L'Echo de la Fabrique : 26 février 1832 - Numéro 18

On parle beaucoup des élections du nouveau conseil des prud’hommes1 ; on en parle, est-ce là tout ce que doivent faire les électeurs ? Le moment s’approche et on ne pense pas à se préparer ; la négligence pourrait bien faire que le conseil des prud’hommes, au lieu de représenter deux corps distinctifs, n’en représentât qu’un seul. Savez-vous ce que vous disent quelques électeurs [3.2]pour justifier leur insouciance ? Ils allèguent qu’ils ne vont jamais pardevant les prud’hommes. Mais s’ensuit-il de là que tel qui n’a pas paru au conseil pendant vingt ans d’établissement, ne puisse y paraître demain ? Et d’ailleurs ne savent-ils pas que le nouveau conseil doit établir les prix par une mercuriale ? Nous allons citer un fait qui seul doit les convaincre de la nécessité d’obtenir des juges équitables. Dernièrement, un négociant consciencieux, dont nous pourrions citer le nom, n’étant pas d’accord avec un chef d’atelier sur le prix des façons, lui dit amicalement : écoutez ; allons pardevant les prud’hommes, et ce qu’ils décideront, nous nous y tiendrons tous deux, ce qui fut fait ; ainsi, avec un mauvais conseil, il est présumable que l’ouvrier n’aurait pas été satisfait. L’insouciance, selon nous, est donc coupable, et le chef d’atelier ne se doit pas seulement à lui de voter pour de bons prud’hommes, il le doit aussi à la masse d’ouvriers que l’ordonnance prive de ce droit.

Nous devons prévenir les chefs d’ateliers contre quelques manœuvres qu’on nous a signalées. On dit, et nous ne pouvons le croire, que quelques négocians cherchent à influencer les élections en insinuant aux chefs d’ateliers, que si l’on nomme pour prud’hommes les hommes que ces messieurs désignent, il serait impossible de s’entendre. Nous ne faisons ici aucun commentaire, nous laissons à la sagacité de nos lecteurs le soin de juger quels sont les hommes qu’on voudrait exclure.

Les chefs d’ateliers doivent voter d’après leur conscience ; aucune influence ne doit agir sur eux ; ils doivent choisir des hommes probes, connus par leurs précédens, joignant la fermeté à la justice, et ne fléchissant jamais auprès des considérations, et encore moins près de la flatterie. Il faut que les électeurs se défient surtout de ceux qui vont quêtant les suffrages ; celui qui veut à toute force être prud’homme, cache quelque arrière-pensée.

Nous ne saurions trop recommander aux électeurs de faire de bons choix ; car de là dépend l’avenir de la fabrique d’étoffes de soie de Lyon.

Notes de base de page numériques:

1 L’auteur de ce texte est Antoine Vidal d’après la Table de L’Echo de la Fabrique (numéros parus du 30 octobre 1831 au 30 décembre 1832).

 

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