L'Echo de la Fabrique : 11 août 1835 - Numéro 1

27, 28, 29 juillet 1830.

Il est passé le 5e anniversaire de ces journées héroïques où le peuple de Paris se levant comme un seul homme renversa la royauté, où le peuple des provinces répondit par ses acclamations aux acclamations de la capitale ; rien ne put protéger les Bourbons, ni l'antiquité de leur race se liant par d'honorables souvenirs au berceau de la France, ni leur débonnaireté, ni la reconnaissance pour les bienfaits de la paix, tout fut oublié..... la LIBERTÉ était en péril. Sublime et mémorable exemple ! Toute une famille royale captive est exilée... les pleurs de la fidélité monarchique coulent en silence, le peuple ne s'en offense pas, car il est magnanime ! Mais, généreux il est en même tems implacable. Il est trop tard, fait-il répondre à ceux qui viennent le solliciter au nom d'un répentir tardif.... et paisible autant que glorieux il retourne à ses travaux, attendant les fruits de sa victoire.

Aujourd'hui la plupart des héros de ces journées sont dans les fers. Juste retour des choses d'ici bas, dit la légitimité, ils expient une gloire coupable. Je vous comprends, mais je ne vous crois pas hommes du droit divin ! votre ironie est bien amère ! Oui : les c?urs patriotes sont brisés et le peuple se demande : qu'ont-ils donc à expier ? Est-ce que le roi des barricades n'est plus sur le trône ? ? Peuple tu comprendras un jour, et tu sauras pourquoi ces fêtes sont si mornes, tu t?étonnes de ne point voir d'enthousiasme. ? Eh ! pourquoi as-tu laissé périr le feu sacré. Dis : qu'as-tu fait de tes défenseurs ? Entonne donc avec nous l'hymne funèbre qu'un de ces jeunes citoyensi aujourd'hui captif, faisait entendre il y a déjà trois ans, et auquel il a donné le nom trop mérité de de profundis.

Pourquoi chanter quand gémit la patrie ,
Livrée aux mains de ministres pervers ;
Pourquoi chanter ? La liberté honnie,
Voit ses enfans expirer dans les fers.
Ah ! que des pleurs humectent nos paupières,
Que nos pensers suivent leur triste cours?
Amis des morts récitons les prières,
Pleurons sur les trois jours.

Pleurons, pleurons, car l'infâme doctrine
Dans ses réseaux tient le peuple géant,
Le rapétisse à sa taille mesquine,
Au canapé le fixe tout sanglant.
Est-ce bien lui si révéré naguères,
Lui si brillant de glorieux atours ;
Amis, etc.

Tu payas cher, peuple, ta tolérance,
Tu méprisais tes ennemis vaincus,
Tu sommeillas et la sainte alliance ;
Rit maintenant de tes folles vertus.
Tu fis trembler ces majestés altières,
Et te voilà le plastron de leurs cours.....
Amis, etc.

[3.2]O bonnes gens, dont la molle indolence,
Au statuquo se cramponne d'effroi :
Riez....., vantez le bonheur de la France,
Chantez sa gloire et buvez à son roi !
Nous qui croyons à des tems plus prospéres,
Réservons-leur nos chants et nos amours.
Amis, etc.

Ils revivront ! ils revivront ! sans doute ;
Mais gémissons sur la fatalité,
Qui détourna de son immense route
Le char si beau de la liberté.
Pour l'arracher aux fangeuses ornières,
Le ciel est-il notre unique recours.
Amis, etc.

Notes de fin littérales:

i Amédée de Roussillac.

 

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