de Lyon. Dans la note ii d’origine, il y a, une nouvelle fois, stigmatisation par Chastaing de ce qu’il perçoit comme l’inculture de L’Indicateur, les rédacteurs de ce journal faisant d’Alexandre le Grand un lacédémonien et non un macédonien.
Notes (La 2 e Livraison de la revue du lyonnais ,...)
Ernest Falconnet (1815-1891) littérateur lyonnais, il était le cousin de Frédéric Ozanam. Référence ici à l’Abbé lyonnais Michel de Pure (1634-1680) ainsi qu’à Claude Bourgelat (1712-1779) qui avait fondé à Lyon en 1771-1772 la première école vétérinaire. Niccolo Ugo Foscolo (1778-1827), poète et écrivain italien.
Notes (Projet d’un canal souterrain à pratiquer dans...)
Annet Bigaud qui publiera l’année suivante à l’imprimerie Perrin, Canal du duc d'Orléans à Lyon. Projet d'un canal souterrain destiné à joindre le Rhône à la Saône.
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