L'Echo de la Fabrique : 11 août 1835 - Numéro 1

MISERES PROLETAIRES.

une jeune fille.

[4.1]Emilie Babeuf, née à Lyon, devenue orpheline à l’âge de 20 ans, habitait à Paris, rue des Vieilles-Etuves-St-Honoré, n. 14, une petite chambre où elle travaillait de l'état de brodeuse, qu’elle avait appris dans un temps plus heureux.

Bien que ses dépenses fussent restreintes, la pauvre fille gagnait, à peine, de quoi s'entretenir et payer son modeste loyer. Pour vivre, il fallut engager les modiques dépouilles de ses parents et jusqu'à ses vêtements personnels. Le boulanger donne bien du pain pour ou deux jours, mais le troisième, il ne faut plus y retourner sans argent. Et pourtant, elle avait faim. Oh ! conçoit-on bien la douleur de la faim : Quatre sous eussent alors suffi à cette infortunée ; mais, sans ouvrage et sans crédit, il fallait les devoir au deshonneur ; car, à cette condition, plus d'une bourse avait été ouverte à l'intéressante Emilie. Plutôt mourir, avait-elle dit.

Il y a peu de jours, vers 6 heures du matin, dans un accès de désespoir, cette malheureuse s'est précipitée dans la Seine.

Un batelier s’est vite jeté à la nage, et a eu le bonheur de l’atteindre et de la ramener sur la berge, et par les soins de M. Lecouteux, médecin (le même qui sauva Léonide S., asphixiée, son amant l’ayant abandonné dans un état de misère)… elle a été rendue à la vie. - M. Chauvin, commissaire, a donné asile chez lui, à cette jeune et intéressante victime. Honneur et bénédiction à cet homme philantrope ! Que le sort d’ Emilie soit assuré, maintenant ; qu'elle reçoive, enfin, la récompense de sa vertu ! elle devra une seconde existence à Dieu, qui l’a protégée au moment de périr, à l’homme généreux, que la vue du suicide consommé a ému ; mais que devra-t-elle à la société.

 

Contrat Creative Commons

LODEL : Logiciel d'édition électronique